La Suisse ne doit pas servir de cobaye pour la «Monnaie pleine»

AWP

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Plus de 130 parlementaires bourgeois mais aussi socialistes appellent à rejeter l’initiative en votation le 10 juin. Selon Olivier Feller (PLR/VD), le système actuel fonctionne.

La Suisse ne doit pas servir de cobaye pour la «Monnaie pleine». Plus de 130 parlementaires bourgeois mais aussi socialistes appellent à rejeter l’initiative en votation le 10 juin. L’expérience serait beaucoup trop risquée, selon eux.

L’initiative «Pour une monnaie à l’abri des crises: émission monétaire uniquement par la Banque nationale!» veut transformer radicalement le système monétaire et tenter une expérimentation à l’issue totalement imprévisible, dénonce jeudi le comité interpartis. Pour faire campagne, les opposants font, comme les initiants, appel à Guillaume Tell.

RISQUÉ, CHER, NUISIBLE

Leur affiche représente une thune sur laquelle le héros suisse se tient la tête. Une version en chocolat est également distribuée. Selon le comité, les recettes proposées pour lutter contre les bulles financières et les faillites bancaires sont risquées, chères et nuisibles.

L’obtention d’un crédit pour les PME ou d’une hypothèque pour les particuliers deviendrait plus difficile. Les conséquences seraient négatives pour l’économie suisse, les propriétaires de leur logement et les locataires. Comme les banques ne pourraient plus faire travailler l’argent des dépôts bancaires, les frais à charge de la clientèle augmenteraient.

La Banque nationale suisse (BNS) pourrait être appelée à mettre en circulation de l’argent sans dette via la Confédération ou les cantons, ou en l’attribuant directement aux citoyens. Pour le conseiller national Thomas Matter (UDC/ZH), cette distribution relève de la fable comme dans le conte de Grimm «les ducats tombés du ciel».

Et si elle devait se réaliser, la banque centrale serait mise sous pression et ne pourrait plus remplir son mandat de politique monétaire. Mieux vaux donc miser sur la concurrence entre banques, selon le Zurichois.

LE SYSTÈME FONCTIONNE

Comme le conseiller national Olivier Feller (PLR/VD), il estime que le système actuel fonctionne. Aujourd’hui, le moyen de paiement officiel en Suisse est le franc. Il est mis en circulation par la BNS sous la forme de billets de banque qui représentent environ 10% de la masse monétaire, a rappelé le Vaudois.

Le reste est constitué de monnaie scripturale. Elle est émise lorsque des banques commerciales émettent des crédits, par exemple un crédit hypothécaire pour construire un logement ou un crédit commercial pour créer une entreprise ou accompagner son développement.

L’initiative veut changer tout ça, dénonce le libéral-radical. Elle veut que ce soit la BNS qui émette toutes les formes de monnaie. Olivier Feller s’insurge aussi contre la possibilité offerte par l’initiative de déroger au principe de la liberté économique. Et de craindre l’instauration d’un système qui a prévalu dans l’ancien bloc de l’Est.

APPEL SOCIALISTE

La conseillère nationale Susanne Leutenegger Oberholzer (PS/BL) n’est pas tendre non plus avec l’initiative. Celle-ci n’empêchera pas les crises financières. Il sera nettement plus difficile pour les bas revenus et les basses fortunes d’économiser. Le pouvoir d’achat des employés et des rentiers pourrait diminuer.

La BNS, qui verrait son pouvoir renforcé, ne sera pas soumise à davantage de surveillance. Les tentations de faire marcher la planche à billets augmenteront.

La majorité des parlementaires socialistes ont voté contre l’initiative. L’assemblée des délégués s’est prononcée contre. Le PS genevois appelle en revanche à voter oui, tout comme les Verts de ce canton.

Pour Susanne Leutenegger Oberholzer, la garantie d’un système monétaire et financier stable passe par d’autres mesures que la «Monnaie pleine», comme un relèvement des fonds propres pour les banques trop grandes pour faire faillite.

CRITIQUE AUX INITIANTS

Le conseiller aux Etats Pirmin Bischof (PDC/SO) a quant à lui profité de l’occasion pour décocher une flèche contre les initiants. Il y a derrière eux un mouvement actif dans 25 pays, mais il n’y trouve que peu d’écho. Grâce à des soutiens étrangers, une initiative a pu être déposée en Suisse. Celle-ci pourrait alors servir de laboratoire.

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