Les trustees dans l’univers de la réglementation prudentielle

Frédérique Bensahel, FBT Avocats

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Alors que la Suisse envisage de légiférer sur les trusts, les trustees professionnels entrent dans l’univers de la réglementation prudentielle.

La nouvelle loi sur les établissements financiers (LEFin), dont l’entrée en vigueur est attendue le 1er janvier 2020, introduit l’obligation nouvelle pour les trustees d’obtenir une autorisation de la FINMA pour pouvoir exercer ou continuer à exercer leur activité à titre professionnel. Une fois autorisés, les trustees seront soumis à une surveillance prudentielle. Si les banques et les maisons de titres seront dispensées de l’obligation d’obtenir une autorisation de trustee, tel ne sera pas le cas des gérants de fortune indépendants dont la nouvelle licence de gestionnaire de fortune ne couvrira pas l’activité de trustee.

La LEFin définit le trustee comme celui qui gère ou dispose d’un patrimoine distinct en faveur d’un bénéficiaire ou dans un but déterminé, sur la base de l’acte constitutif d’un trust au sens de la Convention de la Haye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance. Tous les trustees professionnels, soit ceux répondant aux critères d’assujettissement à la loi sur le blanchiment d’argent (LBA), sont concernés par la nouvelle réglementation.

La loi permet au trustee de fournir des services de conseil en placement,
d’analyse de portefeuille et d’offre d’instruments financiers.

Les trustees étrangers seront également visés dans la mesure où ils déploient leur activité en Suisse sous la forme d’une succursale ou d’une représentation, même non inscrite auprès d’un registre du commerce cantonal. Le trustee étranger qui emploie en Suisse de manière permanente une personne exerçant l’activité de trustee peut être assujetti à l’exigence d’une autorisation. Tel est également le cas du trustee étranger qui emploie en Suisse une personne qui lui transmet des mandats ou qui le représente à des fins publicitaires ou même dans d’autres buts.  

Le terme de «trustee» devient un nom protégé si bien que seuls les trustees autorisés pourront faire figurer la mention de «trustee» dans leur raison sociale, leur but social ou dans leur documentation professionnelle.

A côté de l’activité traditionnelle de trustee, la loi permet par ailleurs au trustee de fournir des services de conseil en placement, d’analyse de portefeuille et d’offre d’instruments financiers, ainsi que d’autres services non réglementés comme des opérations fiduciaires, du conseil en gestion d’entreprise ou du conseil fiscal.

Les trustees pourront exercer leur activité sous la forme d’une entreprise individuelle, d’une société commerciale (comme une société anonyme ou une Sàrl) ou d’une société coopérative, lesquelles devront être inscrites au registre du commerce. La LEFin requiert un capital de 100'000 francs et des fonds propres s’élevant à au moins un quart des coûts annuels fixes du trustee. L’assurance responsabilité civile professionnelle n’est pas obligatoire mais peut permettre de réduire les exigences de fonds propres.

Il est recommandé aux trustees étrangers déployant une activité
en Suisse d’évaluer la question de leur assujettissement à la LEFin.

La direction du trustee doit être composée d’au moins deux personnes qualifiées, à moins que le trustee puisse apporter la garantie de la poursuite de l’activité. Par ailleurs, les trustees doivent disposer de fonctions de gestion des risques, compliance et contrôle interne aux fins de garantir, notamment, le respect des prescriptions légales. Les acteurs d’une certaine taille devront employer à la fonction de gestion des risques et de contrôle interne des personnes qui ne sont pas impliquées dans les activités qu’elles surveillent. La LEFin offre néanmoins des possibilités d’externalisation de certaines fonctions.

Les trustees déjà en exercice au moment de l’entrée en vigueur de la LEFin devront s’annoncer à la FINMA le 30 juin 2020 au plus tard et déposer une demande d’autorisation avant le 31 décembre 2022. Pour autant que ces deux conditions soient remplies, ils pourront continuer à exercer leur activité dans l’attente d’une autorisation.  

La mise en œuvre des nouvelles exigences réglementaires imposées aux trustees devra être implémentée au plus tard au moment du dépôt de la requête d’autorisation auprès de la FINMA. La taille, le degré d’organisation et le volume d’affaires des trustees vont déterminer la viabilité de certains d’entre eux. L’évaluation de leur organisation au regard des nouvelles exigences pourra dicter la nécessité de l’étoffer, voire pour certains de joindre leurs forces à celles d’autres acteurs.

Il est recommandé aux trustees étrangers déployant une activité en Suisse d’évaluer la question de leur assujettissement à la LEFin. Toute violation à l’obligation d’obtenir une autorisation est en effet sanctionnée par des dispositions pénales. Les trustees étrangers soumis à la LEFin doivent s’annoncer à la FINMA et déposer leur demande d’autorisation dans les mêmes délais que les trustees suisses.