Le QE face à une «borne supérieure effective»?

William De Vijlder, BNP Paribas

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On craint une diminution de l’effet marginal des achats d’actifs par la BoJ, entraînant l’établissement d’une borne supérieure effective pour le QE. Avec des conséquences bien au-delà du Japon.

Alors que le bilan de la Banque du Japon atteint une taille équivalente au PIB du pays, l’inflation reste obstinément faible par rapport à l’objectif officiel. Des années d’assouplissement quantitatif (QE) ont provoqué des distorsions sur les marchés actions et pesé sur la liquidité du marché des JGB. On craint désormais une diminution de l’effet marginal des achats d’actifs par la BoJ, entraînant, de fait, l’établissement d’une borne supérieure effective pour le QE. Une telle évolution, si elle devait se confirmer, pourrait avoir une importance bien au-delà des frontières du Japon en influençant la perception de l’efficacité de futures vagues de QE.

L’effet de la marge de manœuvre budgétaire et monétaire est comparable à celui de l’airbag : quelle que soit la situation, il est rassurant de savoir qu’il se déclenchera en cas de choc. Dans beaucoup d’économies avancées, pour ne pas dire la plupart, le niveau élevé de la dette publique limite de manière très significative la marge de manœuvre budgétaire. Dans les années qui ont suivi la crise de 2008, les taux directeurs ont atteint la borne zéro. De plus, sous l’effet conjugué de la baisse du taux d’intérêt neutre, d’une reprise molle et d’une inflation toujours modérée, malgré le net repli du taux de chômage, la normalisation de la politique monétaire a été lente (Etats-Unis, Royaume-Uni) ou n’a même pas commencé (zone euro, Japon). En conséquence, le sommet cyclique des taux directeurs devrait être bien inférieur aux précédents pics, et la marge de manœuvre de la politique monétaire conventionnelle, plus limitée. A l’évidence, la banque centrale aura recours au forward guidance et au QE à l’heure de la prochaine récession. 

Concernant le QE, la taille de son bilan, au sommet du cycle, sera déterminante lors du ralentissement conjoncturel et on peut supposer que le programme se heurtera, tôt ou tard, à une borne supérieure effective: «effective» parce qu’au-delà de ce point, les achats d’actifs supplémentaires auront un effet négligeable et/ou en raison d’effets indésirables de plus en plus importants. Cette question est devenue particulièrement épineuse au Japon, où le bilan de la banque centrale est désormais d’une taille comparable au PIB. 

Concernant les effets secondaires, des études montrent que la liquidité du marché obligataire a diminué alors que les achats, par la BoJ, de fonds indiciels indexés sur le Nikkei (dans cet indice, le poids de chaque titre est lié à son cours de Bourse) ont entraîné des distorsions de valorisation par rapport à l’indice Topix (pondéré en fonction de la capitalisation boursière). Dans la mesure où le rééquilibrage du portefeuille est un important canal de transmission du QE, plus la taille du bilan est importante, plus les pressions à la baisse sur les primes de risque se renforcent, plus la valorisation des actifs augmente et plus l’inquiétude grandit à propos de l’impact que pourrait avoir, sur les prix des actifs, la décision de la banque centrale de réduire la taille de son bilan. Ces facteurs pourraient finir par peser sur l’efficacité macroéconomique des achats d’actifs en cours. Une évolution qui, si elle devait se confirmer, pourrait dépasser, par son importance, les frontières du Japon en influençant la perception de l’efficacité de futures vagues de QE.

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