Efficacité de la finance durable: trois cas concrets sous la loupe

Anne-Marie Kortmoeller, Geneva Sustainable Finance

2 minutes de lecture

Les émetteurs d’obligations vertes ne font pas que ce que les sceptiques appellent du «greenwashing». Bien au contraire!

Incontestablement, la finance durable est un secteur en constante progression. Lors du 4e Geneva Summit on Sustainable Finance (GSSF), rendez-vous consacré à la finance durable organisé par le Geneva Finance Research Institute, Sustainable Finance Geneva et le Swiss Finance Institute, des chercheurs et des praticiens de la finance, sont venus échanger leurs vues sur cette industrie et ses évolutions. Parmi ces interventions, retenons trois constats aussi hétérogènes qu’intéressants: les obligations vertes sont bel et bien efficaces; les états doivent adapter leurs lois afin de soutenir le développement durable au niveau mondial; le mobile banking entraine des répercussions concrètes.

Vive les green bonds!

Certains sont tentés de remettre en cause l’efficacité des obligations vertes. Cependant, l’étude de l’Américaine Caroline Flammer, professeure associée à l’Université de Boston vient de leur donner tort. Lors de ses recherches, elle s’est penchée sur près de 370 emprunts dits «green bonds», soit des obligations qui permettent de financer des projets environnementaux de manière ciblée et transparente. Les nombreux résultats qu’elle a obtenus démontrent que les émetteurs d’obligations vertes ne font pas que ce que les sceptiques appellent du «greenwashing». Bien au contraire! Leurs impacts sont multiples et parfois même très importants. Ainsi, elle a constaté une réduction moyenne de 27,7% d’émissions de CO2 par million de dollars investi sur les projets financés par ce type d’obligations. Un résultat sans appel qui a, entre autres, permis à la chercheuse américaine de remporter le prix SFG de l’étude la plus innovante du GSSF 2018 (à consulter ici).

La technologie alliée à la finance peut avoir un impact concret
sur la vie quotidienne de la population.
Quand la pollution s’exporte facilement

Que l’état et les lois qu’il établit aient un impact sur l’environnement de son pays ne fait aucun doute. Le corolaire est que plus ce même état légifère, notamment sur les lois antipollution, plus l’impact sur l’environnement au niveau mondial est négatif. C’est le constat de Michael Viehs, directeur associé chez Hermes Investment Management et auteur d’une étude intitulée «Exporting Pollution» (à consulter ici). Il a remarqué que les sociétés industrielles choisissaient d’exporter leurs opérations polluantes plutôt que de supporter les coûts liés à leur recyclage. Et qu’elles étaient «aidées» par les règles environnementales très faibles imposées par certains pays qui voyaient dans ces «importations de pollution» une manière d’augmenter leurs bénéfices (investissement, croissance du PIB, etc.) à court terme.

Les impacts concrets du mobile banking

Lors de ce sommet dédié à la finance durable, l’entrepreneur Nick Hughes a prouvé – s’il était encore nécessaire – que la technologie alliée à la finance pouvait, au-delà d’engranger des bénéfices, avoir un impact concret sur la vie quotidienne de la population. Et plus particulièrement sur celle des pays en voie de développement. En effet, Nick Hughes, qui a lancé en 2007 la société de paiement par téléphone mobile M-Pesa, a ouvert la voie à d’autres innovations. Ce visionnaire propose désormais aux ménages kenyans à faibles revenus d’obtenir de l’électricité grâce à des installations solaires à domicile, payées via un transfert par téléphonie mobile. Ceci permet aux familles d’avoir recours à des sources d’énergie sûres et régulières, quand bien souvent elles optaient par défaut pour de l’énergie dangereuse pour la santé et l’environnement à l’instar du kérosène. M-Kopa, la société de Nick Hugues propose aux ménages, après un premier paiement initial modeste, de s’acquitter de quelques centimes par jour en fonction de leur consommation. Après une année l’installation leurs appartient. Concrètement, certains enfants en profitent pour étudier grâce à la lumière et ainsi accroître leur niveau d’éducation quand d’autres, pour accroître leurs revenus, mettent à disposition de leurs voisins de l’électricité moyennant un coût de location. Dans l’un ou l’autre cas, les développements technologiques de M-Kopa servent à accroître l’autonomie financière de la population locale. Les applications de ces paiements digitaux ont encore davantage de potentiels.  D’autres pays, d’autres problématiques pourraient trouver une solution concrète grâce à l’avancée de la technologie selon le fondateur de M-Kopa.

Genève, où la finance rencontre l’impact

Au terme de cette journée de réflexion, nous sommes convaincus que les collaborations entre les différents secteurs sont indispensables au développement de la finance durable.

Ensemble les acteurs de la Genève internationale, du secteur académique et de la place financière peuvent jouer un rôle primordial dans le financement des objectifs du Développement Durable (ODD ou SDGs en anglais) lancés en 2015 par l’ONU.