Situation contrastée dans les émergents

Oli Shakir-Khalil, Fidelity

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Les investisseurs doivent être conscients que des facteurs à court terme peuvent mener à des périodes de volatilité accrue.

Cette dernière décennie, le secteur des marchés émergents est devenu une opportunité d’investissement alternatif pour tout investisseur en quête de rendement et de diversification en dehors des marchés développés endettés. Chez Fidelity, la gamme de fonds investis sur les marchés émergents témoigne de la compréhension approfondie des forces structurelles qui façonnent la région et des entreprises les mieux équipées pour profiter du potentiel de croissance.

Les marchés émergents n’ont certes pas fini d’évoluer. On constate que les marchés financiers locaux s’étendent et que de nouvelles opportunités d’investissement apparaissent. Parallèlement, des réformes gouvernementales positives dans certains secteurs améliorent les fondements économiques et font ainsi mûrir les marchés. Les niveaux de dette souveraine des marchés émergents restent notablement inférieurs à ceux des marchés développés et les déséquilibres extérieurs ont été corrigés dans certains pays, réduisant le risque d’un choc grave tel celui du «Taper Tantrum» de 2013.

Les zones de risque existent encore
parmi de nombreux marchés émergents.

Des pays comme l’Inde et la Chine sont sur une trajectoire pluriannuelle de passage d’une économie à faible revenu à une économie de revenu moyen. Ailleurs, des pays comme la Côte d’Ivoire, grand producteur de cacao, prennent des mesures pour diversifier leur économie et grimper sur l’échelle de valeur. Alors que, dans le passé, un grand nombre de pays émergents ont misé sur l’exportation de matières premières pures, il est possible que le succès futur des pays à forte vocation exportatrice implique la production de produits de base à plus forte valeur ajoutée pour le marché intérieur avant d’exporter vers les marchés développés. Les zones de risque existent encore parmi de nombreux marchés émergents. Les investisseurs doivent être conscients que des facteurs à court terme, tels le risque politique, peuvent mener à des périodes de volatilité accrue. La Turquie, la Russie et le Brésil en sont des exemples récents. Un horizon de placement à long terme est recommandé pour une stratégie de revenu fixe avec ces caractéristiques.

Une stratégie à revenu fixe très complexe

L’EMD est une stratégie à revenu fixe très complexe qui s’accompagne d’un certain tapage médiatique, de risque politique et de volatilité à court terme. Les crises passées comme celle, financière, en Asie en 1997/1998, ou les défaillances souveraines dont nous avons été témoins en Russie et en Argentine ne favorisent pas cette option d’investissement. On comprend qu’il faille un peu de temps aux investisseurs pour s’y fier et investir. Mais les faibles taux des marchés développés les ont poussés à examiner de plus près les marchés émergents, l’une des rares sources d’investissement à revenu élevé restantes. On constate aujourd’hui que le marché s’est considérablement développé et diversifié depuis les années 1990.

Citons par exemple qu’en 1993, il y avait 14 pays dans l’indice de la dette souveraine en devises fortes, le Mexique et l’Argentine détenant chacun une part de près de 20%. Aujourd’hui, 66 pays en soulignent la diversité. D’une manière générale, il y a trois catégories principales que les investisseurs doivent connaître:

  • La dette souveraine en devises fortes, largement alimentée par la croissance économique, le niveau d’endettement et les soldes budgétaires.
  • La dette souveraine en monnaie locale, largement alimentée par la politique monétaire, l’inflation et les mouvements de change.
  • La dette d’entreprise en devises fortes, qui combine le risque lié au pays et le risque de crédit de l’entreprise elle-même.
Nous voyons de la valeur dans certains pays frontières,
comme l’Angola, l’Équateur et la Côte d'Ivoire.

Fidelity couvre les trois principaux domaines mentionnés ci-dessus. En outre, nous investissons dans des obligations indexées sur l’inflation, qui sont des obligations émises par des États souverains et liées à une protection contre l’inflation. Pour l’instant, nous préférons les titres de créance d’entreprise en devises fortes. Nous nous basons en cela sur une vision prudente concernant les monnaies des marchés émergents, car certaines entreprises axées sur l’exportation, comme un producteur brésilien de protéines, bénéficient de la dépréciation de la monnaie locale. Une entreprise ayant des coûts de production en monnaie locale et des flux de revenus en dollars du fait d’exportations à l’étranger génère plus de revenus si sa monnaie locale se déprécie. Sur les marchés souverains, nous voyons de la valeur dans certains pays frontières, comme l’Angola, l’Équateur et la Côte d'Ivoire. Les rendements sont attrayants et le risque idiosyncratique est élevé, ce qui permet généralement une corrélation plus faible avec le marché par rapport aux plus importantes dettes souveraines des marchés émergents.

En ce qui concerne les marchés obligataires en monnaie locale, nous préférons les obligations indexées sur l’inflation cette année, car nous constatons une hausse des prix de l’énergie, les effets de la fluctuation des taux de change en raison de la faiblesse des devises, une croissance nominale élevée et une hausse des prix des denrées alimentaires. Tous ces facteurs contribuent à la hausse de l’inflation sur les marchés émergents. Un produit en monnaie forte est recommandé aux investisseurs à la recherche de rendements plus stables et d’un bon niveau de revenu. Les actifs en monnaie locale sont exposés à une plus grande volatilité en raison de la composante représentée par le change. D’autre part, les très faibles niveaux de corrélation avec les titres à revenu fixe des marchés développés font de cette option un puissant diversificateur. La combinaison d’actifs en devises fortes et locales s’accompagnant d’une approche flexible et sans contrainte peut représenter une manière optimale d’investir dans cette stratégie complexe de titres à revenu fixe, riche en opportunités d'investissement.

Les marchés émergents ont du mal à obtenir
de bons résultats face à la vigueur du dollar.
Dépendance aux marchés développés
Dans quelle mesure les économies des marchés émergents dépendent-elles des marchés développés tels que les États-Unis?

La Réserve fédérale américaine (Fed) allège son bilan et draine du marché les liquidités en dollars. Si l’on ajoute à cela l’augmentation des rendements du Trésor américain, il devient de plus en plus intéressant de rapatrier des dollars aux États-Unis. Cela a un effet immédiat sur les flux de capitaux: l’argent quitte les marchés émergents pour retourner sur les marchés développés. L’appréciation du dollar américain en est un deuxième effet.

Cette situation a une incidence sur les rendements de l’EMD, et en particulier sur la dette en monnaie locale, car les marchés émergents ont du mal à obtenir de bons résultats face à la vigueur du dollar. L’appréciation du dollar remet également en question la capacité des gouvernements et des entreprises à rembourser la dette émise en dollars si leur monnaie locale se déprécie. Les marchés émergents sont sensibles à une guerre commerciale mondiale menée par le protectionnisme commercial entre les États-Unis et la Chine.

Les dommages collatéraux qu’une guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine causerait aux marchés émergents pourraient être importants, en particulier en Asie. Mais il reste encore des endroits prometteurs où la sensibilité aux marchés développés est plus faible. Les marchés axés sur les consommateurs, comme l’Inde, sont moins dépendants des marchés développés et devraient poursuivre leur croissance.

Un calendrier politique plus stable
représente un autre atout.

Pour ce qui est de l’avenir, dans une perspective à court terme, nous demeurons prudents à l’égard de l’EMD. Le flot d’argent facile des États-Unis se tarit, source possible de stress périodique pour les marchés émergents, mais susceptible d’être atténué par des fondements généralement sains si la Fed américaine ferme lentement les vannes et si la dynamique de croissance se maintient.

Les élections étant terminées dans de nombreux marchés émergents, un calendrier politique plus stable représente un autre atout. Dans l'ensemble, nous sommes tactiquement prudents quant à l’EMD, mais nous pensons que la stratégie d'investissement bénéficiera de tendances séculaires à plus long terme.

Pour les investisseurs visant un investissement sur la durée, l’EMD offre toujours une occasion attrayante d’accéder à des marchés à forte croissance avec une démographie favorable et des fondements assainis. Ces facteurs, associés à de solides coussins de rendement nominal et réel par rapport aux marchés développés, peuvent rendre l’EMD une option à long terme attrayante pour les investisseurs.