Capitaliser sur l’intelligence collective

Salima Barragan

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«Nous investissons sur les convictions communes les plus fortes d’un panel de stock-pickers», explique Dimitri Boismare de VENN Capital.

Les informations publiques divulguées par les gérants d’actifs fondamentaux sont une précieuse mine d’informations. VENN Capital a développé plusieurs stratégies systématiques qui visent à extraire ces données, dont deux font l’objet d’une réplication au sein de fonds indiciels lancés en partenariat avec Federal Finance Gestion, une société affiliée à Arkéa Investment Services. «Si une thèse d’investissement est validée par plusieurs experts indépendants, cela permet de cumuler les signaux d’achats tout en gommant les biais et la subjectivité», explique un des co-fondateurs Dimitri Boismare. Entretien.

Comment utilisez-vous les données publiques publiées par les gérants d’actifs fondamentaux pour conduire vos stratégies?

Nous considérons que les données règlementaires dévoilées par les gérants d’actifs fondamentaux sont une précieuse mine d’informations. L’idée sous-jacente est très simple: si une thèse d’investissement est validée par plusieurs experts indépendants, cela permet de cumuler les signaux d’achats tout en gommant les biais et la subjectivité. Nous avons ainsi développé une approche qui vise à capitaliser sur ces données et sur l’intelligence collective de ces experts, en combinant leurs plus fortes convictions communes. Nous sélectionnons ces valeurs de façon systématique à l’aide d’un algorithme propriétaire.

Comment déterminez-vous le panel de gérants, la clé de voûte de votre stratégie d’extraction d’alpha «collectif»?

Cette étape critique nécessite que plusieurs prérequis soient validés. D’une part, l’intégralité du panel doit être composée de gérants fondamentaux, qui s’intéressent d’abord à l’entreprise derrière l’action cotée.  Ils investissent dans le temps long (la rotation de leur portefeuille est faible), avec conviction (les inventaires sont concentrés) et discipline (en recherchant une décote entre la valeur intrinsèque estimée et le prix de marché). Ces investisseurs sont généralement très singuliers et gèrent ainsi des portefeuilles très éloignés des grands indices de marchés.

Les gestions active et passive sont systématiquement renvoyées dos à dos, alors qu’elles portent finalement des avantages différents.

D’autre part, pour que l’intelligence collective fonctionne, il faut que ces experts raisonnent de façon indépendante les uns des autres. Dans le cas contraire, il y aurait un risque de conformisme. Nous nous attachons donc à avoir un panel suffisamment large et diversifié en termes de style – valeur, blend, croissance – et d’approche d’investissement, ce qui rend les idées validées collégialement puissantes et attractives.

Quels types de stratégies bénéficient-elles plus particulièrement de cette méthode?

Cette approche est applicable à l’ensemble de l’univers d’actions si le panel représentatif de la stratégie voulue est assez large et diversifié. À l’heure actuelle, nous avons développé deux stratégies de grandes capitalisations en Europe et aux États-Unis qui font l’objet de réplications au sein de fonds gérés par Fédéral Finance Gestion, ainsi qu’une stratégie sur les petites et moyennes sociétés américaines pour laquelle nous recherchons en ce moment un partenaire. Le champ des possibles demeure ainsi très vaste et nous réfléchissons déjà à d’autres pistes d’expansion telles que les petites et moyennes capitalisations européennes, mais également des stratégies thématiques. Par ailleurs, nous pouvons décliner cette approche sur des produits plus patrimoniaux en permettant aux investisseurs de s’exposer à la capacité de génération d’alpha de nos stratégies tout en couvrant l’exposition au bêta de marché. Ces montages dits de portage d’alpha nous paraissent adaptés dans un contexte de remontée des taux où les profils classiques «60/40» pourraient d'avérer décevants.

Comment le concept d’intelligence collective complémente-t-il la gestion passive?

Au cours de ma carrière, j’ai constaté que les gestions active et passive sont systématiquement renvoyées dos à dos, alors qu’elles portent finalement des avantages différents. Nos stratégies sont intrinsèquement différenciantes, car elles essaient de capter le meilleur de ces deux mondes, c’est-à-dire la recherche de création d’alpha de la gestion active à travers un stock-picking de conviction d’une part ; la diversification, l’absence de biais et la maîtrise des frais de la gestion passive d’autre part.

Pour quelles raisons avez-vous noué un partenariat avec Federal Finance Gestion, société de gestion affiliée à Arkéa Investment Services, pour le lancement de deux fonds indiciels?

Arkéa IS détient une expertise historique dans la co-construction d’offres sur mesure mettant en avant l’innovation. Ces stratégies basées sur l’intelligence collective sont en effet la seule proposition de ce type en Europe à notre connaissance! Cela a permis de structurer une offre innovante dans un cadre confortable et sécurisant pour les investisseurs et les fonds ont ainsi collecté près de 100 millions d’euros sur leurs deux premières années d’existence.

Quelles sont vos ambitions sur le marché suisse?

Nous pensons que nos stratégies répondent au besoin d’une clientèle aussi bien patrimoniale qu’institutionnelle. Nous souhaitons ainsi, dans un premier temps, les présenter aux investisseurs qualifiés professionnels. Si l’appétit se vérifie, nous envisagerons d’élargir le développement à des clients non professionnels. Nous réfléchissons à la mise en place de partenariats sur cet aspect également.