Un retour en force

Roger Merz, Vontobel

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Stabilité et durabilité de la croissance économique paraissent dicter le nouveau ton des dirigeants chinois.

© Keystone

Après l’un des pires mois historiques en octobre 2022, les actions chinoises ont effectué un retour en force après la décision du pays d’abandonner sa politique de «zéro covid».

Les raisons de ce retour sont claires si l’on examine les données. Entre fin octobre 2022 et fin janvier 2023, les actions chinoises se sont envolées avec un rendement de plus de 50% pour l’indice MSCI China, tandis que l’indice MSCI China A Onshore a progressé de près de 25%. Les flux d’actions vers le nord en direction des bourses de Shanghai et de Shenzhen ont augmenté de 245 milliards RMB (environ 36 milliards USD) entre fin octobre 2022 et fin février 2023, selon les données compilées par JP Morgan.

Cependant, ce rebond a été de courte durée, les indices MSCI China et MSCI China A Onshore ayant chuté respectivement d’environ 16 et 7% entre le 27 janvier et le 20 mars 2023. Un tel virage dans les performances est, selon nous, une réaction normale, vu les inquiétudes persistantes des investisseurs sur l’inflation, le ralentissement économique mondial et les tensions géopolitiques. En outre, nous pensons que la révision à la hausse initiale des actions chinoises a été portée par une expansion de la valorisation et que la prochaine étape sera menée par les bénéfices des entreprises et la rentabilité.

Les données des secteurs manufacturier et des services font penser à une reprise. Début mars, l’activité manufacturière a connu sa plus forte progression mensuelle depuis plus de dix ans. Plus loin dans le mois, les données des services et de l’activité de construction ont atteint leur plus haut niveau depuis mai 2011.

L’immobilier a également fourni des nouvelles positives. Le graphique 1 montre que les ventes de logements présentent des signes précoces de stabilisation en février, la valeur des ventes de logements neufs par les 100 plus grands promoteurs immobiliers du pays progressant de 14,9% par rapport à l’année précédente. Fait important: les prix des logements neufs ont aussi enregistré leur première hausse mensuelle depuis 18 mois.

Mais les investisseurs nationaux manquent encore un peu de confiance en raison de la fragilité de la reprise du secteur immobilier. Vu que le secteur de l’immobilier représente environ 20% du PIB de la Chine, beaucoup considèrent sa reprise comme essentielle. L’émergence de nouvelles données sur la reprise dans l’immobilier devrait aussi rétablir la confiance des investisseurs nationaux.

Graphique 1 – Indice des prix résidentiels

On observe d’autres indices globaux de reprise économique. La fréquentation des grands magasins en janvier et février annonce un fort rebond. La priorité est donnée aux politiques visant à restaurer la confiance des consommateurs et des acheteurs de logements. Un nouveau cycle de crédit semble s’amorcer, avec des outils de politique monétaire structurelle canalisant des fonds low-cost vers des secteurs stratégiques, du moins pour les emprunteurs les plus vulnérables.

Tout comme les prémices du printemps changent l’humeur de beaucoup, ces premiers signes de reprise sont importants pour les investisseurs qui attendaient qu’un modèle de reprise de l’activité économique soit clairement établi dans les données. La récente publication des chiffres du T1 2023 du PIB chinois a été nettement supérieure aux attentes, avec une croissance économique de 4,5% en glissement annuel (contre 2,9% en glissement annuel au T4 2022), ce qui confirme que les données commencent à montrer une tendance à la reprise. Malgré les fortes entrées de ces derniers mois (environ 22 milliards d’USD dans les actions onshore en janvier et février), la Chine et Hong Kong conservent une pondération neutre dans la plupart des stratégies sur les actions des marchés émergents mondiaux. D’autres bénéfices d’entreprises et preuves tangibles de la reprise de la consommation intérieure inciteront plus de gestionnaires de portefeuilles des marchés émergents à surpondérer la Chine.

Que nous dit l’histoire?

Pour identifier les tendances investisseurs après quatre mois de forte performance des actions chinoises, nous avons analysé les rendements du marché chinois onshore sur les 19 dernières années. Le graphique 2 montre que ces périodes de forte performance sont souvent suivies d’une nouvelle période d’expansion du ratio cours/bénéfice (P/E) et de croissance des bénéfices. L’effet de l’expansion du ratio cours/bénéfice (P/E) a duré en moyenne 4 mois de plus. Ensuite, l’effet s’inverse (les ratios cours/bénéfice (P/E) reculent: la ligne noire croise la ligne zéro au 5e mois et passe sous 0 par la suite). Cependant, nous observons que les bénéfices restent en hausse plus longtemps après ces fortes périodes de performance, et qu’ils augmentent en principe pendant une autre période de douze mois.

Si l’histoire n’est pas garante des performances futures, le modèle de performance observé sur les 19 dernières années du marché chinois onshore indique que les bénéfices des entreprises chinoises doivent maintenant être positifs pour justifier la poursuite du rebond. Cela montre également l’importance de la dynamique pour les actions chinoises. Bien sûr, la prudence est de mise, car la situation actuelle de la Chine est très différente, tant sur le plan économique que politique, avec des taux de croissance plus faibles et une plus grande incertitude politique qu’il y a dix ans.

Graphique 2 – MSCI China A Onshore: anatomie d’un rebond

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