Il n’y aura pas de récession

Emmanuel Garessus

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Pierre Leconte se concentre, à raison en 2022, sur la saisonnalité des marchés. Il se dit haussier au premier semestre.

Le conseiller financier Pierre Leconte, réputé pour son blog Forum Monétaire de Genève, fait sans doute partie des personnes qui avaient le plus correctement géré l’année boursière et monétaire 2022. Il répond aux questions d’Allnews sur son scénario pour 2023.

Quel a été l’élément qui vous a amené à prévoir une baisse en début d’année et une hausse cet hiver?

Pierre Leconte. Le facteur de saisonnalité des indices boursiers a été déterminant. La tendance des marchés lors de l’année des élections de mi-mandat présidentiel (Midterms) se traduit habituellement par une baisse en début d’année jusqu’en septembre puis par un rebond. Cette trajectoire, calculée par Seasonax, un site spécialisé dans la recherche des cycles financiers, suppose de détenir des options de vente (put) sur les indices en début d’année et dès octobre d’accumuler des options d’achat (call) en vue du rallye de fin d’année.

«Le problème de l’inflation est loin d’être résolu. Le rythme de hausse des taux devrait être ralenti, mais le sommet ne surviendra pas avant 5,5 à 6%.»

Le 14 décembre, avant la réunion de la Fed, je propose de prendre tous les bénéfices pour finir l’année sans exposition aux marchés. Rien n’indique que la Réserve fédérale augmente ses taux de 0,5% sachant par exemple que les salaires augmentent significativement. Le problème de l’inflation est loin d’être résolu. Le rythme de hausse des taux devrait être ralenti, mais le sommet ne surviendra pas avant 5,5 à 6%. Un tel environnement est très mauvais pour les obligations.

Pourquoi ne pas acheter des obligations?

Les obligations sont des créances le plus souvent sur des Etats en quasi faillite alors que les actions sont des créances sur des sociétés susceptibles de faire des bénéfices. En 2022, les actions et les obligations ont baissé durant le premier semestre, avant que les premières rebondissent, mais pas les secondes. L’inflation est loin d’être maîtrisée. C’est un phénomène qui va durer parce qu’elle est due à des années de politique monétaire laxiste.La hausse du pétrole et la guerre en Ukraine n’ont rien arrangé. Un cessez-le-feu en Ukraine ne va donc pas tout changer.

Quel a été l’actif le plus difficile à anticiper en 2022?

Sans doute le dollar. Il n’était pas aisé d’anticiper le moment à partir duquel le billet vert allait se déprécier. Le signal est venu lorsque la barre de 1,05 face à l’euro a été atteinte. Je préfère ne pas être «short» sur le dollar actuellement, mais il faut éviter d’être haussier sur la monnaie américaine en ce moment.

Qu’attendez-vous des marchés en 2023?

La plupart des stratégistes s’attendent à une récession aux Etats-Unis et sont baissiers sur les actions. Je pense qu’au contraire les indices américains sont très haussiers jusqu’au milieu de l’année prochaine et qu’il n’y aura pas de récession. Par la suite, les marchés devraient baisser jusqu’en fin d’année.

En termes de saisonnalité, 2023 sera une année préélectorale aux Etats-Unis. Sur la base des statistiques, le marché devrait monter jusqu’en juillet.

«Les investisseurs confondent la hausse des taux d’intérêt et l’évolution conjoncturelle américaine.»
La baisse de l’épargne, de l’immobilier et la hausse des taux ne vous inquiète-t-elle pas?

Les investisseurs confondent la hausse des taux d’intérêt et l’évolution conjoncturelle américaine. L’indicateur avancé ISM montre que l’économie reste dynamique. Les ventes du commerce de détail lors du «Black Friday» se sont très bien déroulées. Le seul critère négatif concerne l’inversion de la courbe des taux d’intérêt, laquelle finit généralement par une récession.

Que devrait faire le dollar selon les statistiques de saisonnalité?

Il devrait hésiter en début d’année, avec une forte volatilité, avant de baisser fortement à partir de la fin de l’été. Il est possible que l’inflation se réduise dès ce moment-là et que les obligations se reprennent.

Est-ce que l’or en profitera?

L’or et l’argent ont été très décevants cette année. La reprise récente des métaux précieux résulte sans doute de la baisse du dollar mais elle n’est pas soutenue par des achats significatifs des investisseurs.

L’argent profite de meilleures perspectives, mais il n’y a pas de raison de se précipiter immédiatement.

Est-ce que votre approche est très orientée sur le court terme?

Non pas du tout. J’ai été baissier du début de l’année à septembre et je suis haussier depuis trois mois.