Les minutes de la Fed: affrontement de deux camps

Felipe Villarroel, TwentyFour

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Le compte-rendu de la réunion de la Fed des 2 et 3 mai, révèle une division croissante entre les membres du FOMC.

© Keystone

Alors que la décision d'augmenter le taux directeur de 25 pb pour atteindre une fourchette de 5,00 à 5,25% a été prise à l'unanimité, le résumé de la réunion indique que les décideurs politiques étaient divisés sur l'ampleur du resserrement de cette mesure, nécessaire à l’avenir le cas échéant. Plusieurs participants ont noté que, si l'économie devait évoluer dans le sens des prévisions actuelles, alors «un nouveau raffermissement de la politique monétaire pourrait ne pas être nécessaire», tandis que d'autres ont indiqué qu'un nouveau raffermissement de la politique monétaire lors des prochaines réunions serait justifié, puisqu'ils s'attendent à ce que les progrès pour ramener l'inflation à 2% «puissent continuer à être inacceptablement lents».

La semaine dernière, le président de la Fed, Jérome Powell, se disait ouvert à un répit lors de la réunion de juin, soulignant qu'après une année de hausses de taux agressives, les autorités pouvaient se permettre d'examiner les données entrantes et l'évolution des perspectives afin de procéder à des évaluations prudentes. Ces commentaires ont été repris par le président de la Fed d'Atlanta, M. Bostic, qui a déclaré qu'il était toujours «enclin» à maintenir les taux d'intérêt lors de la réunion de juin, tandis que la présidente de la Fed de San Francisco, Mary Daly, a également prôné la patience en déclarant que, selon ses données, le resserrement du crédit à la suite des récentes faillites bancaires pourrait être équivalent à «deux ou trois hausses de taux».

La plupart des responsables de la Fed semblent s'accorder sur la nécessité de conserver une certaine marge de manœuvre.

Mais d'autres responsables de banques centrales ont assombri ce tableau. James Bullard, président de la Fed de Saint-Louis et fervent hawkish, a estimé que le comité devrait procéder à deux relèvements supplémentaires cette année pour exercer une pression à la baisse suffisante sur l'inflation, souhaitant que ces relèvements aient lieu «le plus tôt possible». Neel Kashkari, président de la Fed de Minneapolis, vise un taux à plus de 6%, en soulignant que la décision d'augmenter les taux en juin demeure incertaine. Ou encore le Président Logan, de la Fed de Dallas, a déclaré que les arguments en faveur d'une pause n'étaient pas encore évidents.

La plupart des responsables de la Fed semblent toutefois s'accorder sur la nécessité de conserver une certaine marge de manœuvre. Le Comité a largement reconnu que la voie à suivre est "moins certaine" en raison des récentes turbulences dans le secteur bancaire ainsi que des effets décalés des resserrements cumulés. Concernant l'économie, il reste probable que le PIB réel décélère au cours des deux prochains trimestres et qu'une légère récession s'ensuive à partir du quatrième trimestre, avant une reprise modérée. Bien qu'une grande partie des minutes ait été consacrée une fois de plus au suivi de l'impact du resserrement des normes de prêt sur l'activité économique, l'instabilité bancaire semblait moins préoccupante. Les responsables ont noté que les mesures prises par la Fed, en coordination avec d'autres agences gouvernementales, avaient permis de calmer la situation dans ce secteur. De nombreux participants ont également souligné qu'il était essentiel que la limite de la dette soit relevée en temps voulu pour éviter de graves perturbations dans le système financier et l'économie en général.

En définitive, les minutes, en plus de la dernière communication des décideurs politiques, apportent peut-être plus de questions que de réponses pour les acteurs du marché en quête de clarté sur la trajectoire future de la politique monétaire. L'incertitude semble actuellement élevée parmi les membres du Comité. À quelques semaines de la prochaine réunion du FOMC (les 13 et 14 juin prochain), les responsables de la Fed semblent de plus en plus clairement divisés. Il en va de même pour l'importance de garder leurs options ouvertes afin de conserver une certaine flexibilité pour naviguer prudemment dans le paysage économique actuel et de ramener l'inflation à l'objectif à long terme de la Fed, à savoir 2 %. Une chose est sûre cependant: la probabilité d'une pause est plus élevée avec une division entre les colombes et les faucons, par opposition à ce qui a été, jusqu'à présent, un comité majoritairement faucon.

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