Préserver la biodiversité est une priorité

Robert-Alexandre Poujade, BNP Paribas Asset Management

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Pourquoi faut-il tenir compte du capital naturel?

La biodiversité compte-t-elle aux yeux des investisseurs? Faut-il se soucier de la destruction de l’habitat des abeilles ou de la mangrove? L’important blanchiment des récifs coralliens impacte-t-il nos investissements? La réponse est «oui» lorsque nous investissons dans les chaînes d'approvisionnement agricole ou dans le tourisme. La perte de tels services écosystémiques naturels est non seulement consternante mais elle a de réelles conséquences pour les entreprises et pour les investisseurs.

Les investisseurs sont en effet confrontés à plusieurs risques liés au capital naturel. Le premier est d’ordre financier: la perte de services écosystémiques, auxquels il faut attribuer une valeur, entraîne des coûts tels que celui lié à l’investissement dans la pollinisation artificielle ou la lutte contre la dégradation des sols ou l’eutrophisation.

Nous dépendons plus que jamais des ressources et des services écosystémiques naturels pour subvenir à nos besoins alimentaires, sanitaires et énergétiques. Les pollinisateurs, comme les abeilles par exemple, assurent entre cinq et huit pour cent de la production alimentaire mondiale. Or nous assistons à l’affaiblissement de notre biodiversité et à la disparition de nombreuses espèces.

Ce déclin s’est accéléré malgré des engagements politiques répétés. Raison pour laquelle de nombreuses voix s’élèvent aujourd’hui pour que soit mis sur pied un accord plus ambitieux en matière de biodiversité, tel que celui des Accords de Paris sur le climat. Car l’interconnexion entre climat et biodiversité est indissociable.

L’année 2021 sera l’année de la biodiversité: la Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique (COP 15) se tiendra en Chine et pourrait avaliser des objectifs ambitieux pour préserver et restaurer la biodiversité. En effet, le 11 janvier dernier lors du One Planet Summit, la Coalition de la Haute Ambition pour la Nature et les Peuples, coprésidée par la France et le Costa Rica, et qui comprend 50 Etats, s’est engagée à protéger 30% de la planète (terre et mer) d'ici 2030. Cette coalition espère des engagements rapides des pays du G20 (Canada, Japon ou Royaume-Uni), mais aussi des pays mégadivers1 (Colombie, Équateur ou Pérou) pour s'assurer qu'il constitue la base de l'accord des Nations Unies à Kunming.

Vers la restauration des écosystèmes

Biodiversité et activité économique sont étroitement liées. La valeur cumulée de tous les services rendus par la nature est estimée à 125'000 milliards de dollars par an, soit près de deux fois le produit intérieur brut de l’économie mondiale. Il y a donc urgence à agir pour inverser la situation, au risque de ne plus être en mesure ni de maintenir notre croissance économique actuelle, ni in fine de maintenir l’habitabilité de notre planète.

La prise de conscience de l’importance de la protection de la biodiversité fait émerger de plus en plus de questions autour de sujets tels que la déforestation, la provenance de nos aliments ou encore la qualité des sols. C’est un signal d’alarme qui retentit de plus en plus fort pour préserver notre capital naturel.

Les investisseurs de long terme ont ainsi un rôle à jouer pour encourager les entreprises à réduire leur impact sur la biodiversité.  Ils exigent davantage de transparence quant à l’impact de leurs placements, comme par exemple en matière de lutte contre la pollution plastique ou la déforestation.

La biodiversité est un sujet complexe – elle est impactée par différentes pressions (changement climatique, eau, changement des sols, pollutions) et de différentes manières (nombre et abondance des espèces, des gènes, des fonctions…) – souvent en amont de la chaine de valeur.

Le manque de données tangibles indispensables, relatives à l’impact des entreprises sur la biodiversité et les écosystèmes est un obstacle majeur pour l'élaboration de stratégies d'investissement intégrant les enjeux liés à la biodiversité. Malgré la complexité de l’exercice, les gérants d’actifs prennent des initiatives pour répondre aux interrogations et sollicitations de leurs clients et faire bouger les lignes.

Chez BNP Paribas Asset Management, par exemple, nous nous sommes dotés d’une stratégie d’entreprise fondée sur l’investissement durable, prenant notamment en compte des critères liés à la préservation de notre environnement. Nous nous engageons concrètement dans ce domaine avec la mesure et la publication de l’empreinte eau et forêt de nos investissements.

L’accès aux données reste le nerf de la guerre et nous travaillons désormais avec prestataire de données qui développe un outil de mesure d'impact des investissements sur la biodiversité2. C’est un chantier ambitieux et crucial pour rendre compte à nos parties prenantes des impacts de nos portefeuilles sur la biodiversité mais également pour proposer des solutions d’investissement en faveur de la protection et de la restauration de la biodiversité.  

 

1 Pays dans lequel la majorité des espèces végétales et animales présentes sur Terre sont représentées; ils sont donc considérés comme les plus riches de la planète en matière de diversité biologique. https://fr.wikipedia.org/wiki/Pays_m%C3%A9gadivers