Un an après son IPO, quel avenir pour Galderma?

Olivier Wurlod

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L’action du géant suisse des produits de soin pour la peau célèbre sa première année de cotation. Le bilan avec Stefan Schneider, analyste chez Vontobel.

Il y a un an, Galderma faisait son entrée sur les marchés et marquait l’histoire de la place boursière helvétique. Avec 2,3 milliards de francs levés, cette IPO représentait autant que le volume des dix introductions en Bourse en Suisse en 2023. D’après les experts de EY, elle s’est même classée en tête des opérations depuis une décennie. Après un bon démarrage, comment a évolué l’action et est-ce encore le moment de rentrer sur Galderma? Stefan Schneider, analyste chez Vontobel suit de près cette société et nous livre son analyse.

Galderma fête sa première année en bourse avec une baisse significative de son cours depuis le début du mois de mars. Comment expliquer cette chute?

L'action a connu une première année boursière exceptionnelle. Cependant, le sentiment des investisseurs a commencé à se dégrader après l'entrée en fonction de la nouvelle administration aux Etats-Unis, ce qui a également eu un impact sur les consommateurs américains amateurs des produits Galderma. De plus, les résultats pour 2024 et les perspectives pour 2025 n'ont pas convaincu sur tous les points.

«Plusieurs investisseurs en private equity présents avant l'introduction en bourse ont cédé une partie de leurs participations.»

Ces diverses incertitudes ont incité les investisseurs à se repositionner davantage sur l'Europe, en privilégiant des valeurs plus défensives, tout en prenant des bénéfices sur des valeurs qui avaient particulièrement bien performé.

Par ailleurs, la fréquence élevée des annonces cliniques et réglementaires observée chez Galderma en 2024 - et qui est à l’origine de la bonne performance du cours de l'action - ne devrait pas se répéter en 2025. Nous avons également noté que plusieurs investisseurs en private equity présents avant l'introduction en bourse ont cédé une partie de leurs participations, exerçant ainsi une pression supplémentaire à la baisse sur le titre.

Sur l'ensemble de l'année, le cours de l'action Galderma reste positif. Etes-vous satisfait de ce premier résultat?

Globalement, la première année de cotation de Galderma peut être considérée comme un succès, même si le titre a effectivement connu une baisse ces dernières semaines. Introduite sur SIX au prix de 61 francs, l'action se négociait à 92,75 francs le 27 mars 2025, soit une progression de 52%!

Nous sommes très satisfaits de cette performance - et nous n'en attendions pas plus, puisque nous avions rétrogradé notre recommandation de «Acheter» à «Conserver» juste en dessous de 100 francs. Depuis la publication des résultats de l'exercice 2024, nous avons relevé notre objectif de cours à 105 francs, tout en maintenant notre recommandation à « Hold ». Nous pensons que les investisseurs devront faire preuve d'un peu plus de patience en 2025. Même si deux nouveaux produits seront lancés cette année, leur impact sur les résultats trimestriels mettra un certain temps à se faire sentir.

Il suffit de regarder l'évolution du cours des actions de concurrents comme celle de L'Oréal pour se rendre compte que le secteur traverse actuellement une période boursière difficile... Quelles en sont les raisons?

J'ai du mal à identifier de véritables concurrents directs à Galderma. C'est la seule entreprise qui se concentre uniquement sur les soins de la peau, en s'appuyant sur trois segments distincts du marché de la dermatologie. Dans ce secteur, la diversité de l'offre produit une différenciation significative entre les entreprises, d'autant plus que la majorité des produits ne sont pas des médicaments remboursés.

La volonté - et surtout la capacité - des consommateurs à payer pour ces produits joue donc un rôle essentiel. Or, au cours de l'année écoulée, les marchés ont été confrontés à un environnement difficile et volatil, marqué par une forte inflation dans de nombreux pays, dont les Etats-Unis. Dans ce contexte, les consommateurs - et les investisseurs - restent incertains quant à l'évolution de l'économie en 2025.

L'industrie du soin souffre-t-elle d'un manque d'innovation, d'une absence de nouvelles molécules ou de produits réellement révolutionnaires?

Nous ne pensons pas qu'il y ait un manque d'innovation. Prenons l'exemple de Galderma qui vient d'obtenir l'autorisation de mise sur le marché de deux nouveaux produits innovants, actuellement en cours de lancement.

«A ce jour, l'impact des droits de douane américains reste modéré.»

Le premier, Relfydess, est un neuromodulateur innovant, facile à utiliser, destiné à améliorer temporairement l'apparence des rides du visage. Il est actuellement déployé en Europe et une nouvelle demande devrait être déposée cette année aux Etats-Unis, où le produit a initialement reçu une lettre de réponse complète de la part des autorités réglementaires.
Le second, Nemluvio, est un anticorps thérapeutique approuvé à la fois en Europe et aux Etats-Unis, et désormais commercialisé pour deux indications: la dermatite atopique (eczéma) et le prurigo nodulaire (lésions cutanées dures et prurigineuses).

Nous pensons que ces deux produits ont le potentiel d'un blockbuster (ventes annuelles supérieures à 1 milliard de dollars) - et dans le cas du Nemluvio, ce potentiel existe dans les deux indications.

Dans le climat actuel de tensions commerciales, êtes-vous préoccupé par l'impact des développements géopolitiques?

A ce jour, l'impact des droits de douane américains reste modéré. Le groupe approvisionne le marché américain en Cetaphil à partir de ses sites de production au Canada, qui sont soumis à des droits de douane, mais qui, à notre avis, ont un impact limité sur les chiffres de Galderma.

En ce qui concerne le reste des activités de Galderma, nous sommes relativement sereins quant à la situation concurrentielle pour le moment: aucun des concurrents directs de Galderma dans les segments des neuromodulateurs, des produits de comblement dermique ou des biostimulateurs ne fabrique aux Etats-Unis. Si Galderma devait être affectée par de nouveaux droits de douane, ses concurrents le seraient également.

La baisse actuelle du cours de l'action Galderma représente-t-elle une opportunité d'investir dans la société?

En l'absence de concurrents réellement directs, nous continuons à croire fortement en Galderma. Nous pensons que la société continue à lancer des produits innovants et nous nous attendons à ce qu'elle réussisse. Nous pensons que la direction est pleinement engagée dans la réalisation de ses objectifs à moyen terme et nous considérons Galderma comme une valeur sûre.

Cela étant dit, Galderma ne correspond pas au profil d'une société pharmaceutique défensive classique, ce qui implique une plus grande volatilité pour les actions de Galderma. Comme indiqué précédemment, l'année 2025 sera marquée par le lancement de nouveaux produits, dont l'impact sur les résultats mettra un certain temps à se matérialiser. De plus, le consommateur américain reste affecté par un contexte économique incertain, ce qui pourrait conduire à une certaine retenue, notamment dans les segments des produits de comblement dermique et des biostimulateurs.

Enfin, un grand nombre de participations privées datant de la période précédant l'introduction en bourse sont encore susceptibles d'être mises sur le marché. Cela pourrait entraîner une surabondance temporaire d'actions en circulation. Les investisseurs doivent être conscients de tous ces facteurs avant de prendre une éventuelle position sur le titre.

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