Nouvelle psychologie de marché

Salima Barragan

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Paul Jackson d’Invesco: «je m’attends à la fin du règne du dollar».

Des classes d’actifs simultanément à la baisse, une inflation vertigineuse alors que les économies se remettaient à peine d’une pandémie, une guerre déconcertante en Europe: 2022 a été difficile, mais aussi surprenante. Des points d'interrogation subsistent à l’heure des prévisions pour le nouvel an: quels défis occuperont les marchés financiers? Comment la conjoncture et le renchérissement évolueront-ils? De quelles façons les experts positionnent-ils les portefeuilles pour les mois à venir? Autour de 5 questions clés, l’équipe d’Allnews vous souhaite une heureuse année 2023.

Pour clore cette série de perspectives, le responsable de l’allocation d’actifs chez Invesco Paul Jackson, estime que le dollar américain qui a atteint son pic en octobre 2022 va s’affaiblir cette année. L’orientation baissière du billet vert favorisera l’or, les marchés émergents et leurs devises locales, ainsi que les grands groupes américains exportateurs.

Quelle leçon retenez-vous de 2022?

Bien peu d’experts ont pu prédire qu’une inflation galopante deviendrait le moteur du marché. Hélas, elle restera présente en 2023.

Les marchés sont en train de transitionner d’une psychologie de contraction vers une psychologie de relance économique, même s’il n’y aura pas de reprise à proprement parler dans les six mois à venir.
Sommes-nous rentrés dans un nouveau régime d’inflation?

Pas forcément, mais son évolution va déterminer la performance des classes d’actifs. Je m’attends à ce que l’inflation redescende rapidement, après avoir touché son pic en juin aux États-Unis et en octobre dans la zone euro en raison des prix sur les matières premières qui ont reculé, mais aussi des politiques monétaires et de la résorption des blocages dans la chaine logistique et de l’approvisionnement des semi-conducteurs. Cela dit, les banques centrales n’atteindront pas leur objectif de 2% cette année. Ni en 2024.

Quand pensez-vous que le pivot de la Fed aura-t-il lieu et comment l’anticipez-vous?

Je suis du même avis que les marchés: le pic des taux devrait se produire vers mai ou juin. D’ici là, je m’attends à ce que la Fed devienne moins agressive. En revanche, il n’y aura pas de baisse des taux avant la fin de cette année ou le début de 2024.

Quelles sont vos perspectives pour 2023 et comment les marchés réagiront-ils?

Je m’attends à une récession en Europe avec une continuation de la décélération mondiale. La banque d’Angleterre a annoncé une récession sur l’intégralité de l’année. Les risques demeurent élevés en Europe en raison du prix du gaz qui diminue les revenus réels des ménages et des conséquences des sanctions imposées sur la Russie. Cependant, la probabilité d’une dépression aux États-Unis est loin d’être nulle. L’Asie se trouve dans une position différente, car la Chine a déjà passé son cycle de récession lors du premier semestre 2022, et sa situation va s’améliorer grâce à l’assouplissement de la politique autour du Covid. Il y aura ainsi plus de flexibilité et de croissance en Chine ainsi que sur les économies asiatiques capables de se décrocher de la décélération occidentale.

Dans ce contexte, les classes d’actifs cycliques surperforment les défensives ainsi que la dette souveraine, parce que les marchés ont déjà intégré le la fait que Fed cessera d’augmenter les taux à la fin de la première partie de l'année. Les marchés sont en train de transitionner d’une psychologie de contraction vers une psychologie de relance économique, même s’il n’y aura pas de reprise à proprement parler dans les six mois à venir.

Comment positionnez-vous les portefeuilles pour les mois à venir?

Les retours sur investissement des actions et de l’immobilier seront plus élevés que ceux sur la dette souveraine, que je viens d’arbitrer contre des obligations à haut rendement qui évoluent bien lors des cycles de reprise économique. J’ai également réduit la liquidité à zéro pour acquérir de l’or qui bénéficiera du repli du billet vert et des taux longs. Je surpondère le crédit Investment Grade et l’immobilier, notamment dans les pays émergents. Les actions sont sous-pondérées et je ne possède plus de matières premières en raison des problèmes actuels sur l’énergie. En termes d’allocation régionale, je poursuis une stratégie barbell de reprise économique avec les marchés émergents d’un côté, et plus défensive avec les États-Unis de l’autre.

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