Le rôle clé des revenus dans les émergents

Yves Hulmann

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La taille des sociétés n’est pas décisive pour y investir selon Irina Hunter de LGM Investments.

 

Environ 80% de la population mondiale réside dans les pays émergents, qui constituent aussi 60% du produit intérieur brut (PIB) global. En revanche, les entreprises issues des pays émergents ne représentent toujours que 10% de la capitalisation boursière mondiale totale. Trois chiffres qui résument mieux qu’une longue explication le décalage qui existe toujours entre le rôle croissant pays émergents au sein de l’économie mondiale et leur poids modeste d’un point de vue boursier. Pour autant, il ne s’agit pas de foncer tête baissée sur ces marchés en achetant l’ensemble des indices mais au contraire de prendre en compte la dynamique propre de différentes sociétés issues de pays émergents dans leurs secteurs d’activités, recommandent les experts de LGM Investments, un gérant d’actifs basé à Londres et à Hongkong qui appartient à BMO Global Asset Management.   

Boom démographique…

Côté population, l’Inde à elle seule comptera plus de 1,5 milliard d’habitants en 2030, soit une hausse de 17% par rapport à 2015. La croissance sera encore plus marquée dans des pays comme l’Indonésie (+15% à 295 millions d’individus), le Nigeria (+44% à 263 millions) ou le Pakistan (+30% à 245 millions). Si cette augmentation de la population sera un facteur clé à la base de la croissance des marchés émergents, ce n’est pas le seul critère d’investissement déterminant. «L’évolution de la population ne suffit pas en soi, c’est celle des revenus qui joue un rôle clé», nuance Christopher Darling, gérant de portefeuille chez LGM Investments.

… et de la classe moyenne

Le spécialiste souligne ici le rôle joué par l’urbanisation dans les pays émergents, les revenus dans les villes étant trois plus élevés que dans les zones rurales. Enfin, l’adoption des technologies est aussi un paramètre essentiel pour permettre l’essor des économies émergentes. Ainsi, l’apport de nouvelles technologies, même parfois relativement simpes, comme les paiements via les téléphones mobiles, peut avoir un impact considérable sur le développement de certaines activités commerciales, puis finalement sur l’évolution du revenu moyen par habitant et l’émergence de la classe moyenne. D’ici à 2030, la classe moyenne devrait plus que doubler pour atteindre 234 millions d’habitants au Moyen-Orient et en Afrique du Nord et plus que tripler à 107 millions de personnes en Afrique sub-saharienne. Dans la région Asie-Pacifique, elle devrait être multipliée par six pour dépasser 3,3 milliards d’individus.

La qualité plutôt que la taille

Reste à savoir comment sélectionner les entreprises qui sauront le mieux tirer parti de ces développements à le long terme. Selon Irina Hunter, gérante de portefeuille chez LGM Investments, la taille des sociétés n’est pas décisive. «Nous investissons dans des entreprises de qualité et nous espérons que ces sociétés vont ensuite s'agrandir», a-t-elle expliqué lors d’une série de présentations effectuées à la fois à Genève et à Zurich cette semaine. Comment définit-on la qualité de ces entreprises? Le gérant d’actifs tient compte de quatre critères: la durabilité du modèle d’affaires, la solidité du bilan, l’alignement des objectifs de la société avec ses actionnaires majoritaires et l’expérience démontrée de l’équipe de direction.

Ce processus de sélection des titres explique aussi que la composition du fonds BMO LGM Global Emerging Markets Growth and Income Fund est largement décorrélée de celle de l’indice de référence, à la fois d’un point de vue géographique et sectoriel. Ainsi, les sociétés indiennes représentent environ 19% du fonds, contre seulement 8% au sein de l’indice MSCI Emerging Markets. A l’inverse, la Chine et Hongkong ne pèsent que 18% au sein du fonds, comparé à plus de 30% au sein de l’indice de référence. Même situation du point de vue des secteurs: les biens de consommation de base pèsent plus de 40% au sein du fonds, contre à peine 6% dans l’indice de référence.

Ne pas exagérer les risques liés aux taux US

Comment les gérants voient-ils les risques liés à la perspective d’une remontée des taux d’intérêt aux Etats-Unis, susceptible de rendre comparativement moins attrayants les placements dans les pays émergents? Si l’on a une perspective d’investissement axée sur le long terme dans les pays émergents, Irina Hunter estime qu’il ne faut pas accorder trop d’importance à ce facteur. «Quoiqu’il se passe dans le cadre de la politique monétaire américaine, cela ne va pas empêcher les Indiens d’acheter davantage de biens de consommation de base, à l’exemple des produits pour les soins dentaires, durant ces prochaines années», illustre-t-elle. «Les entreprises qui savent répondre à ces besoins continueront de croître», est convaincue la spécialiste.

Les critères ESG, un plus pour le processus d’investissement

La prise en compte des critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) apporte aussi une aide utile lors du processus d’investissement, d’autant plus dans les pays émergents, a souligné de son côté Juan Salazar, analyste ESG chez LGM Investments. L’intégration des critères ESG apporte en effet une double valeur ajoutée : ils fournissent, d’une part, une indication précieuse sur la qualité des entreprises et, d’autre part, ils contribuent à renforcer la stabilité de celles-ci. La prise en compte des critères ESG réduit ainsi les risques d’investissement et elle peut être une source de rendement additionnel pour les investisseurs qui ont une approche active, conclut le spécialiste.