Rouge ou jaune?

Laurent Denize, ODDO BHF Asset Management

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Nous conservons le biais défensif du mois dernier, privilégions les valeurs de croissance et un positionnement sur le crédit et les taux sur la partie courte de la courbe.

 

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La stabilisation du système bancaire américain a permis aux investisseurs de retrouver un peu de sérénité le mois dernier. Il est cependant encore trop tôt pour considérer que l’instabilité financière est derrière nous. Même si le stress ne se matérialise pas par une volatilité exacerbée (c’est plutôt le contraire), il se retrouve dans la baisse récente des taux à long terme.

Dans ce contexte, il est intéressant de noter la forte dichotomie entre les anticipations des marchés actions et celles des marchés obligataires.

Le premier camp applaudit des deux mains l’amélioration ponctuelle des conditions macroéconomiques et la capacité des sociétés à maintenir des marges très élevées.

  1. La dynamique macroéconomique mondiale semble plus encourageante, avec une augmentation de l'indice PMI composite mondial. L'activité reste soutenue dans les services, le marché de l'emploi résiste et les salaires se maintiennent à des niveaux élevés. Par ailleurs, les conditions financières, même si elles se sont resserrées, se caractérisent par un excès d’épargne toujours positif.
  2. L’attitude des banques centrales évolue. C'est le cas de la Fed, qui envisage une pause dans la hausse des taux en raison des incertitudes liées au stress du secteur bancaire et du resserrement considérable déjà opéré. C’est moins le cas pour la BCE…
  3. Les résultats trimestriels des sociétés devraient atteindre des niveaux records. Alors que 60% des sociétés ont déjà publié, les résultats affichent la plus forte progression depuis plus de 15 ans.
  4. La baisse du prix du baril de pétrole et la baisse de la devise américaine contribuent positivement aux résultats de la plupart des sociétés européennes.

L’autre camp ne semble pas partager cet enthousiasme.

  1. La reprise économique se limite uniquement à certains secteurs. Le marché de l'emploi est sur le point de ralentir et le coût de la vie continue d'augmenter et d'éroder le revenu réel. Les hausses de taux d'intérêt commencent à se faire sentir, comme en témoignent les difficultés des banques régionales américaines. La tendance sous-jacente est morose, et la croissance du PIB au second semestre devrait être très faible, tant dans les pays développés que dans les pays émergents.
  2. Le consensus parie toujours sur 2 baisses de taux en 2023 actant d’une capitulation de la Fed face à un atterrissage en douceur de moins en moins probable.
  3. Un accord sur le relèvement du plafond de la dette américaine est peu probable à court terme tant l’écart entre les deux partis est important, facteur de stress face à l’urgence de la décision (début juin).
  4. Un resserrement des conditions de crédit va provoquer une forte hausse des taux de défaut dans les prochaines années et assombrit les perspectives du secteur immobilier.
Dans quel camp sommes-nous?

Nous sommes dans le deuxième camp. Certes la capacité des sociétés à traverser l’environnement actuel est frappante. Les bénéfices réalisés sont supérieurs de 13% au consensus. Mais c’est inévitablement le chant du cygne. Le durcissement des conditions financières, couplé à la fin de l’excès d’épargne nous paraissent être les fondements d’un retournement des marges, alors même que les valorisations restent globalement à des niveaux élevés. En analysant la performance des indices, la dispersion est impressionnante. Les GAFAM (Google, Apple, Facebook et Amazon, Microsoft) accumulent 30% de performance à elles seules, alors que les 495 autres valeurs de l’indice S&P font quasiment du surplace (+3%). C’est peu ou prou la même chose en Europe où la technologie est remplacée par les valeurs du luxe.

Par ailleurs, cette performance s’est essentiellement réalisée par une extension des multiples de valorisation, principalement liée à la récente baisse des taux à long terme. Or, les taux à long terme ne peuvent continuer à baisser que si la conjoncture se détériore considérablement et oblige les banques centrales à baisser leurs taux. Si tel était le cas, il va sans dire que les marges des sociétés aujourd’hui sur des plus hauts historiques subiraient alors le contrecoup du retournement macroéconomique. L’ampleur de la baisse des cash flows futurs serait ainsi nettement supérieure à l’effet positif de la baisse des taux sur l’actualisation de ces mêmes cash flows.

Quel positionnement?

Nous maintenons notre biais légèrement prudent sur les actions mondiales, toutes zones confondues. En revanche, en reprenant les points d’amélioration ponctuels récemment observés, il apparait qu’une chute brutale d’activité est peu probable. Nous ne voyons donc aucune raison de paniquer.

Deux solutions s’offrent aux investisseurs:

Option 1: Vendre une partie de son portefeuille actions pour l’investir dans des obligations Haut Rendement de maturité courte. Le capital peut être réinvesti à 5,3% en bénéficiant d’un couple rendement/risque hors norme. Il faudrait plus de 450bps d’écartement de spreads avant de commencer à perdre son capital sur un horizon d’un an, un scénario qui correspond davantage à une forte récession qu’à une décélération.

Option 2: Couvrir en partie son portefeuille actions par un achat d’options de vente en profitant de la récente baisse de la volatilité pour décaisser une prime aujourd’hui raisonnable. En Europe, pour couvrir 25% d’un portefeuille (jusqu’à fin août 2023) avec un put 5% en dehors de la monnaie, il vous en coûtera 0,50%. Plutôt une bonne opération après une performance des marchés actions proche de 15% depuis le début de l’année.

Conclusion

En conclusion, nous conservons le biais défensif du mois dernier, privilégions les valeurs de croissance et un positionnement sur le crédit et les taux sur la partie courte de la courbe. Nous pensons en effet que le stress bancaire récent n’est qu’un signal supplémentaire d’une contraction à venir de l’économie.

 

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