Une année d’IPO hyperactive liée au COVID

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Nous avons vu le haut du cycle des introductions en bourse, estime Adam Said, CEO de ACE Company.

Le millésime 2021 des IPO a été porté dans un premier temps par le momentum sur les nouvelles technologies lors du premier confinement. Puis le manque d’intérêt sur les thèmes liés au COVID lors du second semestre a profité aux valeurs cycliques comme les pétrolières, les matières premières et les financières. «Il y a eu une surenchère dans le numérique et les énergies renouvelables, puis le dénouement des achats liés au confinement. Pourtant ces thèmes resteront des moteurs de croissance à long terme», assure Adam Said, CEO de ACE Company qui clôt l’exercice avec 1,7 milliards de dollars US sous gestion. Entretien.

Comment qualifiez-vous l’activité des IPO en 2021?

Nous avons vu le haut du cycle au milieu de l’année. L’activité a ensuite ralenti durant le second semestre et la fenêtre de liquidité s’est refermée. Nous avons été témoins de très belles IPO ainsi que de moins bonnes opérations, notamment de la part d’entreprises dotées de faibles fondamentaux qui cherchaient purement à capitaliser sur les liquidités. Mais nous voyons aussi que le marché réagit et pénalise ces sociétés opportunistes. Un indicateur comme l’Ark Invest a reculé de près de la moitié depuis son sommet. Certains de ses sous-jacents ont perdu 80% de leur valeur boursière. Le marché a été marqué par une surliquidité lors du premier semestre, mais lors du second on a assisté au dénouement des achats liés au confinement, ce qui a amorcé une rotation des secteurs d’intérêt hors du COVID trade lors de la réouverture. Malheureusement, ce mouvement a également emporté des entreprises de qualité.

Quelles furent les IPO emblématiques du dénouement des achats liés au confinement?

Durant le verrouillage, les sites de courtage ont atteint une popularité sans précédent. Le prix de l’IPO de Robinhood fixé à 40 dollars US a doublé en peu de temps. Elle a ensuite corrigé de 80 à 8 dollars. Pourtant innovante, la société a été pénalisée par la rotation hors des actions liées au COVID.  ChargePoint qui est le fournisseur d’infrastructures pour véhicules électriques possédant le plus gros réseau de recharge aux Etats-Unis (et que nous avons dans notre portefeuille), avait surperformé peu après son IPO en février 2020 fixé à 10 dollars. Lors de l’engouement de la crise, le titre a atteint 40 dollars. Actuellement, il se traite autour de 15 dollars. Son cours reste supérieur à celui de son IPO, mais nous pensons que son juste prix se situe entre 20-30 dollars dans un horizon de 3 à 5 ans car les transports électriques vont se développer davantage aux Etats-Unis.

La décarbonisation va surtout se jouer sur les trajets de courtes distances, entre 5 et 15 kilomètres.
Vous évoquiez un assèchement des IPO en 2022…

C’est en partie déjà le cas et le marché se cherche. Les matières premières et les énergies traditionnelles reprennent alors qu’elles n’étaient pas très porteuses durant ces dernières années. A voir si cette tendance perdure ou si les facteurs à long terme de carbonisation reprendront le dessus.

Vous avez participé à l'IPO de la biotech suisse Sophia Genetics sur le Nasdaq. Quels sont les atouts de cette société spécialisée dans la médecine personnalisée?

J’ai confiance en Sophia Genetics ainsi qu’en son management. Son fondateur Jurgi Camblong possède une fine compréhension du secteur. C’est un véritable leader qui saura accompagner l’évolution de la médecine traditionnelle aux thérapies personnalisées grâce à son travail sur l’application des marqueurs génétiques. Par ailleurs, la société possède une plateforme de données génétiques conséquente dont la qualité est un gage de performance. Avec ses 45 millions de chiffre d’affaires, Sophie Genetics évolue dans un marché qui ne cesse de croître. Le recul du titre depuis l’IPO constitue une opportunité de valorisation.

Vous avez aussi participé au rachat de Stromer, une société suisse qui fabrique des vélos électriques. Pouvez-vous revenir sur cette opération?

Nous avions fermé le deal Stromer avec le fonds français Naxicap l’année passée. Basée à Berne, l’entreprise fabrique des vélos électriques qui atteignent 45 km à l’heure. Nous nous attendons à davantage de mobilité à deux roues à travers le monde. Stromer, mais aussi ses concurrents comme le hollandais Cowboy ou l’américain Trek ont connu une forte croissance durant le COVID. Pa ailleurs, l’impact carbone de Stromer est plus important que celui de ses compétiteurs. Nous sommes convaincus que la décarbonisation va surtout se jouer sur les trajets de courtes distances, entre 5 et 15 kilomètres. Nous avions déjà approché le thème de la nouvelle mobilité dans le passé en investissant dans des compagnies de batteries ainsi que dans Tesla il y a 10 ans.  

Votre stratégie de venture capital Swiss Tech s'est récemment développée avec l'arrivée d'Anybotics, Batmaid, et Netguardians. Comment sélectionnez-vous les pépites suisses?

Parmi les tendances globales, nous identifions les fleurons de chaque industrie comme Netguardian qui œuvre dans la protection.  Ou encore Anybotics qui est dans le top 3 de la robotique aux côtés de Boston Dynamics et Unity. Nous les accompagnons afin qu’elles deviennent plus compétitives car la deeptech peut très bien s’exporter hors de la Suisse. Notre stratégie se décompose en une poche early stage de capital d’amorçage, et une poche de capitaux de croissance dans des sociétés mieux établies comme Batmaid.

A lire aussi...