Centrage sur la banque d’affaires

Salima Barragan

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«Les banques suisses se sont éloignées de leurs origines», estime Michael Baer, CEO de MBaer Merchant Bank.

Arrière-petit-fils du fondateur de la banque privée Julius Baer, Michael Baer ose le pari de se distancier des acteurs universels en lançant en 2018 la MBaer Merchant Bank, une entité exclusivement dédiée aux activités de la banque d’affaires, aux origines de l’industrie bancaire. «Aujourd’hui, la majorité des établissements se sont tournés vers la gestion d’actifs, ce qui a créé une monoculture», déclare-t-il. Entretien.

Pour quelles raisons avez-vous quitté vos fonctions à la banque Julius Baer, créée par vos ancêtres?

C’est au sein de la 3e génération, celle de mon père, que certains désaccords ont divisé la famille. Gouverner et travailler dans le sens de la direction de l’organisation familiale étant devenu difficile, j’ai ainsi pris la décision de me mettre à mon compte et, des années plus tard, j'ai fondé MBaer Merchant Bank, une banque qui s’adresse aux entrepreneurs et qui résoudrait tous leurs besoins sous un unique toit.

Quel est le profil de cette nouvelle entité?  

Dans les années 80-90, les entrepreneurs pouvaient approcher les banques en considérant toutes leurs activités, commerciales et privées. Depuis ces 20 dernières années, chaque activité a été segmentée, ne laissant plus aucune liberté d’empiéter sur les autres départements. Le terme de banque d’affaires – une organisation qui aide les individus à faire de l’argent – a toujours existé, depuis le début de l’industrie bancaire. Mais c’est une activité fondamentalement différente des banques en fin de cycle de la création de valeur qui s’occupent de gérer les avoirs de leur clientèle. Petits et agiles, nous offrons des solutions aux entrepreneurs, à leurs entreprises et à leurs familles.

«Aujourd’hui, la majorité des banques se sont tournées vers la gestion d’actifs, ce qui a créé une monoculture.»
Quels services leur proposez-vous et comment vous organisez-vous pour couvrir toutes leurs demandes?

Nous les aidons à gérer leur fonds de roulement, à effectuer leurs paiements internationaux, mais aussi à gérer leurs avoirs et offrons des services de conseil. Nous collaborons avec 40 autres établissements pour les hypothèques, les changes de devises ainsi que pour l’émission de lettres de crédit.

Collaborez-vous également avec Julius Baer?

Oui, absolument et nos relations sont amicales.

Pour quelles raisons êtes-vous devenu membre de l’Association Suisse des banquiers, début octobre?

Outre le fait que cette institution a beaucoup de sens en Suisse, elle offre des cours, des mises à niveau sur les changements réglementaires ainsi que des ateliers qui permettent à ses membres de rester à jour sur des thématiques liées à la profession.

«Je n’ai jamais vu aucune fusion en Suisse couronnée de succès.»
Quel est votre regard sur l’industrie bancaire suisse qui ne cesse de se concentrer?

Les banques suisses se sont éloignées de leurs origines. Aujourd’hui, la majorité des banques se sont tournées vers la gestion d’actifs, ce qui a créé une monoculture. La gestion d’actifs en Suisse est également devenue très chère, forçant les gestionnaires à majorer les tarifs d’un modèle d’affaires standardisé dans lequel il est difficile d’apporter de la valeur ajoutée. Les banques privées qui opèrent dans le même créneau et qui deviennent très chères, vont devoir se consolider. Cela s'explique également par le fait que de nombreuses banques suisses s'appuient sur une infrastructure informatique obsolète. Aux Etats-Unis, l’industrie s’est spécialisée dans certains piliers devenant ainsi plus efficiente et surtout meilleur marché.

Comment voyez-vous l’avenir de MBaer Merchant Bank?

Différents des structures des banques universelles, nous nous voyons combler le fossé entre ce qu’elles offrent, et ce que nous faisons. Nous connaissons actuellement une croissance exponentielle et sommes heureux de relever les défis qui en découlent, tels que le manque d'espace et le recrutement de personnel.

Pourriez-vous imaginer un rapprochement avec un autre établissement?

Je n’ai jamais vu aucune fusion en Suisse couronnée de succès, même si sur le papier l’idée semble bonne.