L'armée des six «P»: progrès, pénurie, panne, panique, profit, pouvoir

Igor de Maack, Vitalépargne

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Le capitalisme est destiné logiquement à apporter le progrès et le confort au plus grand nombre. Mais parfois, ce progrès n’est pas sans risque non plus.

La reprise actuelle (PIB mondial attendu à +6% en 2021) ne se fait pas sans heurts. En effet, on observe des contraintes partout dans la chaîne de production et dans le processus logistique.

L’instant marché financier

L’inflation devient un sujet préoccupant car quoiqu’elle soit présentée temporaire, elle commence à durer. Les pénuries d’équipements et de maind’œuvre conduisent à une distorsion entre l’offre et la demande ainsi qu’à une pression sur les stocks. À titre d’exemple, McDonald’s a annoncé que ses charges salariales allaient progresser de 10% cette année. Aux États-Unis, certains ports (Los Angeles, Long Beach) ont décidé d’opérer 24h/24, 7j/7, pour accentuer les cadences de chargement et déchargement des marchandises. Tant que le pétrole reste à ces niveaux (84 dollars le baril), ce sera difficile d’avoir un indice d’inflation qui revient à son niveau pré-crise.

Les banques centrales vont d’ailleurs devoir intervenir pour prendre en compte ce mouvement inflationniste. La Fed devrait annoncer la semaine prochaine l’accélération de la fin de son programme d’achat d’actifs. La Banque du Canada a été la première à opérer un virage restrictif en avançant son calendrier de hausse des taux d’intérêt et en arrêtant son programme d’achat d’actifs. La BCE a, elle, plutôt repoussé à décembre sa décision sur ses mesures d’accompagnement monétaire.

Les pénuries sont aussi accompagnées par des pannes géantes inexpliquées. Plusieurs interruptions de service sur les applications de messagerie (WhatsApp, Messenger) sont survenues. Ces pannes peuvent créer des situations de panique chez certains investisseurs. OVH, la société française spécialiste du Cloud, a, elle aussi, essuyé une panne juste avant son introduction en bourse qu’elle a pourtant bien pu mener à son terme.

Cette ambiance de goulot d’étranglement et de pression inflationniste peut parfois créer de la défiance sur les actifs financiers. Cela se confirme notamment chaque fois que la Chine reconfine une ville en raison de la résurgence de la Covid-19 ou annonce une probable faillite immobilière.

Heureusement, la saison de résultats aux neuf mois a démarré sous de bons hospices (L’Oreal, Seb, Stellantis, Capgemini). Elle nous enseigne aussi que le capitalisme est aussi et peut-être surtout une affaire de profit. Tant que la création de valeur se matérialisera dans les comptes des sociétés, les marchés actions seront portés par des flux acheteurs. Enfin, le capitalisme s’avère une histoire de pouvoir. Les phénomènes Facebook et Google ont échappé à leurs concepteurs et le pouvoir, dont ces entreprises bénéficient, commence à poser des questions légitimes chez les responsables politiques comme chez les individus.

Les grands du monde technologique sont fortement critiqués par les lanceurs d’alertes. «Le pouvoir corrompt et le pouvoir absolu corrompt absolument» écrivait Lord Acton, historien et philosophe anglais du XIXe siècle, une phrase à méditer pour toutes celles et ceux qui détiennent le pouvoir à la tête de gouvernements ou de méga-entreprises.

La valeur du mois: L’ORÉAL

La reprise profite aux valeurs de biens de consommation discrétionnaires et de produits de beauté. Ainsi, par rapport à la même période de 2019, le chiffre d’affaires de l’Oréal a augmenté de 14,9% en données comparables, après une hausse de 8,4% au deuxième trimestre. Toutes les divisions et géographies sont en progrès notable, particulièrement, l’Amérique du Nord et l’Asie du Nord (+23%).

Les consommateurs ont ainsi rattrapé leurs achats manqués de produits cosmétiques pendant les confinements sûrement parce qu’ils le valent bien…

Le mot de la fin

Le 28 octobre 1860 naissait à Mikage Jigoro Kano, fondateur du judo, l’art martial japonais dérivé du jiu-jitsu et le plus répandu dans le monde. Les marchés financiers lui préfèreront sûrement une autre icône nippone: le Shiba Inu, chien de race de l’archipel et aussi effigie d’une des cryptomonnaies la plus en vogue en ce moment (+650% en octobre).

Espérons que nous n’aurons pas bientôt à célébrer l’avènement d’une autre crypto-monnaie dont le symbole serait la caridina multidentata, une crevette d’eau douce japonaise qui ravit les aquariophiles.

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