L'équipe du fonds de la famille Sturdza passe en revue le mois de janvier et les chocs provoqués par les décisions de la Fed.
Janvier s’est avéré être un mois volatil et traître, contrastant fortement avec «l’effet janvier» typique, cette anomalie de marché bien connue se traduisant par des rendements supérieurs à la moyenne au cours du premiers mois de l’année. En effet, les marchés d’actions sont en forte baisse depuis le 31 décembre 2021, les attentes des investisseurs étant rapidement passées d’un ajustement bénin de la politique monétaire à un cycle de hausse de taux mené d’une main de fer par la Réserve Fédérale.
Ce qui avait commencé par un ajustement contenu du cours des actions à la courbe des taux en hausse (de 1,51% à 1,88% pour le 10 ans vers le milieu du mois), a pris la tournure d’une correction plus large sur les actifs risqués, confirmée par des flux dans les valeurs refuges typiques, entrainant même un léger retour des taux.
Sans surprise, la correction a été particulièrement intraitable pour les valeurs de croissance hautement valorisées, et carrément cruelle pour certains titres dits «conceptuels». Au désespoir des férus de crypto-monnaies, les anticipations constituées par la diminution des liquidités et la hausse des taux ont eu un impact important sur la valeur des cryptos actifs, alors que l’or a bien résisté. Le S&P 500 a affiché une forte volatilité, avec l’impressionnante variation intra-journalière du 24 janvier (-3,9% et +4,4%). En conclusion, l’assimilation d’une inflation mondiale post-COVID plus élevée se fait de manière mouvementée jusqu’à présent.
Dans ce contexte, le ton de la conférence de presse du président de la «Fed» M. Powell du 26 janvier a été ressenti comme une désillusion plutôt qu’un réconfort. En soulignant les pressions sur le marché de l’emploi, la forte dynamique économique et l’intensité de l’inflation, le président a semblé faire son possible pour différencier le cycle de taux actuel du précédent, ouvrant ainsi la porte à procéder de manière «imminente, et peut-être plus rapide». Il s’est d’ailleurs retenu d’interpréter les remous du marché en réitérant que l’accent serait mis sur «l’économie réelle» et la nature anticipative des conditions financières, qu’il a qualifiées «d’adéquates».
Pour souvenir, en 2018, un Jerome Powell déterminé à l’augmentation des taux avait finalement dû se soumettre à l’effondrement des marchés d’actifs et à la diminution de la dynamique économique, en renversant sa politique, action qui fut suivie par une forte reprise des actions en 2019. Sa volonté d’intervenir de manière décisive en mars 2020 avait d’ailleurs renforcé son crédit auprès des investisseurs actions. Aujourd’hui cependant, son pivot «hawkish» de décembre, couplé à une conviction supplémentaire ce mois-ci, pousse les investisseurs à remettre en question le «Fed Put», cette garantie implicite que la Fed interviendra pour pallier une correction, et souligne l’accent mis sur la réponse à l’inflation actuelle. Pour l’instant, le marché reste en mouvement, cherchant à comprendre à quelle valorisation ce changement de régime sera «intégré».
En restant constructif, il semble que si la Fed conçoit de différencier les cycles de taux actuels et passés, les investisseurs en actions devraient en faire de même. En effet, la forte croissance du PIB devrait potentiellement catalyser un niveau de croissance des revenus au-dessus des niveaux récents, ceci devant permettre de diluer les pressions sur les coûts qui impactent les marges. Si certaines positions les plus gagnantes des années précédentes pourraient être sous pression, la phase actuelle devrait également offrir des opportunités, des corrections de cette envergure ayant tendance à engouffrer les cours des sociétés sans différenciation adéquate.
Dans la perspective d’un resserrement de la politique monétaire, nous pensons que la clé sera la sélectivité et la discipline en matière de valorisation. Comme le démontrent les premiers rapports de résultats trimestriels, certaines entreprises continuent de dégager de la valeur et demeurent les catalyseurs essentiels de notre mode de vie de plus en plus numérique. Alors que la nervosité aiguë punit brutalement les entreprises de haut vol publiant des résultats insatisfaisants (comme Netflix qui perdait 20% en une journée), d’autres, comme Microsoft, attirent les investisseurs grâce à la progression soutenue de leur activité, et d’autre part les opportunités d’acquisitions d’actifs uniques comme Activision.
Plus que jamais, les fondamentaux seront déterminants pour les résultats boursiers dans une période qui s’annonce volatile pour l’ensemble des marchés financiers. Restant quelque peu prudents pour l’instant, nous avons adopté certaines stratégies de couverture, tout en cherchant à tirer parti de la volatilité élevée par la vente d’options.