L’Allemagne réussit son entrée sur le marché en essor des emprunts «verts»

AWP

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Arrivé tard sur le segment de la dette verte, le gouvernement allemand est en revanche pionnier en instituant un système de jumelage.

L’Allemagne a placé mercredi avec succès sa première émission de dette «verte» servant à financer des projets environnementaux, et pourrait devenir un émetteur de référence dans le domaine des obligations durables, en plein boom.

L’agence de la dette a récolté 6,5 milliards d’euros pour l’émission de cette obligation de l’Etat fédéral allemand, selon un communiqué.

L’emprunt est lancé sur 10 ans et offre un «coupon» (le taux d’intérêt annuel) nominal nul, à savoir 0%.

Autrement dit, ceux qui ont souscrit à l’opération acceptent de ne réaliser aucun gain en prêtant des fonds à l’Etat, et même d’en perdre si le rendement au final est négatif.

Une situation qui témoigne de la qualité de la «signature» de l’Etat allemand sur les marchés financiers, dans un contexte général de taux d’intérêt très bas avec la récession en cours liée à la pandémie.

Berlin veut à travers cet emprunt et d’autres à suivre «apporter une contribution importante au développement futur du marché de la finance durable», souligne Tammo Diemer, dirigeant au sein de la l’agence de la dette, cité dans ce communiqué.

Plus que prévu

Le pays, qui prévoyait au départ de récolter seulement 4 milliards d’euros, a décidé de crever ce plafond face la demande des investisseurs, qui a dépassé les 33 milliards d’euros.

L’Allemagne emboîte le pas de la Belgique, la France, l’Irlande, la Lituanie, les Pays-Bas et la Pologne qui ont tous déjà émis des obligations vertes souveraines, des instruments conçus pour financer des investissements en faveur de la transition énergétique et écologique.

La France avait décidé dès 2017 de jouer un rôle moteur en la matière dans la foulée des accords de Paris, en levant cette année-là 7 milliards d’euros sur le marché.

Berlin a identifié 12,7 milliards d’euros de dépenses qui seront en grande partie couvertes par son premier programme annuel d’émission de dette verte.

Ces dépenses s’inscrivent dans un vaste paquet climatique adopté fin 2019 et qui coûtera au gouvernement 54 milliards d’euros d’ici 2023 pour accélérer la réduction des émissions polluantes, en s’attaquant aussi bien aux transports qu’au logement et à l’agriculture.

Une autre émission de dette allemande «verte» est prévue au quatrième trimestre de l’année, d’une maturité de 5 ans, de sorte que l’Etat fédéral devrait émettre jusqu’à 11 milliards d’euros sur le marché sur ce seul compartiment.

L’Allemagne fait son entrée sur un segment de marché lui-même en plein boom: les émissions mondiales d’obligations vertes sont passées de 9,1 milliards de dollars en 2014, soit 0,2% du total des émissions d’obligations, à près de 205 milliards de dollars en 2019, soit 2,85% du total des émissions.

En 2020, leur volume d’émission pourrait atteindre un nouveau record à 225 milliards de dollars, selon une prévision de Moody’s qui a été révisée en hausse.

Jumelage innovant

Arrivé tard sur le segment de la dette verte, le gouvernement allemand est en revanche pionnier en instituant un système de jumelage.

Il permet à des investisseurs de se positionner à leur guise sur une obligation verte ou sur sa soeur jumelle conventionnelle, mais n’offrant pas le même rendement à terme.

Aussi, la dette verte émise ce jour affiche un prix légèrement supérieur à sa soeur-jumelle émise en juin dernier et qui se négocie sur le marché secondaire. Cela signifie que les investisseurs sont prêts à payer une «prime verte» pour acquérir ces nouveaux titres.

Cela «devrait contribuer à atténuer les inquiétudes des investisseurs concernant la liquidité des offres vertes», souligne Matthew Kuchtyak, analyste chez l’agence de notation Moody’s.

L’agence de la dette veut construire une courbe de rendement verte d’ici 2021, en proposant une variante verte pour tous les durées des emprunts obligataires du Bund s’étalant de deux à 30 ans.
 

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