La pénalisation fiscale des couples mariés repasse aux mains des Chambres

AWP

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Après l’invalidation de la votation sur l’initiative du PDC par le Tribunal fédéral, le Conseil fédéral a décidé vendredi de lui transmettre un message complémentaire.

Le Parlement reprend la main sur la pénalisation fiscale du mariage. Après l’invalidation de la votation sur l’initiative du PDC par le Tribunal fédéral, le Conseil fédéral a décidé vendredi de lui transmettre un message complémentaire.

Le peuple aurait pu revoter tout de suite, mais le Parlement a demandé à être associé au processus, a justifié devant la presse le chancelier de la Confédération Walter Thurnherr. La votation sur l’initiative sera répétée au plus tard le 27 septembre 2020. A moins que le texte soit retiré avant que le Conseil fédéral en fixe la date.

Contre-projet

Le processus retenu permettra aux Chambres fédérales de réexaminer sur le fond les objectifs visés par l’initiative et peut-être de préparer un contre-projet, a expliqué M. Thurnherr.

Le Département des finances devra soumettre le message additionnel au Conseil fédéral après la pause estivale. Le texte reviendra sur les objectifs de l’initiative et exposera les mesures prises pour éviter de nouvelles erreurs. Le Département de l’intérieur sera associé aux travaux pour éclaircir les aspects juridiques touchant les assurances sociales.

Le message s’ajoutera au projet remis l’an dernier et en suspens devant la commission de l’économie du Conseil des Etats.

Celui-ci prévoit que l’impôt fédéral direct serait d’abord calculé selon le barème actuel de la taxation commune, puis comme s’il s’agissait de deux concubins. Au final, la facture la moins lourde serait appliquée, ce qui éliminerait une éventuelle pénalisation des couples mariés. Les concubins qui ont des enfants seraient en revanche davantage taxés.

Contrairement à l’initiative populaire, le projet ne concerne pas les assurances sociales. Mais le Parlement pourrait y revenir et transformer ces travaux en contre-projet «de facto», a estimé le chancelier. Pour le PDC, le gouvernement a pris la bonne décision, peuple et Parlement doivent rediscuter de la pénalisation du mariage sur la base de chiffres corrects.

Texte du PDC

Le texte du PDC vise à lutter contre la discrimination fiscale des couples mariés. La forte progression de l’impôt fédéral direct (IFD) désavantage les époux par rapport aux concubins, qui ne sont pas imposés en commun. La différence admissible a été fixée par le Tribunal fédéral à 10% en 1984.

L’initiative souhaite aussi éliminer les inégalités dans les assurances sociales. Cela concernerait par exemple les rentes AVS. Les époux retraités ont pour l’instant droit à une rente commune plafonnée à 150% alors que les concubins reçoivent chacun leur rente pleine.

Enfin, le texte précise que le mariage est l’union durable d’un homme et d’une femme, ce qui irait à l’encontre du projet en discussion sur l’ouverture du mariage aux couples homosexuels. A ce sujet, le PDC relève vendredi qu’il soutient majoritairement le projet de loi sur le mariage pour tous. «Mais le principal objectif reste la suppression de la pénalisation du mariage.»

Erreur grossière

La votation sur l’initiative de PDC a été annulée par le Tribunal fédéral en raison d’une erreur sur le nombre de couples concernés. Le gouvernement avait annoncé que seuls quelque 80’000 couples mariés à deux revenus étaient pénalisés par le système actuel. Le chiffre réel dévoilé deux ans plus tard s’élève à 454’000 couples. L’invalidation est une première dans l’histoire constitutionnelle suisse.

Pour éviter un nouveau fiasco, le Conseil fédéral a adopté des mesures pour améliorer la fiabilité des données. Ce n’est pas la première fois que des problèmes sont constatés, a justifié le chancelier en citant par exemple les estimations des pertes fiscales liées à la 2e réforme de la fiscalité des entreprises.

La Chancellerie fédérale devra présenter d’ici à janvier des propositions pour unifier la présentation des données utilisées afin notamment que les sources et méthodes de calculs utilisées soient transparentes. Même s’il est impossible de garantir à 100% qu’aucune donnée n’est fausse, le législateur et le public doivent savoir d’où viennent les chiffres.

Un groupe de travail institué par le chancelier a déjà formulé des idées concrètes. Outre un renforcement de la consultation et de la formation continue, il veut accroître le contrôle des brochures de votation. Si des données évoluent, le Parlement pourrait être sensibilisé à l’impact des modifications. Une obligation de l’analyser pourrait être inscrite dans la loi.

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