
L’administration américaine est forcée de revoir sa copie. La politique tarifaire est intenable et Donald Trump doit lâcher du lest. Si la détente n’est que rhétorique à ce stade, elle signifie une embellie sur les marchés d’actions et de taux.
Il semble que Donald Trump, en nette perte de popularité, prenne enfin la mesure du coût économique de la hausse des tarifs douaniers. La baisse sensible du commerce maritime vers les États-Unis depuis le début du mois fait craindre des pénuries de biens. Les distributeurs (Walmart, Target, Home Depot) très dépendants des importations de Chine sont venus plaider leur cause à la Maison Blanche. Donald Trump a laissé entendre qu’une baisse des tarifs était possible, ce qui a suffi à rassurer les marchés. En outre, la pression de Donald Trump sur Jerome Powell s’est atténuée. Le secrétaire du Trésor Scott Bessent a également cherché à rassurer Wall Street, considérant que les tarifs sur la Chine ne peuvent être maintenus longtemps. Son intervention a permis une diminution des taux longs alors qu’une crise du dollar n’est plus exclue. Bref, l’administration américaine navigue à vue et souffle le chaud et le froid sur les marchés.
Tensions économiques et embellie de marché
Sur le plan conjoncturel, les enquêtes régionales fléchissent uniformément en avril, y compris dans le secteur des services. La hausse des prix payés n’est pas suivie d’une augmentation de même ampleur des prix reçus. Cela signifie une pression naissante sur les marges. Cela étant, les licenciements restent très faibles, la confiance des ménages est moins dégradée que prévu selon l’estimation finale de l’enquête du Michigan. La croissance du 1er trimestre sera probablement négative en raison du solde extérieur. La hausse des ventes de maisons neuves à 724’000 en rythme annuel en mars est néanmoins une bonne surprise. À l’instar des ventes de voitures solides en mars, ces achats immobiliers témoignent peut-être des craintes de hausses des coûts à venir (bois de construction, lutte contre l’immigration).
Les tensions des dernières semaines sur les taux américains se sont apaisées. L’indépendance de la Fed doit absolument être préservée, et Donald Trump a dû concéder qu’il n’entendait pas limoger ou forcer à la démission Jerome Powell avant la fin de son mandat prévue dans un an. Dans ce contexte, le 10 ans est revenu sous 4,25%, près de 30pb sous les sommets d’avril. La tendance lourde à la pentification de la courbe s’est estompée. En zone euro, la stabilité du Bund témoigne du rôle de valeur refuge retrouvé de la dette allemande. Elle permet aussi une détente généralisée des spreads souverains, dont l’OAT qui s’échange autour de 72pb. Le BTP italien, après le relèvement de la note à BBB+, revient parallèlement vers 110pb. L’inflation anticipée se normalise également avec un swap d’inflation à 2 ans en hausse de 8pb sur la semaine. Le redressement du pétrole, en partie lié à l’absence d’avancées dans les discussions américano-iraniennes, explique ce rebond des points morts. À noter que les craintes sur les prix reflétées dans les enquêtes n’ont pas encore été intégrées dans l’IPC américain. Le rebond des actions est spectaculaire. Le Nasdaq reprend 6,7% sur la semaine avant les publications de Microsoft, Apple, Meta et Amazon cette semaine. Les avancées technologiques chinoises pourraient peser sur les perspectives des Mag7. L’Europe reprend 3% entrainant une nette détente des spreads de crédit et de la volatilité actions. Les spreads euro IG se situent à 95pb contre swap, ceux du high yield sont à 354pb.