Céréales: les cours se raffermissent, la spéculation à la baisse se calme

AWP

2 minutes de lecture

«On a l’impression que les financiers ont arrêté d’appuyer» pour faire plier les prix, explique Damien Vercambre, d’Inter-Courtage.

Les cours des céréales se sont raffermis ces derniers jours, après des semaines de déprime, aidés par l’essoufflement de la vague spéculative à la baisse, mais le rebond reste fragile.

La semaine dernière, le maïs américain était descendu à son plus bas niveau depuis trois ans et le soja, lui, depuis novembre 2021.

Depuis, tous deux ont repris de la hauteur, de même que le blé, stabilisé côté américain comme européen.

«On a l’impression que les financiers ont arrêté d’appuyer» pour faire plier les prix, a expliqué Damien Vercambre, d’Inter-Courtage.

Inspirés par la perspective d’une récolte abondante de maïs et de soja au Brésil et aux États-Unis, les investisseurs extérieurs avaient misé gros sur la chute des cours, du maïs en particulier, dans des proportions plus vues depuis trois ans et demi.

«Ils sont déjà assez ‘short’ (positionnés à la baisse) et n’ont plus trop de velléités de vendre», selon Damien Vercambre.

«Une fois que le marché a intégré les mauvaises nouvelles, il est normal qu’il se reprenne un petit peu», a observé Gautier Le Molgat, PDG d’Argus Media France.

«Beaucoup de gens espèrent que le marché a trouvé un plancher, mais je ne suis pas sûr qu’on puisse encore le dire», commente Arlan Suderman, de StoneX. «On commence à voir des achats d’opportunité, mais il nous faut encore confirmer ces niveaux de prix.»

Sur le plan des fondamentaux, le marché manque d’éléments susceptibles d’encourager une remontée des cours.

Michael Zuzolo, de Global Commodity Analytics and Consulting, relève le temps sec en Argentine et des chiffres préliminaires décevants de rendement de la première récolte de maïs au Brésil, qui vient à peine de débuter.

Quant au blé, «il y a eu beaucoup d’appels d’offres», souligne Damien Vercambre, venus notamment d’Algérie, d’Egypte, du Maroc, de Jordanie, du Bangladesh ou du Japon.

La Chine inquiète

Mais ces développements, positifs pour les cours, sont contrebalancés par d’autres, qui alimentent le sentiment d’une offre pléthorique et qui empêchent le marché de se redresser franchement.

Au Brésil, «on avait dit: les semis de soja sont en retard. Mais c’est tellement sec, qu’ils mûrissent très vite et que les semis de safrinha (seconde récolte de maïs plus abondante que la première) sont plutôt en avance par rapport à l’année dernière», avance Damien Vercambre, «donc ça rassure un peu le marché» au sujet de la récolte.

Aux Etats-Unis, la vague de froid qui a frappé le pays la semaine dernière «n’a pas causé trop de problème», selon Dax Wedemeyer, d’US Commodities, car la région des plaines avait déjà reçu préalablement un manteau neigeux, qui a protégé les cultures.

Le soja américain, lui, souffre d’un manque de demande, et les exportations, à date, sont en retrait de 22% sur un an pour la campagne en cours.

Des inquiétudes se font jour quant à la demande chinoise, après que le ministère américain de l’Agriculture (USDA) a massivement relevé, de près de 12 millions de tonnes, ses estimations de production pour le pays.

Dans le dernier rapport mensuel WASDE de l’USDA, «80 à 85% de la hausse de production et des stocks de fin de période venaient de Chine», alerte Michael Zuzolo. «Je pense que le marché n’y a pas prêté assez attention.»

Les autorités chinoises ont, en outre, récemment approuvé l’utilisation de nouvelles variétés génétiquement modifiées (OGM) de maïs et de soja, ce qui est susceptible d’améliorer les rendements et d’augmenter les récoltes à venir.

Par ailleurs, le gouvernement chinois va aussi encourager les éleveurs porcins à accélérer l’abattage, pour réduire le cheptel et ainsi permettre un rétablissement des prix, ce qui pourrait peser sur la demande de maïs et de soja.

Sur le plan du blé, concernant l’Ukraine, «on s’aperçoit que le corridor qui a été mis en place marche mieux que le corridor humanitaire convenu avec la Russie», décrit Damien Vercambre, avec des prix bas pour sortir le maximum de marchandise du pays.

Côté russe, «les prix ne montent plus vraiment et commencent à baisser un peu», selon Gautier Le Molgat.

Ces dernières semaines, la hausse des prix russes avait permis à plusieurs autres producteurs de redevenir compétitifs, la France notamment, et d’écouler des volumes à l’export.

«Pour une grande partie de l’hémisphère Nord, ce sont les Russes qui nous tiennent en termes de potentiel de baisse», analyse Gautier Le Molgat. «Quand ils sont juste à notre prix, on arrive à faire du business».

A lire aussi...