Nouveau plaidoyer des banques privées pour un accord avec l’UE

AWP

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«Sans accord, les relations avec l’Union européenne continueront à se dégrader comme une route mal entretenue», indique Yves Mirabaud, président de l’ABPS.

La Suisse doit soigner ses relations avec l’Union européenne, notamment afin d’améliorer l’accès au marché unique pour les banques privées et de gestion. La conclusion d’un accord-cadre avec le grand voisin constitue encore l’un des enjeux politiques principaux pour le secteur bancaire helvétique, partisan de la voie bilatérale.

«Sans accord, les relations avec l’Union européenne continueront à se dégrader comme une route mal entretenue», a imagé Yves Mirabaud, président de l’Association des banques privées suisses (ABPS), faîtière qui a tenu jeudi sa conférence de presse annuelle avec son homologue ABG (banques de gestion).

Les motifs de fâcherie entre la Suisse et l’UE n’ont pas manqué ces dernières années. Côté helvétique, les initiatives populaires sur l’immigration de masse de 2014, sur l’autodétermination de 2018 et sur la limitation de l’immigration (votation en 2020 ou 2021) ont passablement envenimé la situation.

Devant la presse à Berne, Yves Mirabaud a tenu a rappeler que ni l’APBS ni l’ABG ne sont en faveur d’une adhésion à l’Union. Les membres qui composent les deux faîtières sont des «patriotes» pragmatiques.

Principal partenaire commercial de la Suisse, l’Union européenne revêt une importance primordiale pour le domaine de la gestion de fortune. Sur les 2500 milliards de francs d’actifs privés administrés sur territoire helvétique, 1000 milliards appartiennent à des résidents de l’UE, a rappelé M. Mirabaud.

Le banquier genevois, associé-gérant senior du groupe Mirabaud, estime que l’accord cadre, dans sa mouture actuelle, est très avantageux. «Il est (...) normal que l’accord cadre ne soit pas à 100% en faveur de la Suisse, sinon l’UE n’en voudrait pas. S’il atteint déjà 80% des objectifs suisses, comme le dit le Conseil fédéral, c’est une bonne affaire», a-t-il plaidé.

Le Brexit complique tout

Aux difficultés de la négociation s’ajoutent les aléas du calendrier, avec le Brexit. Les membres de l’Union européenne sont étonnamment «compacts» dans leur intransigeance vis-à-vis du Royaume-Uni. A l’avenir, la Suisse ne peut guère espérer mieux, selon Yves Mirabaud.

Le président de l’APBS a rappelé les entraves qui sont imposées aux gestionnaires de fortune qui déploient des activités transfrontalières avec des clients européens. Le démarchage est proscrit, même par téléphone, SMS ou courriel. En revanche, les établissements ayant pignon sur rue dans l’UE peuvent contacter des personnes librement afin de leur proposer leurs services.

Pour les deux associations, le cavalier seul ne pourra conduire qu’à l’échec face au protectionnisme de l’UE. Le risque, en cas d’impasse institutionnelle, c’est de voir les établissements suisses délocaliser, avec des impacts négatifs sur les recettes fiscales et l’emploi domestiques.

Une lente érosion est constatée depuis la crise financière de 2008. Selon les derniers chiffres du Secrétariat d’Etat aux questions financières internationales (SFI), l’apport de la place financière (hors assurances) au PIB Suisse est passé à 4,8% en 2018, contre 6,9% dix ans auparavant.

Le dossier institutionnel piétine face aux atermoiements du monde politique, surtout l’opposition de l’UDC. «J’ai de la peine de comprendre les arguments de l’UDC, car il me semble que cet accord donne plus de poids à la Suisse pour défende sa position que simplement être victime de sanctions comme on peut l’être aujourd’hui», a lancé Yves Mirabaud.

Les gestionnaires de fortune helvétiques sont en outre confrontés à un problème d’équivalence de la législation suisse face aux directives européennes MiFid II, qui prévoient un tel mécanisme pour les clients professionnels (caisses de pension, assurances...) mais par pour les privés.

Afin de remédier à cette situation, la profession planche sur un système de licence délivré par le régulateur financier - comme cela existe aux Etats-Unis - qui serait imposé aux seules banques actives en Europe. Cette idée, dont la réalisation serait conditionnée à la conclusion d’un accord cadre, est porté au niveau national par l’Association suisse des banquiers.

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