Réforme à grande vitesse: le cas du secteur ferroviaire

Bruno Cavalier, Oddo BHF

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Le gouvernement français actuel veut revoir la gouvernance de la SNCF et mettre fin au statut spécial de ses employés. Tout cela d’ici l’été.

On savait que le gouvernement français avait un agenda de réformes bien chargé en 2018 et au-delà. On vient d’apprendre, à la surprise générale, que la nouvelle priorité était de réformer la SNCF, l’opérateur public du système ferroviaire. Au-delà des problèmes spécifiques du secteur, il y a là un symbole, qui renvoie dans la mémoire collective aux grèves de 1995 dans les transports et à la débandade du tandem Chirac-Juppé. Le gouvernement actuel veut revoir la gouvernance de la SNCF et mettre fin au statut spécial de ses employés. Tout cela d’ici l’été. Les premiers sondages d’opinion sur le sujet soutiennent le projet du gouvernement.

Selon le Boston Consulting Group, la performance du système ferroviaire français se situe au septième rang européen sur 25 pays. La France était deuxième en 2012, quatrième en 2015. La dégradation n’est pas massive mais elle est continue. Un rapport récemment remis au gouvernement français a mis en lumière les problèmes du secteur: qualité du service dégradée, infrastructure vieillissante, gouvernance opaque, missions de service public mal définies, endettement massif, dérive des coûts (en partie à cause du statut des cheminots), etc. Tout cela rend problématique l’ouverture à la concurrence prévue par les textes européens. Partant de ce constat alarmant, le Premier ministre vient de lancer une réforme de la SNCF. Il en a même fait la priorité du moment, alors même que l’agenda des réformes est déjà bien rempli. La proposition du rapport de fermer les lignes régionales déficitaires est écartée mais il est prévu de mettre fin au statut des cheminots pour les nouveaux recrutements et de revoir la gouvernance de l’entreprise. De plus, le gouvernement n’a pas exclu de légiférer par ordonnances, comme il l’avait fait pour la réforme du code du travail l’été dernier. Sans surprise, les syndicats de la SNCF sont en ébullition, certains promettant de rejouer les grandes grèves de l’hiver 1995 qui avaient fait plier le gouvernement d’Alain Juppé (gaphique: nombre de jours de grève ci-dessous).

On manque de place pour faire la liste de tout ce qui a changé depuis 1995, mais un élément de contexte doit être gardé à l’esprit: le ratio dette publique/PIB a été multiplié par deux (graphique: taux d'endettement public). Ce qui se joue avec la réforme de la SNCF dépasse les seuls problèmes du secteur ferroviaire, aussi graves soient-ils. Il s’agit de savoir si l’on peut casser les rentes de situation (ici, le statut des cheminots), qui apparaissent comme des privilèges d’Ancien Régime. C’est une étape obligée avant l’harmonisation des régimes de retraite, une réforme pour l’instant prudemment déplacée en 2019.

France: nombre de jours de grève

France: taux d'endettement public

Source: DARES, INSEE, Oddo BHF Securities