Wirecard: un quart du bilan non certifiable, le titre plonge

AWP

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Le prestataire de paiements allemand reporte la publication de ses résultats pour la quatrième fois depuis mars, sur fond de fraude supposée.

Le prestataire de paiements allemand Wirecard ne cesse de s’enfoncer dans la crise après le nouveau report in extremis jeudi de la publication de son bilan certifié sur fond de fraude supposée de près de 2 milliards.

La direction de la fintech bavaroise avec à sa tête son président fondateur Markus Braun, tous dans le collimateur de la justice, envisage de déposer «une plainte contre X», se disant victime d’une possible malversation de grande envergure.

Mais le temps lui est compté: si la société n’est pas en mesure de présenter un bilan approuvé par ses auditeurs d’ici vendredi, les banques pourraient lui retirer des lignes de crédits pour plus de 2 milliards d’euros, a-t-elle prévenu dans un communiqué.

Les investisseurs ont eux déjà décidé jeudi de sortir les titres Wirecard de leur portefeuille avec, pour effet, un plongeon vertigineux de l’action. Après avoir reculé jusqu’à 71% en séance, le titre a terminé en retrait de 61,8% à 39,90 euros, dans un Dax cédant 0,81%.

Le gestionnaire d’actif DWS, logé au sein de Deutsche Bank, a annoncé qu’il n’avait désormais plus de titres Wirecard dans les fonds sous sa gestion et qu’il étudiait la possibilité de recours juridiques.

Tromperies

La firme d’Aschheim, près de Munich, a dû se résoudre jeudi matin en dernière minute à repousser la publication de son bilan 2019 prévue ce jour, soit le quatrième report depuis mars.

Les commissaires aux comptes d’Ernst & Young ont jusqu’à présent refusé de certifier les comptes de l’année dernière faute de pouvoir établir quelle réalité se trouve derrière la somme de 1,9 milliard d’euros à l’actif de comptes sous séquestre.

Pour expliquer cette somme -qui représente pas moins d’un quart de la taille de son bilan -, Wirecard évoque la possibilité de «tromperies» via des «confirmations de solde incorrectes» qui auraient été présentées aux auditeurs de banques gérant les comptes sous séquestre. Des comptes alimentés d’ordinaire pour garantir les paiements de commerçants et de clients.

Les instituts détenant ces comptes bloqués «sont deux banques asiatiques», précise Wirecard jeudi.

Cours manipulé?

Wirecard fait partie de ces acteurs qui ont profité de la crise du coronavirus : les paiements électroniques ont progressé à cause de la fermeture imposée de nombreux magasins. Les consommateurs ont ainsi davantage acheté en ligne, en se passant de règlements en espèces.

Mais la «success story» de cette firmtech fondée en 1999 et entrée au Dax en septembre 2018, a fait place à une zone de turbulences traversée depuis début 2019, entamée par une série d’articles du Financial Times alléguant des irrégularités comptables dans ses opérations, dont l’épicentre serait en Asie.

La justice allemande a elle engagé des poursuites pénales contre l’ensemble du directoire sur des soupçons de manipulation de cours, après avoir reçu une plainte du régulateur financier Bafin. Une perquisition a été menée début juin au siège du groupe.

A l’origine, le cabinet d’audit KPMG, mandaté pour une expertise sur les comptes des années 2016 à 2018 et qui s’est dit incapable de valider certaines activités de paiement réalisées par des sociétés tierces au nom de Wirecard.

Cette dernière avait pourtant tenté au printemps de présenter l’audit à venir sous un jour favorable. Le Bafin «intègre la situation actuelle dans (son) enquête pour manipulation de marché en cours», a indiqué jeudi une porte-parole à l’AFP.

L’opérateur de la Bourse de Francfort, Deutsche Börse, «examine» de son côté la possibilité d’une sanction qui serait infligée à Wirecard pour présentation hors délai de son bilan financier annuel.

Selon des données préliminaires, que Wirecard a tout de même publiées jeudi, la société a augmenté son volume de transactions l’an dernier de 38,5% à 173 milliards d’euros. Le chiffre d’affaires a augmenté de 37,5% à 2,8 milliards d’euros et le bénéfice net a augmenté de près de 39%, à 482 millions d’euros.

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