2022, la chute des plateformes crypto à risque

Manuel Valente, Coinhouse

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Chronique blockchain. L’interdépendance des différents acteurs a clairement fragilisé le système, et beaucoup ont tenté de dissimuler les pertes qu’ils avaient pu subir.

Depuis l’avènement du marché des crypto-actifs, chaque année a été marquée par de nombreux événements, mais il est toujours possible de mettre en avant un fait marquant pour chacune d’entre elles. Ainsi, l’année 2021 était clairement l’année de l’explosion de l’utilisation des NFT, et 2020 celle de la finance décentralisée. La tendance la plus marquante de l’année 2022 est très clairement la faillite de plusieurs plateformes centralisées spécialisées dans les crypto-actifs, avec des retentissements majeurs dont les effets ne sont pas encore tous connus.

Il est loin le temps où les plateformes en crypto-actifs se contentaient de conserver les fonds de leurs clients. Depuis deux ans, elles cherchent quasiment toutes à fournir du rendement sur ces placements. Et ce n’est pas étonnant, dans la mesure où elles répliquent les modèles existants dans la finance traditionnelle, puisqu’il est bien plus intéressant de proposer une rémunération sur un placement. Pour ce faire, elles ont notamment utilisé des systèmes de crédit, consistant à prêter les fonds en échange d’un taux d’intérêt.

La faillite de FTX met en danger critique d’autres acteurs sur le marché, en particulier Genesis, l’institutionnel Grayscale et leur maison-mère DCG.

Le problème fondamental est que le marché des crypto-actifs est encore jeune, avec des liquidités limitées et un nombre d’acteurs plutôt réduit. Beaucoup de ces plateformes en sont donc venues à se prêter mutuellement des fonds pour essayer d’obtenir les meilleurs rendements.

Tant que le marché était à la hausse, c’est-à-dire jusqu’au mois de novembre 2021, tout allait bien. Mais avec un marché parti à la baisse, des valorisations en fort recul, et des investisseurs réduisant fortement leurs expositions, les ennuis se sont profilés.

Les problèmes ont véritablement commencé au mois de mai, avec l’échec du projet Terra, dont la valorisation avoisinait les 40 milliards de dollars. Certaines plateformes utilisaient ce protocole pour générer du rendement, et la disparition du projet a causé des faillites en cascade, notamment les entreprises Celsius et Three Arrows Capital.

L’interdépendance des différents acteurs a clairement fragilisé le système, et beaucoup ont tenté de dissimuler les pertes qu’ils avaient pu subir. Il a suffi d’une information mineure sur les comptes de FTX pour que cette plateforme, la troisième en termes de volume échangé sur le marché, perde la confiance de ses clients et s’effondre. Dans ce cas précis, il est avéré qu’il y a eu des fraudes dans le management, et l’affaire se terminera devant la justice.

Il est à noter que les plateformes décentralisées n’ont pas ou très peu été affectées.

Mais la faillite de FTX met en danger critique d’autres acteurs sur le marché, en particulier Genesis, l’institutionnel Grayscale et leur maison-mère DCG. On assiste à une véritable cascade de dominos, principalement à cause des positions prises mutuellement par les différentes entreprises sur le marché.

Difficile de dire si les faillites vont s’arrêter là ou si d’autres acteurs seront entraînés dans la chute. Ces inquiétudes ont bien entendu entraîné une très forte baisse sur les cours du marché et la confiance des investisseurs est au plus bas, les poussant à retirer leurs fonds pour les conserver eux-mêmes, ce qui empire d’autant la situation.

Les leçons à retenir de cette situation sont multiples. Tout d’abord, il est à noter que les plateformes décentralisées n’ont pas ou très peu été affectées. En effet, leur mode de fonctionnement automatisé ne permet pas de prendre de risques avec les fonds et garantit une sur-collatéralisation de l’ensemble des positions. Il est à parier que la confiance dans ces dernières en sortira renforcée.

En ce qui concerne les plateformes centralisées, il nous semble qu’une régulation de leur activité est devenue indispensable pour éviter les prises de risques trop importantes sur le marché. Idéalement, un système d’autorégulation devrait être mis en place pour que les acteurs les plus sérieux puissent continuer leur activité et offrir à leurs clients les services attendus. Des efforts de transparence, des chartes de déontologie, des audits externes et l’affichage des réserves en temps réel sont tout autant d'éléments nécessaires au rétablissement de la confiance.

A défaut, les Etats devront prendre le problème à bras le corps et imposer des règles strictes de fonctionnement semblables à celles qui existent dans les institutions financières classiques pour protéger les investisseurs.

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