La Chine vient de publier les résultats de son dernier recensement décennal. Le ralentissement de la croissance de la population met en lumière un pays qui pourrait voir son économie affectée par une double problématique : la baisse de la population et son vieillissement.
 

La croissance de la population ralentit

Avec près d’un mois de retard, la Chine a livré au mois de mai les résultats de son dernier recensement décennal. Près de 7 millions de volontaires ont participé à ce travail à travers tout le pays.

Ce recensement met en lumière la poursuite de tendances fortes chez ce géant démographique. La population chinoise est toujours plus urbaine avec près de 60% de la population vivant dans des villes, dont près de la moitié dans des villes de plus d’un million d’habitants.

 

 

Le niveau d’éducation poursuit sa croissance. Alors qu’en 1982 seul 6% de la population avait un niveau secondaire, aujourd’hui 15% de la population est au bénéfice d’un diplôme universitaire. 

La Chine poursuit donc sa mue d’un pays qui produisait pour les autres à un pays qui veut innover et produire des services et biens à haute valeur ajoutée. 

Les résultats de l’étude lèvent en partie les inquiétudes des dirigeants chinois puisque la population a continué de croitre à raison de 0,53% par an sur la période. Avec une population de 1,411 milliards d’habitants, la Chine reste le pays le plus peuplé au monde.

 

Néanmoins la croissance de la population est en baisse constante depuis 50 ans.  Ceci fait craindre une baisse de la population dès 2021 selon l’académie des sciences de Shanghai. 

 

 

 

La mise en place de la politique de l’enfant unique en 1979 continue d’impacter la dynamique démographique du pays. Bien que cette politique eût été flexibilisée en 2015 en autorisant un deuxième enfant, le taux de natalité continue inexorablement de baisser. Il dépasse à peine 10 enfants pour 1000 habitants, soit un chiffre légèrement inférieur à la Suisse.

 

 

Le taux de fécondité baisse également pour atteindre en 2020 le chiffre de 1,3 enfant par femme en âge de procréer. Certains démographes estiment donc qu’en 2021 la Chine pourrait avoir 10 millions de naissances pour 10 millions de décès, basculant ainsi dans une période de baisse de population.

 

 

Des changements structurels majeurs

Les projections de l’ONU font donc craindre une baisse de la population en Chine dans les décennies à venir.

Selon une projection médiane, la Chine pourrait voir sa population décroître d’environ 400 millions d’habitants sur un siècle. Les prévisions plus pessimistes conduisent même à une baisse de l’ordre de 700 millions d’individus sur la période.

L’Inde serait dans une projection médiane le pays le plus peuplé et la Chine serait talonnée par le Nigéria. Plus problématique, la différence démographique avec les Etats-Unis serait moins favorable à l’empire du milieu. De quoi alimenter les futures tensions commerciales et politiques.

 

 

Outre la baisse de la population, la Chine fait face également à une modification rapide de sa structure démographique.

En effet la baisse des naissances et le vieillissement de la population font baisser le taux de participation à la force de travail. 

 

 

Bien que supérieur aux pays occidentaux, ce taux de participation est en baisse de 8% sur 30 ans. Le taux de dépendance, soit le pourcentage de la population ne travaillant pas, qu’ils soient trop jeunes ou retraités, s’accroit depuis plus de 10 ans. Il atteint 41% de la population mais avec un changement de structure puisque la proportion de dépendants âgés va bientôt dépasser la proportion de dépendants jeunes.

 

 

Les projections quant à l’évolution de la structure par âge sont sans appel, la population chinoise va non seulement baisser dans les décennies à venir, mais elle va également vieillir. Avec une proportion de plus de 65 ans à 12% en 2020, soit le double de 2000, ce chiffre pourrait atteindre 24% en 2040 et 30% en 2060.

 

 

Les jeunes adultes actuels appartenant à la génération de la politique de l’enfant unique, bien que diplômés, bénéficient de salaires plus élevés et de conditions de vie plus agréables que leurs aînés. Il semble fort probable qu’ils devront subvenir à terme aux besoins de leur parents et grands-parents. 

Des défis à la taille du pays

La Chine, après avoir été l’usine du monde, repositionne depuis 20 ans son économie vers la demande intérieure. Rien de moins étonnant que de voir des sociétés technologiques comme Tencent ou Alibaba émerger dans un pays encore jeune. Mais la démographie problématique du pays pourrait à son tour affecter l’économie chinoise. La Chine pourrait se trouver dans une situation aussi inconfortable que ses voisins nippons ou sud-coréens. 

La baisse de la population, synonyme de frein potentiel à la croissance, est un défi majeur que doit relever ce géant. Le coût du logement, de l’éducation, la politique de l’enfant unique ou l’augmentation du niveau de vie sont autant de raisons expliquant cette baisse du taux de natalité. 

La Chine doit trouver rapidement des solutions à ce problème. Le pays pourrait faciliter l’accès à la main d’œuvre étrangère mais la crise du Covid et la méfiance à l’égard de l’Occident ne plaident actuellement pas en faveur de ce changement de politique gouvernementale. La limitation du nombre d’enfants par femme pourrait être totalement levée en supprimant le seuil de 2 enfants. Le gouvernement pourrait finalement devoir légiférer sur l’âge de la retraite actuellement fixé à 55 ans pour les femmes et 60 ans pour les hommes. En mars 2021 le parlement a dans cette optique adopté un projet de relèvement progressif de l’âge de la retraite de 5 ans. 

Si rien n’est entrepris pour enrayer tant la baisse de la population que son vieillissement, le marché intérieur chinois se réduira et affectera par voie de conséquence la compétitivité économique du pays. La Chine est face à un défi qui peut la faire vaciller tel un colosse aux pieds d’argile.