Les arrière-pensées de Jerome Powell

Christopher Smart, Barings

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Découvrez ce que le président de la Fed pensait tout bas en lisant son discours tout haut.

En partant du postulat que la technologie permet désormais d'enregistrer ce qu'un orateur pense tandis qu’il déclame son discours, voici un enregistrement fictif de ce que pensait le président de la Fed, Jerome Powell, lorsqu’il annonçait la dernière hausse des taux.  

Un dialogue intérieur

«Bonjour.»
Salut!

«Mes collègues et moi sommes déterminés à ramener l'inflation à 2%. Nous avons à la fois les outils et la détermination nécessaires pour rétablir la stabilité des prix.»
Vous pensez qu’on n’en est pas capable, hein. Souvenez-vous de ça, l'avant-dernière chose qu’on veut, c’est déclencher une récession. Mais la dernière, c'est que le fantôme de Paul Volcker vienne nous hanter.

«La stabilité des prix relève de la responsabilité de la Réserve fédérale et constitue le fondement de notre économie. Sans stabilité des prix, l'économie ne fonctionne pas. Sans cette stabilité des prix, nous ne parviendrons pas à un marché du travail profitant à tous.»
Vous avez remarqué? J'ai dit «stabilité des prix» trois fois en trois phrases.

«Nous modifions délibérément l'orientation de notre politique pour atteindre un niveau qui sera suffisamment restrictif pour ramener l'inflation à 2%.»
Oui, 2%! Vous vous souvenez quand personne ne pensait qu'on pouvait dépasser 2%? C'était le bon vieux temps.  

«En outre, nous poursuivons une réduction significative de notre bilan.»
Non, on ne sait pas vraiment ce que ça fera, mais ça explose toujours lorsque les taux augmentent. Parfois c'est Orange County. Parfois c'est Lehman Brothers. Il faut juste attendre de voir ce que ça donne.

«La croissance des dépenses de consommation a ralenti par rapport au rythme de l'année dernière, en partie en raison de la baisse du revenu réel disponible et du resserrement des conditions financières. L'activité dans le secteur du logement s'est considérablement affaiblie, en grande partie à cause de la hausse des taux hypothécaires.»
Vous voyez, ça commence à marcher. Vive les taux hypothécaires au-dessus de 6%!

«Malgré le ralentissement de la croissance, le marché de l'emploi est resté tendu, avec un taux de chômage proche de son plus bas niveau en 50 ans, des offres d'emploi proches des plus hauts niveaux historiques et une croissance des salaires élevée.»
Vous vous moquez de moi? Le marché du travail est toujours sous tension! Je suis au courant des licenciements chez Goldman Sachs, mais les anecdotes de vos cocktails ne suffisent pas. Regardez toutes les offres d'emploi! Regardez la croissance des salaires!

«La projection médiane du SEP pour le taux de chômage passe à 4,4% à la fin de l'année prochaine, soit un demi-point de pourcentage de plus que dans les projections de juin. Au cours des trois prochaines années, le taux de chômage médian sera supérieur à l'estimation médiane de son niveau normal à long terme.»
Ce n’est pas qu'on veut tous les mettre au chômage, mais on ne sait pas faire autrement.  

«Bien que les prix de l'essence aient baissé au cours des derniers mois, ils restent bien au-dessus des niveaux de l'année précédente, en partie à cause de la guerre de la Russie contre l'Ukraine, qui a fait grimper les prix de l'énergie et des denrées alimentaires et a créé une pression supplémentaire à la hausse sur l'inflation.»
Vous avez regardé le discours délirant de Poutine? ça ne va pas aller en s'arrangeant.

«Malgré une inflation élevée, les anticipations d'inflation à plus long terme semblent bien ancrées, comme en témoignent un large éventail d'enquêtes auprès des ménages, des entreprises et des prévisionnistes, ainsi que les mesures des marchés financiers.»
Ceci s'adresse à vous, ceux qui souhaitez que le taux des fonds fédéraux dépasse les 5% ou plus. Les attentes à long terme sont sous contrôle, alors calmez-vous. Surtout vous, Larry Summers.  

«Mes collègues et moi sommes parfaitement conscients qu'une inflation élevée entraîne des difficultés considérables car elle érode le pouvoir d'achat, en particulier pour ceux qui sont le moins à même de faire face à la hausse des coûts des produits de première nécessité comme la nourriture, le logement et les transports.»  
Oui, nous aussi on va au supermarché et faisons le plein d'essence. Du moins, on connait des gens qui le font.

«Le rétablissement de la stabilité des prix nécessitera probablement le maintien d'une politique restrictive pendant un certain temps. Les données historiques mettent fortement en garde contre un assouplissement prématuré de la politique monétaire.»
Vous vous demandez tous quand on va commencer les coupes? On n’a même pas commencé à y penser.

«Nous prenons des mesures énergiques et rapides pour modérer la demande afin qu'elle s'aligne mieux sur l'offre.»
Je sais que tout le monde dit que la Fed ne peut rien faire contre les pénuries d'approvisionnement. Mais si on étrangle suffisamment la demande, il n'y aura plus de pénurie.

«Pour conclure, nous comprenons que nos actions affectent les communautés, les familles et les entreprises à travers le pays. Tout ce que nous faisons est au service de notre mission publique. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour atteindre nos objectifs d'emploi et de stabilité des prix.»  
Blah,blah,blah.

«Merci, j'attends vos questions.»
Je sais exactement ce que vous allez me demander.

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