La complémentarité des infrastructures cotées et privées

Salima Barragan

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«La combinaison des deux actifs procure un ratio de Sharpe plus élevé», affirme John Creswell chez Duff & Phelps Investment Management.

Installations vieillissantes, transition énergétique, lancement de la 5G, programmes de dépenses gouvernementaux massifs: les arguments en faveur des infrastructures ne manquent pas. D’autant plus que lors d’une résurgence de l’inflation, les actifs réels sont moins affectés par la hausse des coûts de production et les services publics ont la capacité de répercuter le renchérissement des matières premières aux consommateurs. Actions cotées ou fonds privés, l’univers est scindé en deux catégories de placements distincts. Quelle est la meilleure façon d’investir dans la thématique?  La réponse de John Creswell, Executive Managing Director, chez Duff & Phelps Investment Management, une société de gestion partenaire de la banque Vontobel.

Comment définissez-vous l’univers des infrastructures divisé entre les investissements listés d’une part, et privés d’autre part?

L'énergie, les services publics, les transports et les communications sont des activités essentielles au fonctionnement de l'économie. Mais ces biens d'investissement comportent des barrières d’entrée élevées. Administrés avec des contrats à long terme, ils offrent une couverture contre l’inflation. Cotés ou non, ce sont donc des placements défensifs car ils ont la capacité de répercuter les hausses des coûts de production et des matières premières sur les consommateurs.

Comment ces deux classes d’actifs ont-elles évolué?

Leur croissance dans le temps est très corrélée et ils offrent des profils de rendement comparables; ce qui n’est pas étonnant dans la mesure où les actifs sous-jacents sont identiques. Il y a 20 ans, l’argent des investisseurs allait principalement dans les infrastructures listées, mais depuis le marché s’est généralisé et les gérants de fonds privés ont étoffé leur offre. Les deux classes d’actifs ne sont pas en opposition, mais complémentaires.

S’il est vrai que les fonds d’investissement privés perçoivent une prime sur les sociétés, ces placements sont moins volatiles que les valeurs publiques soumises aux aléas des marchés.
Hormis la liquidité des actions cotées, quelles autres complémentarités permettent-elles?

Les actions cotées offrent également une meilleure diversification grâce à la possibilité d’acheter une multitude de compagnies issues de différents secteurs alors qu’un fonds privé se concentre sur quelques noms. Enfin, l’argent investit sur les actions liquides se met au travail plus rapidement et le cashflow est plus prévisible.

Privé ou listé, lequel est le meilleur investissement?

Il est difficile de comparer les deux. S’il est vrai que les fonds d’investissement privés perçoivent une prime sur les sociétés, ces placements sont moins volatiles que les valeurs publiques soumises aux aléas des marchés. Certaines recherches démontrent que la combinaison des deux classes d’actifs – dans la mesure où elle permet de mieux couvrir des zones géographiques, des secteurs et des profils de cashflow différents –, augmente le ratio de Sharpe. Nous obtenons ainsi une meilleure diversification de l’actif sous-jacent.

En plus de leur capacité de répercuter les augmentations des coûts de production, comment les infrastructures cotées offrent-elles une couverture immédiate plus importante contre l’inflation?

Par exemple, lors d’une hausse du prix de l’essence, les chemins de fer deviennent plus avantageux que les camions pour le transport des marchandises. La hausse des prix des matières premières mène les volumes totaux des infrastructures énergétiques qui profitent de leur exposition. De la même façon, les fournisseurs d’énergie européens tirent aussi parti du boom des matières premières. Enfin, les charges aéronautiques des aéroports, qui pèsent pour 40% du total de leur frais, sont indexées à l’inflations tandis que celles sur les ventes au détail augmentent avec le renchérissement des prix.

Vis-à-vis des indices d’actions, comme les infrastructures listées se sont-elles comportées?

Défensives, elles ont surperformé le MSCI World index durant ces 20 dernières années tout en offrant des rendements plus cohérents pour une volatilité moindre. Pour cette raison nous les considérons comme une classe d’actifs «toute saison» qui se comporte bien lors des différentes configurations de marché: elles décrochent moins lors des baisses, évoluent bien dans les marchés latéraux et sont toujours positives lors des rallyes.

Aux Etats-Unis, le poids de la capitalisation boursière des infrastructures listés (de 3 mille milliards de dollars US) dans les indices est plus lourd que dans les autres régions. Comment l’expliquez-vous?

Durant ces deux dernières années, le secteur a considérablement augmenté et les benchmarks comptent aujourd’hui davantage de sociétés. Mais cette exposition importante ne reflète pas la réalité du secteur, car une grande partie de ces groupes américains déploient leurs activités aux quatre coins du globe, avec une part importante dans les marchés émergents en croissance. Leurs revenus sont plus globaux que ne le suggère leur poids dans les indices.