Perspectives hebdomadaires de Raiffeisen

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L'Italie continue de faire les gros titres. Les investisseurs se réfugient vers l'or.

L'Italie continue de faire les gros titres. En fin de semaine dernière, l'agence de notation Moody's a abaissé à «Baa3» la solvabilité du pays endetté. L'évaluation de la solvabilité ne se situe ainsi plus qu'à un niveau au-dessus du statut notoire de spéculatif. Si l'une des trois principales agences de notation privait les obligations d'Etat italiennes de l'appellation «InvestmentGrade», cela aurait de fortes incidences: les coûts de refinancement des banques italiennes monteraient en flèche et le programme d'achat d'obligations de la BCE serait aussi impacté. Mais la situation n'en est pas encore là car la perspective de notation «stable» a d'abord apaisé les esprits, si bien que les écarts de crédit se sont ressaisis en début de semaine. Toutefois, le prochain coup suivit dès mardi lorsque la Commission européenne a rejeté le budget de l'Italie pour 2019, le considérant comme incompatible avec les règles du pacte de stabilité UE. La réponse agressive habituelle des populistes italiens n'a pas tardé: ils cherchent la confrontation avec Bruxelles, ce qui se traduira prochainement par des marchés obligataires mouvementés.

Les marchés des actions n'ont pas non plus été épargnés cette semaine. Le SMI suisse a relativement bien résisté, alors que d'autres indices européens ont frôlé de nouveaux creux annuels. Sur le marché directeur US aussi, les cours ont de nouveau été corrigés au plus bas. En effet, il y eu de premières divergences positives, et ces dernières années, elles avaient toujours fini par stabiliser les prix. Même le «baromètre de la peur» qu'est le VIX, qui n'a pas pris l'ascenseur lors de la dernière baisse des cours, reflète une évaluation positive sur les graphiques. Le cours de l'or – une valeur refuge dans les turbulences automnales à la Bourse – se heurte à présent aux premiers obstacles majeurs. L'évolution des taux continuera sans doute à impacter le métal jaune. Vu la situation économique américaine toujours favorable, qui devrait être soutenue par l'indice des directeurs d'achat et les chiffres du marché de l'emploi la semaine prochaine, la courbe des taux à court terme va sans doute se dresser et grèverait une reprise durable du cours de l'or.

Dans l'intervalle, l'économie chinoise se situe au mieux dans un mode de stabilisation. La guerre commerciale avec les USA reste le principal facteur de risque pour l'Empire du milieu. Le gouvernement tente, de manière ciblée, de contrer tout risque d'un ralentissement économique. Outre les mesures monétaires et fiscales, la monnaie chinoise du renminbi devrait aussi jouer un rôle important. Une nouvelle dévaluation est très probable et pourrait compenser une partie des tarifs douaniers imposés par les USA. Après que la Chine n'ait (pour le moment) pas été qualifiée de «manipulateur de la monnaie» par le Trésor américain, peu de choses s'opposent à cette attente.

Graphique de la semaine 
Indice S&P 500 et or (indexés), indice de volatilité VIX
Sources: Bloomberg, Investment Office Groupe Raiffeisen
 
Gros plan: la Chine fait le grand écart entre réformes et stimulations 

Le programme de réformes du gouvernement chinois a nettement progressé ces 12 derniers mois. Réduire les risques financiers, lutter contre la pollution et réduire le chômage – la liste des objectifs est longue. Mais les inévitables dérapages dans l'économie deviennent de plus en plus évidents, tout récemment dans les chiffres de la croissance du T3: la progression de 6,5% annoncée la semaine dernière fut un nouveau repli vers une baisse générale des taux de croissance. La guerre commerciale avec les USA est alors plus que gênante: risque de perte d'emplois par milliers et de troubles dans la population. Et la baisse du marché des actions est aussi déprimante: depuis le début de l'année, le Shanghai Composite Index a perdu plus de 20% en valeur et se trouve désormais, par définition, dans un nouveau marché baissier. Cela freine encore plus les envies de consommation dans la classe moyenne émergente. Pour le président Xi Jinping et le parti communiste, la «stabilité» constitue donc de nouveau la priorité absolue.

Un assouplissement monétaire avec mesure 
Taux d'intérêt et réserves obligatoires pour les banques en Chine
Sources: Bloomberg, Investment Office Groupe Raiffeisen

En conséquence, le gouvernement chinois a réagi ces dernières semaines: la banque d'émission a abaissé plusieurs fois les réserves minimales obligatoires des banques et injecté des liquidités à grande échelle, entraînant une réduction notable des conditions de refinancement. Le côté fiscal apporte aussi un soutien. Les gouvernements locaux sont donc tenus de délivrer davantage de titres de créance, dont le produit devrait finalement être affecté à de nouveaux projets d'infrastructure. Par ailleurs, divers allégements fiscaux ont été annoncés récemment. Une nouvelle vague incitative est ainsi en route. Mais à quel point est-elle stimulante cette fois-ci? Par rapport au programme d'investissement massif de 2008/09 ou aux mesures de soutien tout aussi notables de 2015/16, l'épisode actuel devrait avoir beaucoup moins de poids. Par exemple, l'attitude intransigeante à l'égard des banques fantômes se poursuit et les «crédits à problème» font l'objet d'une offensive continue. Par ailleurs, le marché immobilier en surchauffe est sous observation, un assouplissement n'étant pas encore prévu. Dans l'ensemble, le zèle de réforme à la fois persistant et freiné associé à une stimulation relativement contrôlée peut réduire le risque de voir la croissance fléchir, mais il n'y aura guère de nouveau boom. 

Même l'envie d'intervenir sur le marché des actions devrait se contenir cette fois-ci. Lors du dernier krach boursier chinois mi2015, l'Etat a fini par injecter des milliards sur le marché pour stopper la baisse des prix. Mais Pékin n'a guère intérêt à habituer à de telles opérations de sauvetage une population qui adore la spéculation: cela irait à l'encontre de l'effort déployé pour réduire l'endettement très élevé de l'économie. Les entreprises qui ont mis en gage leurs propres actions pour des crédits peuvent sans doute s'attendre à des aides, mais sinon, les choses en sont largement restées à des interventions verbales ces derniers jours, laissant aux investisseurs un certain répit, du moins temporaire. Les risques (politiques) restent élevés, même si la valorisation des actions chinoises est de nouveau assez favorable et que le moral morose laisse présager une entrée anticyclique. Les investisseurs devraient économiser leurs cartouches pour le moment.

Nouveau marché baissier 
Shanghai Composite Index
Sources: Bloomberg, Investment Office Groupe Raiffeisen

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