Le marché dodu de l’obésité

Salima Barragan

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Près de 760 millions de personnes souffrent d’obésité dans le monde. Le point des dernières thérapies avec Jen Nichols de Janus Henderson.

Les chiffres sont démesurés. Près de 760 millions de personnes dans le monde souffrent d’obésité (diagnostiqué par un indice de masse corporelle au-delà de 30). En Europe, 59% des adultes sont en surpoids (IMC supérieur à 25). Afin de soigner l’obésité ou des pathologies induites par du surpoids, Novo Nordisk a lancé le Wegovy et Eli Lilly lancera bientôt le tirzepatide: des traitements injectables à prendre à vie. Ces pharmas se partageront un marché pesant environ 80 milliards de dollars US. Le point avec Jen Nichols, Client Portfolio Manager chez Janus Henderson

Comment les nouvelles thérapies contre l’obésité fonctionnent-elles?

Leur efficacité va changer la donne. Les précédents médicaments entraînaient une perte de poids à un chiffre chez la plupart des personnes. Or, la nouvelle classe de médication pourrait plus que doubler ce pourcentage ; soit un résultat proche de la chirurgie bariatrique. Cette dernière est efficace, mais elle ne reste pas accessible à la plupart des patients et elle entraîne parfois des complications postopératoires. L’opération nécessite aussi souvent une perte de poids initiale en amont.

L'année dernière, la Food and Drug Administration (FDA) aux Etats-Unis a approuvé le Wegovy, une injection hebdomadaire d'une préparation qui imite l'hormone GLP-1, laquelle cible les zones du cerveau signalant le rassasiement. Dans les essais cliniques, les patients l’ayant reçu ont perdu en moyenne 15 à 16% de leur poids en 68 semaines. Les essais portaient sur des adultes souffrant d'obésité ainsi que sur des adultes ayant un IMC supérieur à 27 accompagné d’un problème de santé lié au poids, tel que l'hypercholestérolémie.

Nous n'en sommes qu'au début de cette nouvelle classe de thérapies basées sur le GLP-1, et il reste encore beaucoup à apprendre sur la perte de poids et son maintien à long terme.
Un nouveau traitement vient d’être récemment approuvé contre le diabète. Pourrait-il aussi soigner l’obésité?

Le tirzepatide (vendu sous la marque Mounjaro) approuvé contre le diabète, va bientôt être approuvé contre l'obésité. Les dernières données du premier essai de phase 3 ont montré que les personnes obèses ou en surpoids soignés au tirzepatide pendant 72 semaines ont perdu en moyenne jusqu'à 22,5% de leur poids (soit une perte de poids de plus de 23 kilos). Le tirzepatide imite deux hormones qui aident à réguler la masse corporelle et la prise alimentaire, et le niveau d'efficacité démontré dans l'essai de phase 3 se rapproche de la perte de poids de certaines procédures bariatriques.

Quelles sont les entreprises à l'origine de ces deux thérapies? D’autres sociétés pourraient-elles leur emboiter le pas?

Eli Lilly est le fabricant de Mounjaro et Novo Nordisk a lancé le Wegovy. Des grandes pharmas ou biotechs, telles qu'Amgen et Pfizer, ainsi que d'autres biotechs de plus petite capitalisation cherchent à pénétrer le marché des GLP-1,

Combien coûtent ces traitements?

Wegovy n'a été lancé qu'en Norvège et au Danemark. Wegovy a été lancé à un prix catalogue d'environ 1’300 dollars US par mois aux États-Unis. Mounjaro pour le diabète a été lancé à environ 970 dollars par mois. Il est moins cher en raison de l'autorisation de mise sur le marché pour le diabète. Étant donné qu'il existe de nombreuses similitudes et que les indications se chevauchent, nous nous attendons à ce que ces prix convergent avec le temps.

Quelle est la taille du marché de ces nouvelles thérapies?

Le groupe pharmaceutique Pfizer estime que le marché atteindra 90 milliards de dollars d'ici la fin de 2030. Nos propres estimations projettent le marché des deux seuls médicaments injectables à 70 milliards de dollars. Les GLP-1 oraux peuvent élargir le marché, ce qui est particulièrement intéressant en dehors des États-Unis.

La pilule magique pour perdre du poids existera-t-elle un jour?

De nombreuses recherches sont menées dans le domaine de l'endocrinologie. Nous n'en sommes qu'au début de cette nouvelle classe de thérapies basées sur le GLP-1, et il reste encore beaucoup à apprendre sur la perte de poids et son maintien à long terme. Certains patients refuseront les thérapies injectables, de sorte que des progrès dans les différentes méthodes d'administration des médicaments - oraux en particulier - sont probables. En outre, ces thérapies actuelles doivent être prises en continu. En d'autres termes, si un patient arrête de prendre ces médicaments, il est probable qu'il reprenne au moins une partie de son poids. Nous n'avons pas encore vraiment compris quels sont les effets à long terme de ces médicaments.

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