Iwan Deplazes, directeur de la gestion d’actifs à la ZKB, avertit des risques liés à l’immobilier et plaide en faveur d’une plus grande diversification.

Il est urgent d’agir si l’on veut éviter que les prestations du 2e pilier continuent de se dégrader à l’avenir. C’est le message délivré par les experts de Swisscanto Prévoyance, filiale de la Banque Cantonale de Zurich (ZKB), qui ont dévoilé jeudi les résultats de la 19e étude sur les caisses de pension. L’an dernier, les institutions de prévoyance n’ont pas échappé aux turbulences des marchés. Ainsi, à fin 2018, le taux de couverture des caisses de pension de droit privé est redescendu à 108,7%, contre 114,4% à fin 2017, alors qu’il s’est dégradé à 79,6% (83,5% en 2017) s’agissant des caisses de droit public à capitalisation partielle. Le taux d’intérêt technique a aussi poursuivi son recul pour se rapprocher du seuil des 2% (1,92% pour les caisses de droit privé; 2,19% pour les caisses de droit public). Quant aux taux de conversion, ils ont diminué sur dix ans de près d’un point de pourcentage pour s’établir en moyenne à 5,7% - et continueront de s’abaisser à 5,5% en 2023. Ce qui serait encore très supérieur au taux de conversion «actuariel correct» estimé à 4,86% par Swisscanto Prévoyance. Pour illustrer l’impact de ces ajustements successifs sur les futures rentes des retraités, l’institut présente l’exemple suivant: une personne gagnant 80’000 francs ayant pris sa retraite à 65 ans en 2010, soumis à un taux de conversion de 6,74%, a perçu une rente de 27’621 francs au début de la décennie. Neuf ans plus tard, quelqu’un ayant le même salaire avec un taux de conversion ramené à 4,86% ne percevrait plus qu’une rente de 19’163 francs, soit une baisse de près de 28% de sa rente du 2e pilier. Comment éviter une future détérioration des rentes? Le point avec Iwan Deplazes, directeur de la gestion d’actifs chez Swisscanto Invest by Zürcher Kantonalbank.
Concernant l’augmentation des cotisations d’épargne, l’étude montre que beaucoup de caisses de pension – soit plus de la moitié d’entre-elles - ont déjà mis en place des mesures dans ce sens au cours des trois dernières années. S’agissant de la durée de la cotisation, il est nécessaire d’allonger la période totale de cotisation, que ce soit en commençant plus tôt à cotiser ou en partant plus tard à la retraite.
Modifier l’âge d’entrée pour les cotisations d’épargne est une mesure qui peut être rapidement mise en place par les caisses de pension. Et de nombreuses caisses le font déjà avant le début prévu par la loi, soit à 25 ans. L’âge du départ à la retraite qui est fixé dans la loi, soit 64 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes, a évidemment une dimension politique plus prononcée. Toutes les autres mesures évoquées – abaisser l’âge d’entrée pour les cotisations d’épargne, augmenter les cotisations d’épargne ou réduire la déduction de coordination -, se laissent mettre en œuvre plus facilement.
permet d’atteindre des rendements plus élevés.»
Les chiffres montrent qu’une plus grande professionnalisation de la gestion permet aussi, en général, d’atteindre des rendements plus élevés. Indépendamment de la taille des avoirs gérés, il est nécessaire que les institutions de prévoyance puissent, d’une part, faire preuve d’une plus grande agilité et qu’elles aient, d’autre part, une meilleure diversification de leurs placements.
L’augmentation de la part allouée aux placements alternatifs observée chez les plus grandes caisses de pension (ndlr: celles disposant de plus de 5 milliards de francs de fortunes gérés), montre qu’il est possible de diversifier davantage l’allocation d’actifs du 2e pilier dans ce domaine.
Bien entendu, maintenir des frais de gestion bas fait aussi partie des objectifs des caisses de pension. Toutefois, si des coûts un peu plus élevés permettent également d’obtenir de meilleurs rendements, cela en vaut la peine. Ces deux aspects doivent être mis en balance de manière professionnelle.
chez beaucoup de caisses de pension.»
La part de l’allocation d’actifs consacrée à l’immobilier a constamment augmenté entre 2008 et 2018 chez les petites caisses de pension (ndlr: avec moins de 500 millions de francs de fortunes gérées) et chez celles de moyenne taille (ndlr: entre 500 millions et 5 milliards), avoisinant 26% en 2018 pour ces deux catégories - comparé à 21,2% en 2018 pour les plus grandes caisses de pension. De plus, on observe aussi que ce sont souvent les institutions de prévoyance issues de secteurs économiques relativement proches de l’immobilier - comme le secteur minier, les biens immobiliers et la construction - qui investissent également le plus dans l’immobilier. Cela représente une concentration des risques. Cela dit, je reconnais tout à fait que l’immobilier a fait ses preuves comme placement pour les caisses de pension durant les vingt dernières années. Actuellement, la part allouée à cette classe d’actifs me paraît élevée chez beaucoup de caisses de pension.
Les obligations gardent bien sûr leur place dans l’allocation d’actifs des caisses de pension. Néanmoins, je pense qu’il est possible de diversifier davantage les placements dans le domaine des emprunts. Notamment en réduisant la part allouée aux emprunts d’Etat de la Confédération au profit d’autres types d’obligations – par exemple dans les emprunts d’entreprises internationales ou dans certaines obligations à haut rendement («high yield»).
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