Plus de prévisibilité l'année prochaine

Marc Brütsch, Swiss Life Asset Managers

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Changement d’ère et inflation: ces deux termes ont marqué l’exercice 2022.

L’attaque russe contre l’Ukraine en février 2022 a entraîné une montée des incertitudes géopolitiques, comme cela n’avait plus été le cas depuis les années 1960. En raison de la menace pesant sur l’approvisionnement énergétique de l’Europe, les prix de l’énergie ont fortement augmenté, accélérant encore la hausse des taux d’inflation observée jusqu’alors. Jusqu’à la fin de l’année, le taux d’inflation atteignait des pourcentages à deux chiffres dans plusieurs pays d’Europe. En conséquence, la guerre en Ukraine a également marqué un tournant dans la politique monétaire. Aucun des récents cycles de hausse des taux ne s’est déroulé aussi rapidement que la normalisation de la politique monétaire au cours de l’année écoulée. Ce changement d’ère a entraîné un revirement des taux d’intérêt. Associée à la hausse des coûts de financement, l’augmentation de ceux de l’énergie au passage à la nouvelle année fait d’une récession le scénario le plus probable pour 2023. Malgré ces perspectives troublées, l’année à venir devrait apporter aux investisseurs une plus grande sécurité de prévision sur trois points.

Primo, l’approvisionnement énergétique de l’Europe devrait être assuré pour cet hiver à des températures normales. Les réservoirs de gaz naturel étaient pleins début décembre, et la production des centrales nucléaires françaises a fortement augmenté dernièrement. De nouveaux contrats de fourniture de gaz naturel liquéfié seront conclus avec des pays producteurs et 16 nouveaux terminaux gaziers sont en construction ou en projet dans toute l’Europe. Il est toutefois probable que les livraisons de gaz russe ne pourront pas être totalement remplacées. Des économies durables restent donc nécessaires, tout comme le remplacement à long terme par des sources d’énergie renouvelables. En Europe, les prix de l’énergie devraient rester élevés, et l’externalisation de la production de biens à forte intensité énergétique devrait se poursuivre.

Secundo, l’évolution future de l’inflation devrait permettre d’établir des prévisions à nouveau plus fiables. Aux Etats-Unis, le pic d’inflation a été dépassé en juin, à 9,1%; le renchérissement est désormais inférieur à 8%. Au cours des premiers mois de 2023, la hausse des prix de l’électricité sera prise en compte dans le calcul de l’inflation des prix à la consommation. Par la suite, les taux d’inflation devraient progressivement se normaliser au cours des prochains trimestres, y compris dans la zone euro et en Suisse.

Tertio, le premier semestre 2023 devrait ainsi apporter une meilleure visibilité en matière de politique monétaire et de coûts de financement pour les entrepreneurs et les propriétaires immobiliers privés. Notre hypothèse est que les principales banques centrales procéderont à de nouvelles hausses de taux au premier trimestre 2023. En Suisse, la BNS devrait relever son taux directeur à 1,5% d’ici mars 2023. Avec la récession qui va se généraliser ces prochains mois, le cycle de hausse des taux sera toutefois achevé au premier semestre 2023.

Aux Etats-Unis, on s’attend déjà à une première baisse des taux directeurs au second semestre 2023. Le revirement des taux va ainsi toucher à sa fin, y compris pour les rendements des obligations à longue échéance. La planification des coûts de financement des investissements à long terme pourra ainsi être plus certaine.

Malheureusement, l’inconnue quant à la durée et à l’issue de la guerre en Ukraine en 2023 persiste. Toutefois, les investisseurs pourront mieux évaluer dans quelle mesure la pandémie et la guerre auront effectivement inversé la tendance à long terme de la baisse des taux d’intérêt.

En période d’incertitude géopolitique accrue, le retour d’une certaine prévisibilité pour l’année à venir est toujours bienvenu.