L’Europe au défi de l’hypercroissance mondiale

Wilfrid Galand, Montpensier Finance

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Le déploiement des vaccins et les plans de relance monétaires et budgétaires vont accélérer le rythme de croissance.

© Keystone

Après la récession de 2020, le FMI, la Banque Mondiale et l’OCDE, dans leurs dernières prévisions, anticipent tous un rebond spectaculaire de la croissance mondiale en 2021: 4% pour la Banque Mondiale et l’OCDE et jusqu’à 5,3% pour le FMI. Notre indicateur Montpensier MMS de Momentum Économique mesure l’accélération de la croissance mondiale. Il est remonté à 50 au 1er mars contre 19 au plus bas en juin et indique une forte reprise notamment en Chine où l’indicateur est à 67.

Ce regain de dynamisme s’explique par les deux locomotives traditionnelles que sont les Etats-Unis et la Chine: plus de 3% de croissance attendu en 2021 par le FMI Outre-Atlantique et plus de 8% dans l’Empire du Milieu. Ces chiffres pourraient bien être encore revus à la hausse, en particulier aux Etats-Unis: la Fed de New York estime désormais que la croissance américaine pourrait atteindre 8,3% en rythme annuel au premier trimestre!

L’optimisme ambiant quant à la reprise de l’activité se traduit sur les marchés par une vive remontée du prix des matières premières, qu’elles soient industrielles – comme le cuivre, le bois de construction ou le fer à béton – énergétiques ou agricoles. Le commerce international accélère (+4% au dernier trimestre 2020 par rapport au troisième trimestre de l’année) et les anticipations d’inflation sur les marchés obligataires se sont également redressées au point de dépasser désormais nettement les 2% aux Etats-Unis.

Il faut dire que le déploiement des vaccins désormais très rapide aux États-Unis, et le contrôle toujours strict et efficace de l’épidémie en Chine, dressent dorénavant un cadre très favorable au retour de la croissance.

Le momentum économique monde se redresse et revient à son niveau pré-épidémique

Source: Montpensier Finance / Bloomberg au 26 février 2021

D’autant plus que les plans de relance s’accumulent. En Chine, le déficit budgétaire devrait dépasser les 10% du PIB cette année et Outre-Atlantique il pourrait même s’envoler au-delà de 30% cette année si l’intégralité des sommes promises sont effectivement votées et déboursées. Quand on rajoute les 1600 milliards de dollars d’épargne accumulés dans les comptes des particuliers américains depuis la pandémie, et le soutien indéfectible de la Fed, toujours très vigilante pour garantir des conditions de financement favorables, il y a effectivement de quoi être confiant sur le dynamisme de l’activité cette année.

Et l’Europe dans tout çà? Les prévisions pour 2021 y sont certes encourageantes (+5,2% pour le FMI) mais pas assez pour compenser la chute de plus de 8% de l’activité en 2020. Pourtant, nous pensons qu’une bonne surprise européenne est possible pour cette année et que le Vieux Continent peut accrocher le train de l’accélération de la croissance mondiale.

Outre la force de traction des économies américaines et chinoises, très puissante sur le Vieux Continent grâce à l’ouverture de l’Union au commerce international, l’Europe va en effet bénéficier dès le second semestre 2021 de l’effet du plan de relance commun dit «Macron-Merkel» de 750 Milliards d’euros.

Elle profite également du soutien considérable de la Banque Centrale Européenne qui injecte 1850 milliards de liquidités via son programme «Pandémie» qui s’étend jusqu’en mars 2022, et qui s’est engagée à maintenir les taux de référence à leur niveaux actuels (entre 0% pour les opérations de refinancement et -0,5% pour les facilités de dépôt) jusqu’en 2023.

Les États ne sont pas en reste avec des relances budgétaires très fortes: même l’Allemagne semble partie pour oublier son objectif de déficit budgétaire zéro (le «Schwarz Null») jusqu’en 2022 au moins.

Mais c’est bien du côté des agents économiques, ménages et entreprises, qu’il nous parait possible d’aller chercher un supplément de croissance susceptible de remettre l’Europe sur sa trajectoire pré-pandémie, dès cette année.

Deux éléments nous semblent essentiels pour créer cette «économie de la confiance» qui puisse alimenter à la fois la consommation et l’investissement. Tout d’abord, ne pas retomber dans les travers rigoristes historiques de l’Europe hanséatique et profiter des conditions de financement favorables pour poursuivre les relances publiques: réécrivons le «pacte de croissance et de stabilité» européen pour ne pas commettre l’erreur de 2011 en resserrant trop tôt l’étau fiscal!

Mais surtout accélérer le déploiement des vaccins: alors que l’Europe est à la traine des États-Unis et du Royaume-Uni (sans parler d’Israël, champion incontesté de la vaccination), un effort important s’impose pour revenir en tête de la course: seule une couverture rapide à plus de 50% de la population permettra le retour de la confiance et l’accélération décisive de l’économie. L’Europe a des atouts majeurs pour faire de 2021 une année de très forte croissance. Les chercheurs européens ont été à la pointe de la recherche médicale sur les vaccins. Il est temps d’en faire bénéficier les citoyens de l’Union. Les investisseurs l’attendent avec espoir à ce tournant de l’histoire.

Au-delà de la rotation sectorielle, la poursuite de la hausse du marché des actions européennes passera par le respect de stimulation budgétaire et le succès vaccinal.