Regard sur le luxe: croître de façon durable

Marie-Caroline Benoiston Fonta, NS Partners

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Quatre mots-clés pour de nouvelles perspectives de croissance: Engagement, Transparence, Traçabilité et Innovation.

Le luxe brille de tous ses feux

Les récentes publications d’Hermès, LVMH, Compagnie Financière Richemont ou encore Ferrari n'ont pas déçu les investisseurs, témoignant de leur engagement et quête constante de rentabilité. Selon le cabinet Bain & Company, pour l'année 2023, le marché du luxe a atteint EUR 1.5 billion à l'échelle mondiale, enregistrant une croissance solide de +8% à +10% par rapport à 2022, établissant ainsi un nouveau record pour l'industrie. Les prévisions estiment qu'il devrait continuer à croître pour atteindre EUR 2.5 billions d’ici 2030. Investir dans ces actifs a ainsi généré sur les cinq dernières années un retour sur investissement en euros de respectivement +363% pour Hermès, +322% pour Ferrari, +241% pour LVMH et +183% pour la Compagnie Financière Richemont, comparé à une hausse du marché de «seulement» +85% sur la même période (indice MSCI World). Les forces de ces acteurs, telles que les barrières à l'entrée élevées, une gestion efficace des marges, des bilans solides, un véritable ‘pricing power’, une adaptabilité et l'essor de la classe moyenne émergente, ne sont ainsi plus à démontrer.

Une industrie polluante

Après avoir examiné le potentiel financier de ces investissements, il est essentiel d'en envisager également la durabilité. Comment le secteur du luxe peut-il se positionner dans cette révolution? Pouvons-nous réellement envisager un secteur du luxe qui soit plus durable? Le luxe, presque par définition, se distingue de certaines industries très polluantes, comme l'énergie, les mines ou l’industrie lourde. Toutefois, certains de ses domaines ont de très mauvais bilans en termes d’atteinte à l’environnement. En se focalisant sur les biens de luxe personnels à l'échelle mondiale, représentant 24% des dépenses mondiales en articles de luxe, il est clair que l'industrie des accessoires et de l'habillement est un mauvais élève sur ce plan-là. Ainsi, plus de 8% des émissions de gaz à effet de serre d'origine humaine proviennent de la production et du transport de vêtements et de chaussures (Quantis). Cependant, il est essentiel de ne pas confondre le secteur du luxe avec celui de la ‘fast fashion’. Par sa nature même, l'achat d'un produit de luxe est plus réfléchi en termes de durabilité. Indépendamment de la collection, chaque pièce revêt une valeur sentimentale, favorisant ainsi sa transmission intergénérationnelle et, par conséquent, contribuant à réduire son impact environnemental.

Le principal défi à relever réside surtout dans les chaînes de production et de distribution. A cet égard, des initiatives visent à renforcer la traçabilité et la transparence dans ces chaînes.

La durabilité ancrée dans la tête du consommateur

Aujourd'hui, la durabilité joue un rôle crucial dans le processus d'achat, en particulier selon la génération. De fait, pour Bain & Company, les générations Y et Z représenteront d’ici 2030 entre 75% et 85% des achats sur le marché du luxe. La génération Z a clairement établi l'humain comme une priorité et il existe une forte volonté d'identification lors de l'achat, avec le souhait que les articles soient produits de manière éthique et respectueuse de l'environnement.

Quelles solutions?

Hormis sa participation à la COP28, le luxe fait preuve d’un engagement croissant envers la durabilité sociale et environnementale. Certaines grandes marques ont déjà pris des mesures significatives, comme l'arrêt de l'utilisation de la fourrure et la transparence sur l'origine des peaux exotiques. Elles explorent également des alternatives au cuir traditionnel, telles que le cuir végétal, de champignon ou de cactus. Ces initiatives, intégrées dans une économie circulaire, incluent notamment des plateformes de revente de tissus. De plus, le marché de la seconde main, apprécié par les jeunes générations, devrait connaître une croissance annuelle de +7,2% entre 2024 et 2032 (groupe IMARC). Cette approche offre aux consommateurs la possibilité d'acquérir des produits de luxe authentiques à des prix abordables, tout en prolongeant le cycle de vie de ces produits dans une économie circulaire.

Le principal défi à relever réside surtout dans les chaînes de production et de distribution. A cet égard, des initiatives telles qu’Aura Blockchain Consortium, lancée il y a près de trois ans, visent à renforcer la traçabilité et la transparence dans ces chaînes. De même, dans le domaine de la cosmétique, des initiatives telles que TRASCE (Traceability Alliance for Sustainable Cosmetics) surveillent l'ensemble du processus de production, des formules des produits de beauté jusqu'à leur emballage, pour accompagner les filières dans leur transition écologique. Aujourd'hui, les marques ont du mal à progresser si elles ne réduisent pas leur empreinte carbone, à la fois dans leur emballage et leur chaîne de production.

La transparence, la traçabilité et l'innovation dans la recherche d'alternatives sont désormais essentielles. En adoptant ces pratiques, le luxe peut non seulement maintenir son statut, mais aussi façonner un avenir durable. Cela renforce la réputation des marques, leur résilience à long terme et leur avantage concurrentiel. Le luxe est et restera un investissement attractif.

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