Réflexions estivales sur le temps…

Julien Serbit, Prime Partners

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Thomas Edison nous dit que «le temps et la patience sont les deux principaux ingrédients d’un succès durable». Il va sans dire que cela s’applique à l’investissement.

L’année s’écoule et tant la santé de l’économie américaines que les performances boursières réalisées continuent de surprendre bon nombre d’investisseurs. Alors que certains commencent à regarder l’avenir avec plus d’optimisme, il est bon de rappeler que les bons investissements comme les mauvais ne se mesurent pas toujours suivant l’année calendaire.

Pour les financiers, l’été est souvent vu comme un passage à risque. Les volumes sur les bourses se réduisent et historiquement parlant les mois chauds ne sont pas les meilleurs en termes de performance. Encore faut-il croire que l’histoire se répète pour craindre une déconvenue annoncée durant les vacances. Il convient plutôt de dire que certaines similitudes sont observables à travers le temps, notamment celles qui ont trait au comportement des investisseurs.

À bien y réfléchir le temps est omniprésent quand il s’agit d’investir. Il définit bien sûr les points d’entrée et de sortie des opérateurs sur leurs positions. Il permet ainsi de distinguer les investissements spéculatifs, ancrés dans l’imagination du grand public à travers l’image des traders, de ceux de plus long terme, conservés en portefeuille des années, voir des dizaines d’années et permettant souvent de construire des fortunes pérennes.

Le temps s’invite aussi dans les comparaisons entre professionnels de l’investissement dont les performances sont jugées chaque année entre le 1er janvier et le 31 décembre, ce qui évidemment n’a aucun sens, ni boursier, ni économique.

Enfin et c’est peut-être là la caractéristique principale du temps en investissement, il est certain. Il est finalement le seul élément que l’on connait à l’avance quand il s’agit de mettre de l’argent au travail : le temps va faire son œuvre, portant ou non ses fruits en termes de gains.

Le temps qui défile va forger nos convictions, nous donner l’opportunité de ressentir les émotions liées à nos investissements et il sera finalement le témoin du mélange d’une multitude de facteurs, pour la plupart peu prévisibles, qui aboutiront aux bons comme aux mauvais placements.

Ces quelques réflexions, un brin philosophiques, nous amènent naturellement à mettre en perspective l’année en cours dont plus de la moitié est désormais derrière nous. Nul besoin de revenir sur tout ce que nous savons déjà. La plupart d’entre nous ont été surpris par la résilience de l’économie américaine et par la performance des indices boursiers, notamment celles des grandes valeurs technologiques dopées par les espoirs de retombées massives de l’avènement de l’intelligence artificielle.

Là encore, la notion de temps est prépondérante. La récession tant annoncée tarde à se matérialiser et il convient désormais de dire qu’elle n’arrivera probablement pas cette année. La politique de resserrement monétaire de grande ampleur menée tambour battant par les banquiers centraux ne voit pas complètement ses effets refroidir les économies mais plutôt rafraichir les secteurs les plus industriels. Enfin, les taux d’intérêts actuels, plutôt prohibitifs en comparaison de la longue période précédente d’argent gratuit ne provoquent pas de désastres boursiers et pour cause une bonne moitié des 500 sociétés composant le S&P se sont astucieusement refinancées pour quelques années durant la période de Covid à des taux bien inférieurs à ceux que nous connaissons actuellement. Ici aussi…tout est question de temps.

Même à contre-courant des normes établies, il est toujours intéressant de faire l’exercice d’oublier l’échéance de l’année en cours en investissement. C’est du reste souvent un excellent conseil que de ne pas trop se préoccuper des repères calendaires que l’industrie se fixe.

La période actuelle propose divers éléments qui méritent d’être observés de manière plus lointaine que le dernier jour de l’année 2023 surtout quand il s’agit d’investir à long terme et non à travers le prisme des performances annuelles.

Le ralentissement économique, voir la récession, pressenti pour cette année finira bien sûr par arriver. Si tout le monde ou presque s’accorde désormais à penser que cela ne se matérialisera pas en 2023, quid de 2024 par exemple? Le fameux pivot de la Fed, marquant la fin des mines sévères de nos banquiers centraux en guerre contre l’inflation, viendra lui aussi, soutenant alors des économies probablement entrées dans une période moins porteuse que celle que nous connaissons actuellement, particulièrement dans les secteurs liés aux services.

Enfin, l’emploi américain si robuste jusqu’à aujourd’hui finira naturellement par donner des signes d’essoufflement. Tout cela est aussi certain que le temps qui passe. Toute la difficulté est de savoir quand cela va se produire…À nouveau cette satanée notion de temps…

Thomas Edison nous dit que «le temps et la patience sont les deux principaux ingrédients d’un succès durable». Il va sans dire que cela s’applique à l’investissement et que la période que nous traversons est propice à oublier quelque peu cela. C’est probablement au-delà de vues quelque peu court termistes dont l’échéance serait déjà fixée au 31 décembre 2023 que les meilleures décisions d’investissement doivent se prendre pour les prochains trimestres, qu’il s’agisse d’initier de nouvelles positions, d’en conserver ou de se séparer de certaines.

A cet égard, on ne saurait s’affranchir de quelques principes enfin intemporels. Diversification, bon sens ou encore pleine compréhension de nos investissements pour n’en citer que quelques-uns.

Le temps c’est de l’argent…mais l’argent prend aussi du temps.

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