La croissance asiatique résiste

Salima Barragan

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Selon Luke Richdale de J.P. Morgan AM, la croissance relative de l’Asie contre les pays développés reste stable.

Par effet de dominos, les revenus des entreprises asiatiques ont déjà été érodés par la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis. Certes, la croissance asiatique ralentit. En revanche, sa croissance relative vis-à-vis de celle des pays développés reste stable, au moment même où les États-Unis décélèrent. Selon Luke Richdale, Senior Product Specialist chez J.P. Morgan Asset Management , la croissance globale est sous pression, mais les pays asiatiques ne sont pas désavantagés. Entretien.

Sur les marchés asiatiques, comment gérez-vous l’excès de volatilité engendré par la guerre commerciale?

Sur ces marchés, la volatilité est un facteur de la vie! Mais elle perdurera avec la compétition stratégique grandissante entre les États-Unis et la Chine. Nous devons simplement déterminer si elle est rationnelle ou non. A travers une approche de type «bottom-up», nous nous concentrons sur des facteurs connus, qui ne relèvent donc pas de la sphère politique, pour trouver de bonnes opportunités en actions asiatiques.

Les disputes tarifaires ont-elles déjà érodé les profits des entreprises asiatiques?

Oui. Si l’on retourne au milieu de 2018, la guerre commerciale inattendue a pris de cours les marchés, ce qui s’est reflété sur les valorisations. Au même moment, le gouvernement chinois désendettait son économie. Ces facteurs se sont répercutés sur le moral des consommateurs et des entreprises qui ont réduit leur demande de biens et de services. Le résultat est qu’aujourd’hui, les revenus des entreprises stagnent.

Nous ne voyons pas de récession à court terme car les banques centrales
ont encore une grande marge de manœuvre.
La croissance asiatique est donc affectée…

Oui, elle est affectée. Mais en revanche, sa croissance relative à celle des pays développés - un excellent indicateur des flux commerciaux - est restée stable. C’est la croissance globale qui est sous pression. Les pays asiatiques ne sont pas spécialement désavantagés.

Dans votre scénario, vous attendez-vous à une croissance plus modérée?

Si les banques centrales rallongent le cycle économique, il est naturel de tabler sur une croissance plus modérée. En 2016, les pays asiatiques ont repris leur souffle et sont en meilleure posture pour une fin de cycle. Mais dans le cas d’une récession, ces marchés tomberont également avec les autres. Cela dit, nous ne voyons pas de récession à court terme car les banques centrales ont encore une grande marge de manœuvre. Les autorités chinoises ont stimulé l’économie avec des mesures significatives…mais elles ont conservé des capacités encore plus importantes à déployer au moment d’éviter une récession.

Pour quelles raisons pensez-vous que le potentiel haussier du dollar, un facteur de sous-performance sur les marchés émergents, est limité?

En ajustant (avec l’inflation) le taux de change du dollar contre les devises de ses principaux partenaires commerciaux, nous sommes à un niveau similaire à celui des années 2000-2001. Le dollar est donc déjà surévalué. La croissance relative est également un excellent indicateur de la force du dollar, et aujourd’hui, les États-Unis décélèrent. Aussi, la théorie du dollar «smile», de la forme d’un sourire, valide notre opinion. En haut à gauche, le dollar superforme à cause du risque de récession et en haut à droite, le dollar est fort tout comme l’économie américaine. Aujourd’hui, nous nous situons en bas du sourire, c’est-à-dire que la croissance positive est plus faible et que le dollar devrait être plus bas. Enfin, le différentiel des taux entre les États-Unis et le reste du monde ne va pas croître davantage. Mais encore faut-il regarder ce que fera prochainement la Fed. Le marché escompte pour l’instant deux baisses de taux…mais nous en attendons moins.