Credit Suisse-UBS: vent de fronde au Conseil National sur les garanties pour le rachat

AWP

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Les critiques ont plu dès l’ouverture des débats au National. Le Conseil fédéral en a pris pour son grade. Mais les partis se sont aussi refilé la patate chaude de la responsabilité de la débâcle.

Le Conseil National pourrait bien rejeter mardi les garanties fédérales pour le rachat de Credit Suisse par UBS. La gauche lie son approbation à de strictes conditions, alors que l’UDC refuse les crédits urgents de 109 milliards.

Les critiques ont plu dès l’ouverture des débats au National. Le Conseil fédéral en a pris pour son grade. Mais les partis se sont aussi refilé la patate chaude de la responsabilité de la débâcle.

Risques assumés par les citoyens

La gauche s’en est prise à la droite dans son ensemble, qui a rejeté systématiquement toute proposition de renforcement de la législation. Gerhard Andrey (Vert-e-s/FR) a notamment rappelé la demande de l’ancien ministre des finances UDC, Ueli Maurer, de laisser tranquille Credit Suisse pendant un ou deux ans.

«Ce pays sauve les banques et ses managers et laisse tomber les ouvriers et les ouvrières. Comment espérez-vous que la population suisse puisse encore avoir confiance dans notre système?» a interrogé Cédric Wermuth (PS/AG). Plusieurs orateurs ont souligné l’incohérence à libérer des milliards pour les banques tout en serrant les cordons de la bourse pour les retraites ou les crèches.

Aucune condition n’a par ailleurs été posée pour maintenir les emplois lors du rachat de Credit Suisse par UBS, a ajouté Mattea Meyer (PS/ZH. L’actuelle ministre des finances PLR, Karin Keller-Sutter, a même tenté de qualifier cette reprise d’une affaire entre banques privées. Il s’agit pourtant de nouveau d’un sauvetage étatique, dont les risques sont assumés par les citoyens.

Socialisation des pertes critiquée

Pour le PS, il faut prendre des mesures pour réduire les bonus et augmenter le capital propre des banques. Si de telles mesures ne sont pas garanties, le parti refusera les crédits. «Nous nous élevons contre la socialisation des pertes et la privatisation des bénéfices», a affirmé Laurence Fehlmann Rielle (PS/GE).

Les Vert-e-s lient quant à eux aussi leur feu vert à des critères de durabilité. «Le crash total de Credit Suisse aurait certainement été la pire des solutions. Mais le crash total du climat conduit au pire des avenirs», a insisté Balthasar Glättli (Vert-e-s/ZH).

Des solutions sont urgentes et les deux problématiques sont liées, a-t-il poursuivi. Credit Suisse et UBS ont investi quelque 120 milliards dans l’industrie fossile entre 2016 et 2020. Des critères durables, sociaux et économiques ne sont pas exagérés. «Nous ne sommes pas prêts à signer un chèque en blanc de 109 milliards de francs pour le sauvetage des banques.»

L’UDC a elle rejeté d’entrée de jeu les crédits, et s’est désolidarisée du camp bourgeois. «Dans le sillage du sauvetage d’UBS, nous avons réclamé une solution à la problématique des ‘too big to fail’. Mais l’alliance du PLR et du Centre a fait échouer le projet», a accusé Thomas Aeschi (UDC/ZG). Pour le parti, des banques trop grandes pour faire faillite ne devraient plus exister en Suisse.

Tsunami économique évité

L’action du gouvernement a quand même été saluée par quelques orateurs bourgeois et de droite. Le Conseil fédéral a agi avec fermeté, efficacité et doigté pour éviter un tsunami économique pour la Suisse et le monde, a loué Damien Cottier (PLR/NE), se dédouanant également de toute responsabilité. La crise est due à la culture de la banque, aux managers surpayés qui ont pris des risques inconsidérés. «C’est moralement inacceptable.»

Un point de vue partagé par le Centre. Jean-Paul Gschwind (Centre/JU) a critiqué les graves erreurs de management des dirigeants, ayant un goût du risque démesuré encouragé par des bonus indécents. Seule la reprise de Credit Suisse par UBS a pu rétablir la confiance et la stabilité des marchés.

Son parti, tout comme le PLR et le PVL, est d’accord pour revoir la législation «too big to fail». Mais sans se hâter. Des rapports doivent d’abord être élaborés pour avoir une bonne vue d’ensemble de la situation. Damien Cottier a appelé à ne pas jouer aux apprentis sorciers. A ses yeux, il ne faut pas créer un chaos et une excitation supplémentaires dans des marchés déjà fébriles.

Effondrement mi-mars

Credit Suisse s’est retrouvé dans la tourmente mi-mars, après l’écroulement de la Silicon Valley Bank. Ses titres ont chuté en bourse, menant à son rachat par UBS. La Confédération et la Banque nationale suisse (BNS) ont actionné plusieurs instruments pour encadrer la fusion. La BNS a mis à disposition des deux banques 150 milliards de liquidités qui ne sont pas soumis au Parlement.

L’Etat a lui apporté sa garantie pour un montant de 109 milliards de francs. Un premier crédit de 100 milliards permet de garantir les prêts octroyés par la BNS à Credit Suisse. Le second de 9 milliards est destiné à UBS. Ce sont ces deux enveloppes qui sont discutées.

Les débats se poursuivent.

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