Le Saint Graal de l'immortalité

Roberto Magnatantini, DECALIA

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La science du vieillissement progresse à grands pas, des durées de vie bien allongées ne relèvent plus du rêve.

Démarrer cette nouvelle année en dépeignant la voie vers une longévité extrême pourrait paraître provocateur, 2020 ayant si brutalement rappelé combien notre espèce humaine reste mortelle. Mais ce qui a été fantasmé depuis la nuit des temps est peut-être devenu une perspective réaliste grâce à une meilleure compréhension des mécanismes du vieillissement. Ces progrès de la génétique ont notamment conduit au développement rapide de vaccins à ARN messager contre le coronavirus. Ainsi, l'immortalité semble être la conclusion inéluctable des progrès de la science – augurant une transformation profonde de notre société.

Les premiers rituels d'enterrements et signes de croyance en la vie après la mort remontent à quelque 130’000 ans. Depuis, d'innombrables alchimistes ont recherché la pierre philosophale, attirés par l'élixir de vie qu'elle contient. On dit même que Ponce de Leon, un explorateur espagnol, se serait aventuré jusqu'aux Caraïbes à la recherche de la fontaine de jouvence.

Ce n'est que depuis 1960 que la science a supplanté (ou plutôt rattrapé) l’imaginaire. La compréhension du processus de vieillissement a progressé à pas de géant, à tel point que des essais sur des sujets humains débutent dans plusieurs domaines prometteurs. Une approche vise à inhiber le taux de dommages métaboliques qui est associé au vieillissement, par exemple en rappelant aux cellules qu'elles doivent «s'occuper d'elles-mêmes». Un travail généralement effectué par la coenzyme NAD+, sauf que sa présence s’amenuise avec le temps (elle diminue de moitié entre 20 et 50 ans). Une autre approche vise à réparer les dégâts dus à l'âge, notamment en détruisant les cellules sénescentes (aussi appelées zombies). Il s'agit de cellules qui ont, pour ainsi dire, atteint leur date d'expiration, ce qui signifie qu'elles ne peuvent plus se répliquer (à cause du raccourcissement des télomères). Mais leur présence, en nombre croissant avec le temps, peut endommager les tissus qui les entourent. Et puis, bien sûr, il y a tout le domaine des cellules souches, la «matière première» dont sont constitués les corps qui, par division, peuvent générer des cellules dotées de fonctions plus spécifiques.

En bref, les scientifiques sont aujourd'hui en mesure de s'attaquer avec une efficacité croissante aux trois causes potentielles de mort humaine : les accidents (via de meilleurs systèmes de sécurité et les réparations physiques), les maladies (grâce à la prévention, à l'amélioration des traitements et à la bio-ingénierie) et, comme nous venons de le détailler, la vieillesse. Ce qui ouvre la voie à une durée de vie bien plus rallongée – peut-être même un jour illimitée?

Partant, les possibilités d'investissement sont nombreuses, que ce soit dans des sociétés dites de transformation (telles que CRISPR ou Beam), dans les fournisseurs de technologies sous-jacentes (comme Evotec, Illumina ou WuXi) ou dans des bénéficiaires directs/indirects (pensez par exemple à ce qu'une cohorte de personnes âgées bien plus vaste et aisée apporterait aux ventes de Sonova).

Elon Musk a-t-il raison d’affirmer que les humains devront fusionner avec les machines s'ils n’entendent pas perdre leur pertinence à l'ère de l'intelligence artificielle? Le monde de demain sera-t-il peuplé de cyborgs vieux de 1000 ans? Les utopies ou dystopies décrites dans les romans que nous et – surtout – nos adolescents dévorons avec tant de plaisir deviendront-ils réalité? Qui sait, peut-être vivrons nous assez longtemps pour le voir de nos propres yeux…