L’huile de palme peut-elle être durable?

Andrea Astone, BMO Global Asset Management

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Les inquiétudes quant à la durabilité de la production d’huile de palme n’ont rien de nouveau.

Les inquiétudes quant à la durabilité de la production d’huile de palme n’ont rien de nouveau. Depuis de nombreuses années déjà, les investisseurs ont joint leur voix aux pressions des médias et du grand public pour réclamer des normes environnementales et sociales plus exigeantes dans la production de cet ingrédient très répandu dans l’industrie alimentaire.

Aujourd’hui, ces pressions s’accentuent encore sous l’effet de l’attention accrue portée au dérèglement climatique et à la biodiversité, des pressions politiques dans l’UE et aux États-Unis et des questionnements relatifs à l’efficacité des mesures existantes. Signe de cette nouvelle tendance, les candidats à l’élection présidentielle américaine de 2020 Elizabeth Warren et Bernie Sanders ont adressé un courrier rédigé conjointement avec six autres sénateurs à l’attention de sociétés de gestion de fonds1, afin d’appeler ces dernières à prendre des mesures, au sein de leurs portefeuilles et des chaînes de valeur financières, contre les entreprises responsables de la déforestation via leurs activités liées à l’huile de palme.

La Table ronde sur l’huile de palme durable (Roundtable on Sustainable Palm Oil, RSPO) fait partie des grandes initiatives déployées pour améliorer la durabilité de ce secteur, mais non sans s’attirer des critiques. Voici un résumé de quelques problématiques en la matière et des dernières évolutions apportées au mandat du RSPO pour tenter d’y remédier.

Rôle de la Table ronde sur l’huile de palme durable

Le RSPO a été fondé en 2004 par plusieurs ONG comme initiative à multiples parties prenantes, afin de résoudre les graves problèmes de durabilité jalonnant la chaîne de production de l’huile de palme. Environ 21%2 de la production mondiale d’huile de palme est maintenant certifiée RSPO, ce qui s’accompagne d’importants progrès dans les pratiques de durabilité. Toutefois, le RSPO est également critiqué pour son manque d’efficacité.

La réaction du RSPO

En 2017 et en 2018, le RSPO a révisé les Principes et Critères (P&C), qui définissent les règles de l’organisation et les modalités d’adhésion de ses membres. Ce processus est reproduit tous les cinq ans. Incontestablement, cette dernière révision a été la plus complète, en particulier concernant les aspects liés aux droits de l’Homme et du travail.

Les principaux ajouts et modifications sont notamment: zéro déforestation, pas de nouvelle plantation dans les tourbières, salaire de subsistance, norme relative aux petits exploitants et fournisseurs tiers.

Avec ces réformes, le RSPO est sur la bonne voie. Mais il faut certifier plus que 21% de la production mondiale et garantir la mise en œuvre de cette certification, ce qui reste un défi de taille. De même, l’engagement des investisseurs demeure essentiel.

L’engagement de BMO

Au cours des dix dernières années, BMO Global Asset Management (de sa propre initiative et conjointement à d’autres sociétés de gestion3) a mené des actions d’engagement auprès d’entreprises de ses portefeuilles d’investissement se trouvant exposées, directement ou par le biais de leurs chaînes d’approvisionnement, aux risques de l’huile de palme, afin de les inciter à: développer, publier et mettre en application une politique en matière de déforestation et de droits de l’Homme et du travail couvrant l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement; mais aussi rapprocher leurs standards de ceux du RSPO et chercher à rejoindre l’organisation.

Face à la hausse incessante des risques de déforestation entourant les entreprises dans lesquelles nous investissons et les portefeuilles de nos clients, nous sommes résolus à poursuivre cet engagement actif auprès du secteur de l’huile de palme. Récemment, nous nous sommes entretenus avec les dirigeants de deux grandes entreprises de production d’huile de palme en Malaisie, dans le but de mieux appréhender leur capacité à réussir la mise en œuvre des nouveaux P&C. L’un de ces producteurs dispose d’une certaine avance grâce à des politiques et des procédures comparativement robustes; l’autre, en revanche, ne réalise aucun progrès et met en évidence le fossé qui sépare les entreprises d’avant-garde de celles qui sont en retard.

Nous entretenons également un dialogue avec les banques exposées au secteur au travers de leur portefeuille de crédits, car celles-ci possèdent potentiellement une grande influence du fait de leur capacité à provoquer des changements par le biais de leurs conditions de crédit.

 

3 Notamment le Groupe de travail des PRI consacré à la durabilité de la production d’huile de palme