La Fed redore son blason en s’attaquant à l’inflation

Anne Barrat

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Le regain de crédibilité de la Fed soutiendra une croissance nominale supérieure au consensus de 5% estime Michael Contopoulos, de Richard Bernstein Advisors.

«2022: retour vers le futur», ou comment les marchés pourraient revenir à un environnement des années 1960/1970, était au cœur des prévisions des économistes d’iM Global Partner réunis en décembre dernier. Ce réseau de gestionnaires d’actifs fondé en 2013 par Philippe Couvrecelle et présent en Europe et aux Etats-Unis compte parmi ses membres, depuis juillet 2021, le new-yorkais Richard Bernstein Advisors (RBA). Pour le directeur du Fixed income et membre du comité d'investissement de RBA, c’est à l’aune du revirement de la Fed vis-à-vis de l’inflation qu’il faut se projeter dans 2022. Le point avec Michael Contopoulos.

«Les marchés savent comment gérer une Fed qui se montre moins accommodante et réduit ses injections de liquidités.»
L’évolution de la position de la Fed, qui ne considère plus l’inflation comme temporaire après des mois de discours contraire, vous a-t-elle surpris?

Elle nous a surtout rassuré. La Fed a ainsi retrouvé une certaine crédibilité. Son message est clair: quoi qu'il arrive, même si le chômage ne va pas là où ses experts s'attendent à ce qu'il aille, elle va d'abord et avant tout lutter contre l'inflation. Cet engagement réduit grandement l'incertitude, ce qui est exactement ce que veulent les marchés. Car les marchés savent comment gérer une Fed qui se montre moins accommodante et réduit ses injections de liquidités. Ce qu'ils ne savent pas gérer en revanche, c'est une inflation plus élevée qui leur échappe, et pour cause: ils n’ont pas eu à gérer un tel scénario depuis des décennies. Cette stratégie de la Fed, lutter contre l'inflation au prix d’une plus grande rigueur monétaire, donc revenir aux fondamentaux, devrait être favorable aux investissements. C’est un point essentiel à nos yeux.

Qu’est-ce que ce revirement dit de la situation macro-économique américaine?

Il confirme la bonne santé de l’économie américaine. En 2022, la croissance économique sera probablement plus forte que la plupart des gens ne le pensent aux Etats-Unis. De nombreux investisseurs supposent que des derniers reviendront à une croissance nominale du PIB inférieure ou égale aux 5% qu’ils ont affichés pendant la majeure partie des vingt dernières années. Nous pensons au contraire que, sauf véritable récession, un scénario peu probable, ces prévisions sont conservatrices, et leur préférons un niveau de 7 à 8%. 2022 pourrait être une année de retour à une sorte d'économie d'avant 2000, voire d’avant 1980.

«Nous pensons toujours que 2022 sera une année de ralentissement du niveau de la croissance réelle mais pas de la croissance économique nominale.»
Cette annonce vous conduit-elle, ou non, à revoir vos prévisions pour 2022?

Nous pensons toujours que 2022 sera une année de ralentissement du niveau de la croissance réelle mais pas de la croissance économique nominale, qui pourrait même surprendre en bien en 2022. Si rien dans nos travaux de recherche ne laisse actuellement présager une récession des bénéfices des entreprises en 2022, nous nous gardons de tout optimisme, après le point culminant atteint au quatrième trimestre 2021. Il existe des secteurs cycliques du marché des actions qui pourraient continuer à bien performer, au premier semestre 2022 en particulier. Du côté obligataire en revanche, nous sommes plus baissiers, sachant que la Fed devrait augmenter ses taux directeurs et que les taux à 10 ans seront probablement plus élevés que ce que le marché attend actuellement. La Fed nous a largement préparés à cet environnement de taux plus élevés que nous prévoyons sur la base de trois hausses de 25 points de base en 2022.

Quel sera l’impact à court et moyen terme de cette annonce sur le dollar, sa compétitivité et son attractivité versus l'euro et versus le CHF?

Nous n'avons pas d'opinion spécifique par rapport aux autres devises, mais nous pensons qu'en général, le dollar restera probablement dans une fourchette basse. Une combinaison de resserrement des banques centrales mondiales, d'inflation, de baisse de la croissance des bénéfices et d'un déficit commercial constant devrait continuer à exercer des pressions à la baisse sur le dollar.

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