Petit guide du marché des actifs numériques. Avec Fiorenzo Manganiello (photo) de Lian Group et Pierre-Emmanuel Besnard.
Un genre nouveau d’actifs enregistrés sur la blockchain est apparu sous l’acronyme de NFT (pour jetons non fongibles en français). Ces objets numériques sont cotés en crypto devises, pour la plupart du temps en Ethereum ou en Solana, dépendamment de la plateforme sur laquelle ils sont proposés. On les divise entre les œuvres d’art numériques sous différents supports (GIF, JPEG, etc), l’immobilier virtuel (par exemple dans un métavers, un phénomène qui fait beaucoup parler de lui), ou encore des cartes de sport à collectionner. Selon une étude de Chainalysis mentionnée dans le Financial Times, les amateurs d’actifs virtuels ont déboursé 40 milliards de dollars en 2021 pour acquérir des NFT.
Dans ce premier volet, nous survolerons les caractéristiques de ce jeune marché. Dans un second, nous aborderons différentes méthodes pour y accéder et des exemples de places de marché pour débuter les investissements, en gardant à l’esprit que cet univers généralement réservé à des connaisseurs comporte certains pièges. Décryptage avec Fiorenzo Manganiello, co-fondateur de Lian Group, et Pierre-Emmanuel Besnard, directeur des investissements.
Similairement aux monnaies virtuelles, les NFT sont des actifs excessivement volatils. Toujours exprimés en monnaies virtuelles, leur valorisation dépend également du cours des crypto devises sur lesquelles se basent les places de marché électronique. «Un individu avec une vue haussière sur la devise Solana, pourra en investissant dans une œuvre d’art sur sa plateforme, espérer gagner une plus-value sur l’œuvre ainsi que sur l’appréciation de la devise», explique Pierre-Emmanuel Besnard.
«Nombreux sont les projets artistiques donc la valeur chute peu de temps après leur sortie, pour ne plus jamais remonter ensuite», avertit Fiorenzo Manganiello. Mais d’après son expérience, les œuvres uniques ou les collections d’artistes jouissant d’une belle notoriété seront plus résilientes que les pièces de créateurs inconnus.
Parce que le marché n’est pas régulé et que la barrière technologique n’est pas très haute, chacun peut librement lancer sa propre collection de NFTs. D’ailleurs, des dizaines de collections sortent chaque jour, mais toutes ne rencontreront pas le même succès. Beaucoup d’entre elles, qui ne maintiendront pas une valeur de marché stable, seront vite oubliées.
Les plateformes d’échange abondent d’indications utiles pour déterminer la juste valeur d’une œuvre. Les plus populaires et les mieux suivies sont naturellement les mieux cotées, mais d’autres critères rentrent aussi en compte lors de l’acquisition d’une pièce. «Je m’intéresse à la liquidité et la rareté de la collection, ainsi qu’aux attributs d’un tirage», explique Fiorenzo Manganiello qui se méfie des volumes inexistants, car il sera difficile de revendre une pièce peu liquide. Les volumes traités sur une collection de qualité seront généralement conséquents.
La rareté d’un tirage d’une collection comme celle des singes «Bored Ape Yatch club» définit sa valorisation car toutes les pièces ne sont pas égales. Il y a généralement une différence notoire entre la moins chère (le prix plancher) et les plus rares de la collection. «Les plateformes d’échange affichent l’occurrence des attributs à l’intérieur d’une même collection comme la couleur du fond ou les accessoires. Plus les attributs sont rares, plus le prix de la pièce sera élevé», résume Fiorenzo Manganiello.
La chaîne de bloc qui enregistre toutes les transactions effectuées (c’est le fameux concept de traçabilité), permet de retracer l’évolution des prix afin d’identifier un objet brusquement survalorisé, sans raison valable.
Les arnaques sont courantes et un débutant (ou un distrait) peut facilement se faire duper par des copies ingénieusement inspirées des originaux. «Certains faussaires modifient uniquement une lettre ou un mot du titre», prévient Fiorenzo Manganiello. Le nom de l’éditeur ainsi que les volumes traités restent de bons indicateurs d’authenticité.
Mieux vaut-il acquérir des œuvres d’art uniques et des tirages d’une collection (généralement entre 5000 et 10'000 exemplaires) dont chacun possède des attributs distincts? Se pose en premier la question du budget. «Les pièces uniques coûtent plus cher. Alors qu’une collection de 100'000 tirages à CHF 100 la pièce équivaut à un total de 10 millions qui ouvrira l’opportunité de créer une communauté qui soutiendra la collection», explique Pierre-Emmanuel Besnard. L’influence du groupe, mais aussi du nombre de followers suivant l’artiste (en général proportionnel à sa notoriété), sont des éléments incontournables pour estimer le potentiel de valorisation d’une création. Ainsi, dans le cas d’une composition isolée, «un Basquiat ou une photo de Justin Bieber aura plus de succès que le NTF d’un illustre inconnu», souligne Fiorenzo Manganiello.
C’est le Bloomberg des NFT. Ce site agrège les volumes des multiples places de marché (d’art, de jeu ou de cartes de collection) pour identifier les tendances qu’il renseigne selon le nom de l’œuvre, le type de NFT, la technologie sous-jacente de la plateforme et l’activité sur la pièce. «Nous y trouvons par exemple le top 20 des dernières 24 heures et aujourd’hui nous pouvons constater que Meebits est très demandé», constate Pierre-Emmanuel Besnard.
Dans un deuxième volet, nous aborderons les différentes stratégies pour accéder au marché des NFT ainsi que des exemples de places de marché en ligne pour débuter les investissements.