Technologie & environnement

Pierre-François Tron, Marigny Capital

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Si les nouvelles technologies dégradent l’écosystème, elles peuvent aussi contribuer à sa protection.

La pollution numérique désigne les impacts des nouvelles technologies néfastes pour l’environnement. S’il est indéniable que les nouvelles technologies et l’innovation jouent un rôle dans la dégradation de notre écosystème, elles participent également à protéger l’environnement et à changer les mentalités.

I. La technologie nuit à la planète

L’augmentation de la consommation d’énergie et de ressources non renouvelables

La production d’appareils numériques requiert une quantité de matières faible par rapport à d’autres produits industriels. Cependant, plusieurs métaux et éléments de la famille des lanthanides (aussi appelés «terres rares») qui les composent ne sont disponibles qu'en faibles quantités sur terre. Un ordinateur de bureau contient environ 3% de matériaux rares (barium, manganèse, argent, arsenic, bismuth, cobalt, cadmium, etc.). Par ailleurs, l’émergence des objets connectés pousse à la consommation de plus en plus d’énergie. Chez les ménages, si l’on retire la consommation électrique due au chauffage, les ordinateurs et téléphones représentent près de la moitié de la consommation électrique.

La création de nouveaux déchets

L’émergence des nouvelles technologies a accéléré la création de déchets informatiques: ordinateurs, téléphones portables, machine à laver, objets connectés. L’obsolescence rapide de ces machines les rend inutilisables et crée d’importants déchets.

Ces déchets informatiques participent à la contamination des terres et des eaux partout sur le globe. Cette contamination est générée par le déversement dans la nature de matériaux non dégradables, de métaux lourds, de cadmium, de plomb et de mercure.

Par ailleurs, l’augmentation de ces nouveaux déchets s’accompagne d’une consommation toujours aussi importante de papier. La promesse qu'Internet et les nouvelles technologies permettraient de diminuer drastiquement le nombre d'impressions sur papier n’a pas été tenue. La consommation de papier dans le monde ne diminue pas, et un quart des impressions est jeté dans les cinq minutes selon l’ADEME (agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie).

Mais si la production, l’usage et les déchets liés aux nouvelles technologies ont un coût environnemental élevé, le tableau n’est pas totalement sombre.

II. La technologie au secours de l’environnement

Développement des énergies renouvelables

La recherche a permis de développer des technologies de production d’énergie plus propre: éoliennes, panneaux photovoltaïques, barrages hydrauliques. Cependant, la production d'énergie grâce à ces technologies implique également des innovations technologiques dans deux domaines principaux : le stockage (piles à combustible, batteries lithium-air, stockage d'énergie à l'hydrogène et collecteurs d'énergie thermique) et les réseaux d'énergie (permettant le déplacement de l'électricité de façon plus économe et plus intelligente).

Economie d’énergie et consommation plus responsable

Les objets connectés, notamment grâce à l’intelligence artificielle, peuvent réduire leur empreinte environnementale et donc contribuer à l’économie d’énergie et à la réduction du gaspillage. Les voitures et les immeubles sont d’importants consommateurs d’énergie et émetteurs de CO2. Les innovations dans ces secteurs sont donc particulièrement importantes et attendues.

Les voitures électriques comme la Tesla Model 3 fonctionnent avec des batteries rechargeables qui sont efficaces pour réduire les émissions de CO2. Si des questions subsistent sur l’impact environnemental de la fabrication de voitures électriques, l’ADEME souligne qu’elles restent une solution pour répondre aux défis de la transition écologique et précise que le recyclage des batteries permettra de diminuer l’impact de la fabrication des véhicules.

Enfin, les bâtiments écologiques passifs, conçus pour exploiter au mieux l'éclairage naturel et l’isolation thermique réduisent considérablement la consommation d’énergie. Selon les estimations de l’EIA (U.S. Energy Information Administration), le chauffage, la climatisation et l’éclairage comptaient pour près de 40% de consommation d’électricité des ménages américains en 2019. Etant donné qu’environ un quart de la production d’électricité aux Etats-Unis provenait du charbon en 2019, il existe un potentiel considérable pour réduire cet impact.

III. Le rôle des consommateurs, des investisseurs et des Etats

Le rôle des consommateurs

Les consommateurs étant de plus en plus conscients des enjeux environnementaux poussent les entreprises à agir. Le risque de bad buzz pour ces dernières est très important et peut avoir des effets désastreux, cela les motive donc à adopter une communication de plus en plus transparente sur leur empreinte carbone. C’est pourquoi des entreprises répondent aujourd’hui à l'appel afin d’agir contre le réchauffement climatique. Plus de 320 signataires se sont engagés à fixer des objectifs climatiques qui s'alignent sur la limitation de l'augmentation de la température mondiale à 1,5°C, dans le cadre de l'«Appel à l’action des entreprises – ambition climat 1,5°C». D'autres entreprises se fixent des objectifs ambitieux d'investir dans l'énergie propre ou le transport et de proposer des solutions durables au sein de leurs propres opérations commerciales et de leurs chaînes d'approvisionnement mondiales. C’est notamment le cas d’Apple qui, lors de la sortie de l’iPhone 12, a mis en avant le fait que 98% des terres rares utilisées dans leur nouveau téléphone sont des éléments recyclés et que 99% du tungstène est également recyclé.

Le rôle des investisseurs

Les investisseurs sont aussi de plus en plus sensibles aux investissements responsables. Larry Fink, CEO. de BlackRock, a déclaré dans sa lettre annuelle pour 2020, que son entreprise éviterait les investissements dans des sociétés qui «présentent un risque élevé lié au développement durable». En décembre 2019, à l’occasion de la COP 25, 631 investisseurs du monde entier représentant quelque 37 milliards de dollars d'actifs, ont signé une lettre (Global Investor Statement to Governments on Climate Change) appelant les gouvernements à intensifier leurs efforts contre le changement climatique. 

Le rôle des Etats

En plus de la pression des investisseurs et des consommateurs, les entreprises sont confrontées à des pressions législatives. L'UE a présenté le «Plan d'action: Financer la croissance durable» pour rendre la divulgation des risques climatiques obligatoire dans le cadre d'un nouvel ensemble de réglementations pour soutenir une économie à faible émission de carbone et financer une croissance durable. En outre ce plan d’action précise que la mise en place d’une véritable taxinomie européenne de la durabilité prendra du temps et qu’il «faudra un suivi continu compte tenu de l’évolution des objectifs des politiques de l’UE et d’autres éléments, tels que le marché, l’environnement et les technologies.»

Conclusion

Il faut dépasser le clivage entre technologie et écologie, et s’attacher à orienter les nouvelles technologies vers une production et une consommation plus responsables. Cela passe notamment par une prise de conscience des consommateurs et des entreprises, et par la mise en place de politiques durables et responsables par les gouvernements.