Après une longue absence, l’inflation pourrait faire son retour comme traitement contre les effets des massives injections monétaires.
Milliards, trilliards, … Il pleut des billets au cours de ce printemps 2020. Les gouvernements et les banques centrales ont mis en place des mesures jamais imaginées pour combattre la chute économique actuelle.
La dette gouvernementale américaine atteint désormais près de 25 trilliards de dollars… une dette qui va encore augmenter puisque la crise économique sera plus longue que la crise sanitaire.
En effet les entreprises réaliseront moins de profit, quand elles pourront encore en faire, ce qui annonce donc moins de rentrées fiscales, donc des déficits… à financer par de la dette. Et pour relancer l’économie, les gouvernements se raccrocheront à des doctrines keynésiennes pour financer des plans de relance. Le président Trump pourrait par exemple lancer un programme d’infrastructure de 2 trilliards de dollars. L’Europe envisage un «Green Deal» pour développer les énergies vertes. L’objectif de tous est de relancer l’économie pour éviter que les morts du coronavirus ne soient annonciateurs d’une crise plus profonde et plus longue.
Nombre de commentateurs s’inquiètent de l’ampleur des déficits à venir et de l’importance de la dette en pourcentage du PIB. En effet elle dépasse désormais 100% du PIB pour les Etats-Unis.
de larges dettes, qui se trouvent annulées par la dépréciation monétaire.»
Irving Fisher, L’illusion de la monnaie stable, 1927
Ce niveau de dette n’est pas nouveau. Au sortir de la deuxième guerre mondiale la dette US a atteint 120% du PIB. Une dette qui avait auparavant aussi connu des sauts et des périodes de réduction. Les guerres sont les principales explications à ces hausses du niveau de dette: guerre de sécession, WW1 et WW2. Seule la période récente ne constitue pas un conflit majeur même si la course aux armements ou la guerre contre le terrorisme (en Irak, Afghanistan, Libye, … ) ne constituent pas une période de paix à proprement parler…
Cette situation n’est pas uniquement l’apanage des Etats-Unis. Tous les pays, européens en particulier, ont eu à faire face à des périodes d’excès de dette.
Cette dette est-elle néfaste à la croissance? Possible. Les politiques d’austérité européennes se sont basées sur l’étude de Roggoff et Reinhart1 de 2010 qui montrait que dès que le niveau de dette dépassait 90% du PIB, la croissance était impactée négativement par la dette. Ceci a entraîné l’orthodoxie budgétaire européenne pour résoudre la crise des états. Cet article a fait l’objet de nombreuses critiques en raison … de problèmes excel dans les calculs effectués… des calculs qui sont bien moins négatifs si on les corrige2. Ainsi, pas si sûr que la croissance soit affectée.
La croissance qui est une des manières de réduire la dette. Si le PIB croît plus vite que le montant nominal de dette, alors le ratio dette / PIB se réduit. C’est la solution le plus naturelle et la plus saine. Et c’est pour cette raison que les gouvernements vont tenter de relancer la croissance par des programmes d’injections monétaires.
La deuxième solution est une solution radicale. C’est la spoliation. Malheureusement dans l’histoire, même récente avec Chypre, de nombreux gouvernements ont confisqué des avoirs pour réduire la dette. L’impôt ou le non remboursement permet «facilement» de revenir à la normale.
est l’oxygène du système. Regardez-le qui s’époumone.»
François Mitterrand, L’abeille et l’architecte, 1978
La troisième solution pour purger la dette est l’inflation. Un franc de dette demain sera moins lourd à porter qu’un franc de dette hier. Après le choc déflationniste consécutif au choc de demande, l’inflation pourrait être une solution. La solution «démocratique» qui serait la plus facile si l’on n’arrive pas à créer de la croissance.
L’inflation a elle aussi connu des cycles au cours des deux derniers siècles. En considérant une moyenne décennale de l’inflation aux Etats-Unis on peut constater que les périodes de forte inflation sont généralement contemporaines d’une grande dette. Ceci n’est pas anormal puisque les taux sont dépendants de la quantité de dette… sauf quand les banques centrales faussent les taux…
La dette fait partie du cycle économique. Son remboursement ne peut se faire que de trois manières: croissance, inflation ou spoliation. L’inflation est la plus facile à créer par les gouvernements en cas de financement direct par les banques centrales. Des banques centrales dont l’indépendance, principe fondateur, est en passe d’être abandonnée. L’émission de monnaie permet à court terme de résoudre les problèmes d’excès de dette. Mais le remède pourrait s’avérer pire que le mal avec les dépréciations monétaires.