Sociétés anonymes: les sénateurs refusent d’accorder certains privilèges

AWP

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Les Chambres ne se rapprochent que lentement sur la réforme qui doit moderniser le cadre légal des sociétés anonymes. Il leur reste une vingtaine de divergences à éliminer.

Les sociétés anonymes ne devraient pas pouvoir avantager certains actionnaires par des actions dites de loyauté. Les sénateurs ont confirmé mercredi leur opposition à cette faveur voulue par la Chambre du peuple.

Ils l’avaient déjà refusé en décembre 2018 au motif qu’ils voulaient d’abord disposer d’une étude sur les effets d’un tel dispositif. Le Conseil fédéral avait aussi appelé à attendre. Le National a insisté en décembre 2019 en invoquant la nécessité de favoriser les relations de confiance dans la durée. En vain.

Les Chambres ne se rapprochent que lentement sur la réforme qui doit moderniser le cadre légal des sociétés anonymes. Il leur reste une vingtaine de divergences à éliminer.

Pas question pour les sénateurs d’autoriser les entreprises à fixer le capital-actions en monnaie étrangère. Il faut protéger les créanciers, a justifié Beat Rieder (PDC/VS) au nom de la commission. Par 22 voix contre 19, les sénateurs ont même refusé d’ouvrir la porte aux seuls dollars américains ou euros, un compromis avec le National proposé par Ruedi Noser (PLR/ZH).

Le choix est un peu arbitraire, a critiqué la ministre de justice et police Karin Keller-Sutter. Mais il vaut mieux qu’une interdiction complète. Les besoins de la plupart des sociétés visées seraient satisfaits. Le droit comptable permet déjà l’utilisation de monnaies étrangères, a rappelé la ministre libérale-radicale. Sans succès.

Pas à l’étranger

Les sociétés ne devraient pas non plus pouvoir organiser une assemblée générale à l’étranger, a confirmé la majorité par 34 voix contre 8. Il faut éviter les abus, a expliqué M.Rieder. Ces séances sont déjà possibles, pourquoi réduire la liberté des entreprises, s’est insurgé Andrea Caroni (PLR/AR) avec le soutien du Conseil fédéral.

«La Suisse ne doit pas devenir un pavillon de complaisance du droit privé», a justifié Christian Levrat (PS/FR). Il faut maintenir un lien entre le pays et les sociétés et insérer les assemblées générales dans le tissu économique local.

Aucun actionnaire ne devrait par ailleurs pouvoir se faire représenter par un membre d’un organe de la société. Par 25 voix contre 18, les sénateurs ont refusé de limiter cette règle aux sociétés cotées en bourse comme le souhaite le National.

L’idée du projet était aussi de simplifier la vie des sociétés anonymes, a objecté Philippe Bauer (PLR/NE). Laisser cette possibilité de représentation aux petites entreprises ne mettra pas en péril les droits des actionnaires, a-t-il défendu. Le Conseil fédéral s’y est opposé, c’est contraire aux principes de la gouvernance moderne, a justifié Karin Keller-Sutter.

Instructions confidentielles

Dans les sociétés cotées en bourse, le représentant indépendant qui pourra représenter les actionnaires devra traiter leurs instructions de manière confidentielle jusqu’à l’assemblée générale. Les sénateurs ont tacitement maintenu cette exigence contestée par la Chambre du peuple.

Les droits des actionnaires très minoritaires de sociétés cotées en bourse seront en revanche définitivement renforcés. Il leur suffira de détenir 0,5% du capital-actions au lieu de 3% pour faire inscrire un objet à l’ordre du jour d’une assemblée générale.

Rémunérations abusives

Les Chambres restent divisées sur le volet visant à ancrer dans la loi des exigences de l’initiative contre les rémunérations abusives (initiative Minder). Les sénateurs ont maintenu tacitement que le rapport de rémunération devait préciser les activités exercées par les membres des instances dirigeantes auprès d’autres entreprises.

Ils tiennent aussi à interdire les rémunérations versées en cas de changement de contrôle et dans le cadre de conventions d’annulation. Idem pour les indemnités liées à une précédente activité au sein d’un organe de la société qui ne sont pas conformes à la pratique du marché. Ces parachutes dorés sont à prescrire, a commenté l’indépendant Thomas Minder (SH).

Le dossier retourne dans le camp du National.

Dans la foulée, les sénateurs ont transmis par 37 voix contre 6 au Conseil fédéral une motion du National visant à changer l’acronyme „SCoop», abréviation de la société coopérative, considéré comme malheureux et source de confusion. «C’est un non-problème. Seules deux sociétés utilisent l’abréviation, la bureaucratie liée à son changement ne vaut pas la peine», s’est insurgé Carlo Sommaruga (PS/GE).

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