SFI: se mesurer à Harvard, au MIT ou à Stanford

Yves Hulmann

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Le Swiss Finance Institute est en tête du classement W.P. Carey. François Degeorge, son directeur, explique les raisons de ce succès.

Le Swiss Finance Institute (SFI) occupe désormais la première place du classement W.P. Carey de l'Arizona State University, devançant même des instituts très respectés comme la Harvard Business School ou la London School of Economics. Le classement W.P. Carey de l'Arizona State University mesure le nombre de publications académiques qui paraissent dans des magazines universitaires de renommée internationale au cours d'une année. Dans le classement actuel, le SFI occupe la première place, ce qui signifie qu'il a publié le plus grand nombre d'articles en matière de recherche financière dans les trois plus importantes publications scientifiques mondiales. Que signifie cette position dans le classement? Entretien avec François Degeorge, directeur général du Swiss Finance Institute (SFI).

Le Swiss Finance Institute (SFI) occupe désormais la première place dans le classement W.P. Carey de l’Arizona State University. Avez-vous été surpris par ce résultat et que représente-t-il pour un institut comme le SFI?

Le fait d’être placé au même niveau que des instituts comme la Harvard Business School, le MIT ou Stanford est évidemment une grande satisfaction pour le SFI. C’est d’autant plus important que ce classement existe déjà depuis environ une trentaine d’années. A la question de savoir si nous avons été surpris par ce résultat, ce n’est pas le cas. Il a déjà été possible d’observer la progression de notre institut dans ce classement sur la durée. C’est aussi une reconnaissance de l’ensemble des travaux réalisés par les différentes facultés membres du SFI qui sont issues de six universités partenaires de l’institut. Enfin, pour les banques suisses et la SIX qui ont soutenu la création du SFI, c’est aussi une reconnaissance de leur investissement et une grande source de satisfaction.

Il existe depuis longtemps un débat pour savoir s’il vaut mieux
organiser la recherche de manière centralisée ou décentralisée.
En fonction de cette place obtenue dans le classement, le SFI va-t-il davantage mettre l’accent sur certains thèmes de recherches à l’avenir?

Il existe depuis longtemps un débat pour savoir s’il vaut mieux organiser la recherche de manière centralisée ou décentralisée. L’expérience a montré que les programmes centralisés ne sont, en général, pas le meilleur moyen d’atteindre de bons résultats de recherche sur la durée. Il existe bien sûr des exceptions à cette règle. Néanmoins, à mon avis, mieux vaut engager des talents dans le domaine de la recherche, leur fournir des moyens, puis les laisser suivre leur propre chemin. Au fil des années, le SFI s’est naturellement profilé dans certains domaines de spécialisation tels que la finance durable, les questions liées à la gouvernance, la gestion d’actifs, les liens entre technologie et finance ou encore entre intelligence artificielle et finance. Mais cela n’a pas été dicté par une quelconque stratégie initiale venue d’en haut. Les développements réalisés autour de ces quelques thèmes ont eu lieu en raison de la grande proximité entre recherche et pratique au sein du SFI, où chercheurs et privés interagissent constamment

A quoi servent les recherches souvent très spécifiques en finance réalisées dans le cadre d’un institut comme le SFI?

Une partie des travaux coordonnés au sein du SFI se concentrent sur des thématiques très pointues qui intéressent un cercle relativement restreint de chercheurs. Grâce à ces échanges, ces chercheurs se situent à la pointe de la recherche. A notre tour, nous mettons cet état de l’art à disposition du secteur financier, d’une manière accessible aux non-spécialistes, par le biais ce que l’on appelle le «knowledge exchange».

Le secteur financier est-il réceptif à ces travaux?

Oui, il y a une grande réceptivité. D’ailleurs, nos «master classes» rencontrent énormément de succès. On doit souvent limiter le nombre de participants pour assurer une véritable qualité des échanges.

 Environ la moitié des doctorants poursuivent leur carrière dans
le monde académique et l’autre moitié dans l’industrie financière.
Grâce à la première place obtenue dans le classement de l’Arizona State University’s W.P. Carey, le SFI pourra-t-il bénéficier de moyens supplémentaires à l’avenir?

L’un des grands bénéfices de telles distinctions est aussi l’effet de «halo» que cela apporte à une institution. Cela l’aide à être plus connue, à être davantage citée par ses pairs. C’est aussi un effet de marque. Pour les universités membres du SFI, faire partie d’un tel réseau les aide à obtenir davantage de visibilité. C’est un aspect particulièrement important pour les universités en Europe où la recherche est souvent très fragmentée. Par exemple, le fait que des Universités comme celles de Zurich et Saint-Gall, par exemple, soient des entités totalement distinctes peut être difficile à comprendre pour des chercheurs chinois.

Un jeune chercheur qui veut faire carrière a-t-il d’aussi bonnes perspectives en Suisse qu’au Royaume-Uni ou aux Etats-Unis?

Beaucoup d’initiatives ont été prises ces dernières années pour davantage mettre en réseau les universités suisses, c’est un aspect important. Au SFI, nous organisons des cours pour des doctorants de pointe qui ne pourraient pas être organisés séparément par une seule université. Ce type de programmes fournit d’excellents résultats. Cela se voit notamment au travers des placements des doctorantes et doctorants suisses dans des instituts prestigieux comme l’Université du Michigan. Ils sont aussi engagés par des banques centrales, par des institutions internationales comme la BRI et bien sûr par des banques ou institutions financières. Environ la moitié des doctorants poursuivent leur carrière dans le monde académique et l’autre moitié dans l’industrie financière ou dans des organisations.

Y a-t-il aujourd’hui une plus grande fluidité entre les mondes de la recherche et de l’industrie financière qu’auparavant?

Oui, je pense qu’il existe actuellement une plus grande perméabilité entre ces deux mondes qu’il y a quelques décennies. Nous voyons aujourd’hui des doctorants qui vont travailler quelques années dans des banques, puis qui reviennent ensuite dans le monde académique un peu plus tard tout en gardant quelques activités de conseil pour des entreprises.

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