Le retournement des marchés lié à Omicron souligne l’intérêt de la diversification

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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L’émergence du variant Omicron a fait resurgir la peur du Covid-19. Les premières observations suggèrent que les vaccins actuels pourraient s’avérer moins efficaces contre lui.

Dans le même temps, aux Etats-Unis, Jerome Powell a été reconduit pour quatre ans à la tête de la Réserve fédérale américaine (Fed). Un temps pressentie pour lui succéder, la gouverneure Lael Brainard, à la réputation plus conciliante, a été nommée vice-présidente. Par ailleurs, le procès-verbal de la réunion du comité FOMC de la Fed a montré que certains responsables sont favorables à une réduction plus rapide des achats d’obligations.

Enfin, les chiffres de l’emploi et de la consommation aux Etats-Unis se sont avérés très bons. Les inscriptions hebdomadaires au chômage sont tombées à 199 000, au plus bas depuis 1969. En octobre, la consommation des ménages a bondi de 1,3%, un taux deux fois plus élevé que celui enregistré en septembre. L’inflation sous-jacente (indice «core PCE») est ressortie à 4,1% en glissement annuel, au plus haut depuis 1991.

Comment interpréter la situation?

Il y a dix jours, l’inquiétude quant à l’impact potentiel du variant Omicron sur la croissance du PIB mondial a engendré une correction des actifs risqués. L’indice S&P 500 a chuté de 2,3%, sa plus forte baisse journalière depuis octobre 2020. Le rendement des bons du Trésor américain à dix ans a chuté de 16 points de base et l’indice VIX a bondi de 10 points, à 28. Pour  2022, les marchés ne tablent plus que sur 2,1 relèvements des taux directeurs de la Fed, contre 2,8 auparavant.

La Fed est toujours soucieuse de ne pas resserrer excessivement sa politique.

Après un rebond aussi fort des marchés, une période de volatilité n’est pas si surprenante. Il s’agit d’une piqûre de rappel quant à la nécessité de bien diversifier son portefeuille entre les différents marchés et secteurs.

Les investisseurs sont passés de la crainte d’un resserrement prématuré de la politique de la Fed à celle d’une nouvelle aggravation de la pandémie. Dans l’immédiat, la volatilité devrait perdurer, le temps que les marchés évaluent l’évolution des facteurs de risque. Point de situation.

1. Ne pas tirer de conclusions hâtives

Il est déconseillé aux investisseurs de tirer des conclusions prématurées sur la base de modestes échantillons de données, qui impliquent une marge d’erreur considérable. La Recherche d’UBS partage l’inquiétude du marché face à ce nouveau variant et suit de près la situation.

Néanmoins, compte tenu des informations disponibles à l’heure actuelle, le variant Omicron ne justifie pas une modification du scénario de base, à savoir que l’économie mondiale est sur la voie (tortueuse) d’une réouverture totale et qu’elle enregistrera une solide croissance.

2. La crainte du Covid-19 reprend le dessus

L’inquiétude quant à l’impact du Covid-19 sur les perspectives de croissance devrait prendre le pas sur la crainte d’un resserrement prématuré de la politique monétaire. Avant le jour férié de Thanksgiving, les investisseurs se focalisaient sur le possible resserrement des conditions financières en raison des chiffres élevés de l’inflation sous-jacente aux Etats-Unis qui ont suscité un regain d’orthodoxie chez certains responsables de la Fed.

Il est peu probable que le retrait des mesures de relance monétaire enraye le rebond des actions.

Ils se concentraient également sur la reconduction de Jerome Powell à la tête de la Fed au détriment de Lael Brainard, classée dans le camp des «colombes» et un temps pressentie pour lui succéder.

3. La Fed ne devrait pas se presser

La Fed est toujours soucieuse de ne pas resserrer excessivement sa politique. En outre, la reconduction de Jerome Powell (à supposer qu’elle soit confirmée par le Sénat) est un signe que cette approche graduelle restera certainement d’actualité, notamment si les incertitudes liées à la pandémie perdurent.

Dans le procès-verbal de la réunion du comité FOMC de la Fed, on peut lire qu’«un certain nombre de participants» préconisent toujours la patience à propos de la réduction des achats d’obligations et que le relèvement des taux directeurs n’est pas imminent.

Au quatrième trimestre, l’économie américaine a réaccéléré, à en juger par l’indicateur GDPNow de la Réserve fédérale d’Atlanta qui fait état d’une croissance du PIB de 8,6% en rythme annualisé. En outre, les résultats des entreprises sont solides. Dans ces conditions, il est peu probable que le retrait des mesures de relance monétaire enraye le rebond des actions.

4. L’appréciation du dollar

La normalisation graduelle de la politique monétaire devrait favoriser la poursuite de l’appréciation du dollar. L’indice du dollar américain a récemment cédé 0,7%, imitant les rendements obligataires. Néanmoins, la tendance à la divergence des politiques monétaires à travers le monde reste intacte. Elle est de nature à favoriser une poursuite de l’appréciation du dollar américain l’an prochain.

Les marchés les plus prometteurs sont ceux qui sont davantage susceptibles de profiter de la croissance mondiale.

Aux Etats-Unis, la bonne tenue des indicateurs économiques devrait permettre à la Fed de poursuivre la normalisation de sa politique, tandis que d’autres banques centrales, notamment la Banque centrale européenne, resteront accommodantes pendant un certain temps. La Recherche d’UBS est d’avis que l’EURUSD tombera à 1,10 d’ici la fin 2022.

Qu’est-ce que cela implique pour les investisseurs?

Il est déconseillé aux investisseurs de modifier dans la précipitation leur stratégie d’investissement. Au contraire, ils seraient bien avisés de rester exposés. La Recherche d’UBS préconise toujours d’accentuer l’exposition aux secteurs plus défensifs comme la santé, dont le bêta tourne autour de 0,8 et qui a été l’un des plus performants il y a une dizaine de jours. Lors des périodes de forte volatilité, l’exposition aux investissements alternatifs, dont les hedge funds qui sont susceptibles de surperformer lorsque les marchés se replient, peut également s’avérer judicieuse.

La Recherche d’UBS se positionne dans l’optique d’une poursuite de l’appréciation du dollar américain et d’autres monnaies adossées à des banques centrales plus orthodoxes (livre sterling, dollar néo-zélandais et couronne norvégienne), au détriment des monnaies adossées à des instituts d’émission dont la politique devrait rester laxiste (euro, yen et franc suisse).

Certes, on décèle encore une marge de progression pour les actions mondiales dans leur ensemble. Toutefois, les marchés les plus prometteurs sont ceux qui, à l’instar de la zone euro et du Japon, sont davantage susceptibles de profiter de la croissance mondiale et qui sont moins exposés au spectre d’un resserrement de la politique monétaire. L’optimisme reste aussi de mise à l’égard des secteurs de l’énergie et de la finance, malgré le récent accès de volatilité.

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