L’immobilier toujours refuge?

François Mollat du Jourdin, MJ&Cie

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Les villes européennes bénéficient de la montée en puissance de nouveaux investisseurs; les «family offices».

L’année 2019 a montré une dynamique forte sur les actifs immobiliers «prime» dans les métropoles internationales (excepté Londres qui a connu une légère décrue de 2.5%). Pour 2020, les pronostics demeuraient confiants jusqu’au déclenchement de la crise sanitaire. Mais selon de nombreux professionnels, l’immobilier devrait tenir bon, porté par l’environnement de taux bas, la recherche de rendement et la présence de plus en plus marquée de nouveaux investisseurs privés qui tendent à modifier la physionomie du marché.

Les «family offices», portés par la création de richesse (le nombre de particuliers très fortunés a progressé de 6% en 2019), s’arrogent désormais une place non négligeable et viennent impacter l’évolution du marché. On constate ainsi que les actifs liés aux nouveaux modes de vie (résidences collectives, seniors) et au bien-être privé ou professionnel font l’objet d’un appétit croissant de leur part. Il en va de même pour la recherche d’impact social et environnemental, qui est maintenant largement intégrée par ces grands investisseurs. Ce sont donc des thématiques entières qui se voient revisitées.

Cette professionnalisation laisse cependant peu de place aux petits acteurs, et dans un marché en quête désespérée de rendement, les véritables opportunités sont rares. C’est dans ce contexte qu’un certain nombre de villes ont gagné les faveurs des grands détenteurs de capitaux privés. New York, Londres et Paris forment, une fois de plus, le tiercé gagnant des métropoles mondiales. Mais la quête de meilleures conditions de vie permet aussi l’émergence de villes européennes de taille moyenne comme Zurich, Oslo, Helsinki, Vienne, Madrid ou Amsterdam, ainsi que celle de lieux de villégiature, notamment dans les Alpes et sur la Côte d’Azur. L’Europe demeure donc une terre d’investissement très prisée par ces acteurs qui y dirigent des flux de capitaux significatifs.

Pour 2020, la crise devrait renforcer la prudence des investisseurs,
ce qui continuera de jouer en faveur des actifs aux fondamentaux solides.

En matière de perspectives d’évolution, et jusqu’au déclenchement de la crise sanitaire, Paris semblait conserver un véritable attrait. En effet, même si 2019 a permis de franchir un nouveau record dans l’immobilier d’entreprise (35 milliards d’euros contre 30.4 milliards en 2018) et si le résidentiel a encore connu une hausse de plus de 6%, le potentiel de la capitale française restait important; notamment porté par des projets d’infrastructure gigantesques comme celui du Grand Paris (100 milliards d’euros d’infrastructures nouvelles) qui vise à transformer l’agglomération parisienne en une métropole du XXIe siècle ainsi que par les Jeux olympiques de 2024.

Dans l’Hexagone, l’Île-de-France a conforté sa première place en 2019: toutes opérations confondues, 26,6 milliards d’euros y ont été investis, soit 75% de l’activité en France et un montant record. Ce volume a principalement été investi en bureaux (83%), devant les commerces et les locaux industriels.

Les investisseurs asiatiques ont réalisé cinq des huit transactions de plus de 100 millions d’euros, dont deux supérieures à 500 millions d’euros. Après avoir animé le marché londonien en 2018, les Sud-Coréens ont été à l’origine de quelques-unes des plus grandes transactions, et devancent les Allemands et les Britanniques.

Cet effet méga-deals a également joué en région: avec 2,1 milliards d’euros engagés, la région-Rhône Alpes a largement battu son record grâce à l’appétit croissant d’investisseurs français et étrangers. Ce changement d’échelle du marché en Rhône-Alpes est à l’image de celui du marché locatif, puisque 2019 a également été une année record en matière de demande de bureaux à Lyon.

Pour 2020, la crise devrait renforcer la prudence des investisseurs, ce qui continuera de jouer en faveur des actifs aux fondamentaux solides. Cependant, la raréfaction des produits «prime» et la compression des taux de rendement favoriseront également les actifs de diversification.

Les professionnels demeurent, à ce stade, relativement confiants, estimant que le résidentiel devrait très bien résister. Les bureaux devraient également démontrer une bonne résilience, pour le «prime» au moins. L’incertitude est en revanche beaucoup plus forte sur le commercial. Néanmoins, l’immobilier devrait, plus que jamais, continuer à bénéficier de son statut refuge, d’actif réel et de rendement!

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