Vous avez dit numérisation?

Yves Hulmann

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Le «tout numérique» dans les services financiers? Pas si sûr.

Guichets virtuels, hypothèques conclues entièrement en ligne, gestion d’actifs soutenue par l’intelligence artificielle: il ne se passe pas une semaine sans que le rapport d’un cabinet de conseil n’annonce la transformation en profondeur à venir des services financiers. Se déplacer au guichet? Inutile, un «chatbot» se chargera de résoudre vos problèmes pratiques à distance. Discuter de placements avec votre conseiller? Un robot conseiller se chargera de définir l’allocation d’actifs la plus appropriée à votre profil de risque.

S’il est cependant un domaine où beaucoup de banques restent réfractaires à la numérisation, c’est celui des tâches en lien avec la compliance. J’ai pu en faire l’expérience récemment à la suite d’un déménagement. L’ancienne garantie de loyer était auparavant déposée dans une banque cantonale auprès de laquelle je ne détenais, sinon, aucun autre compte. Autant alors récupérer le montant de la caution pour le loyer et le transférer dans autre établissement, en l’occurrence «trop grand pour faire faillite». Une simple signature apposée en bas d’un formulaire renvoyé par courrier ou un passage au guichet le plus proche et le cas est réglé, pensais-je. Pas si simple.

De telles procédures
paraissent être d’un autre âge.

De passage au guichet de la grande banque, l’employée me signale qu’il faut prendre rendez-vous avec un conseiller, aucun d’entre eux n’étant disponible à ce moment-là et m’indique un numéro à composer. Une demi-heure plus tard, le numéro commençant par 0800 me dévie sur différentes options à sélectionner. Après une ou deux minutes à écouter une musique de fond, au demeurant très agréable, un employé d’un centre d’appel décroche enfin: «Ce mercredi? Non, ce n’est pas possible». Après plusieurs aller et retours entre centre d’appel et succursale locale, un rendez-vous est enfin pris – dans deux semaines seulement. «Je réserve 45 minutes», prend soin de préciser l’employé du service d’appel.

A l’heure où la Finma permet aux établissements d’effectuer l’identification vidéo lors de l’ouverture d’un compte, de telles procédures paraissent être d’un autre âge, surtout lorsqu’il s’agit de grands instituts «à la pointe de la technologie» dans toutes sortes de domaines. A cet égard, il est amusant d’observer qu’en 2016, c’est une toute petite banque régionale, l’Hypothekarbank Lenzburg en Argovie, qui avait été qualifiée de «banque la plus numérique» de Suisse dans un classement établi par le site finews.ch.

Reste que l’analogique en matière de services financiers a aussi du bon. Me rendre au rendez-vous fixé à la banque m’obligera à quitter mon écran pour prendre l’air quelques minutes. De plus, il y a fort à parier que le café y soit excellent. C’est peut-être cela qu’une banque entièrement numérique n’arrivera jamais à offrir à ses clients.