Perspectives améliorées – Multi-Asset Solutions de J.P. Morgan AM

Patrik Schöwitz, J.P. Morgan Asset Management

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Il faut notamment prendre en compte les signes précurseurs d’un redressement des statistiques macro-économiques et l’augmentation de la probabilité d’un accord sino-US.

SYNTHÈSE
  • Nous révisons à la hausse notre opinion sur les actions pour prendre en compte les signes précurseurs d’un redressement des statistiques macro-économiques, du recul du risque de récession et de l’augmentation de la probabilité d’un accord commercial, au moins limité, entre les Etats-Unis et la Chine.
  • Les risques à la baisse persistent néanmoins et des perspectives difficiles pour les bénéfices des entreprises constituent un handicap pour une nouvelle progression des actions. Mais dans un contexte d’amélioration de la dynamique de croissance macro-économique, les marchés devraient être capables de faire l’impasse sur les révisions en baisse des bénéfices.
  • La croissance anticipée des bénéfices se situant dans le milieu de la fourchette à un chiffre, associée à un certain potentiel d’expansion des valorisations, nous amène à considérer que des performances modestement positives pour les actions en 2020 constituent le scénario de base le plus vraisemblable.
  • Dans nos portefeuilles multi-asset, nous maintenons une orientation générale prudente mais avons adopté un positionnement plus neutre sur les actions. Sur le plan géographique, nous favorisons les actions des marches émergents et celles des grandes capitalisations US, les marchés que nous prisons le moins étant l’Australie et les actions des petites capitalisations US.
Amélioration des perspectives pour les actions

Nous avons respecté une approche prudente sur les perspectives des marchés actions au cours de la plus grande partie de cette année, en constatant que leurs perspectives étaient plafonnées à la hausse par une pression baissière sur les bénéfices ainsi que des inquiétudes suscitées par le risque de récession et le risque commercial et poussées à la baisse par le potentiel d’une politique monétaire proactive. L’environnement a toutefois évolué au cours de ces dernières semaines et avec le rebond d’environ 6% des actions internationales par rapport à leurs points bas d’octobre, les investisseurs ont paru retrouver leur appétit pour le risque. Ce changement est probablement le fait de plusieurs facteurs que nous estimons disposer d’un certain espace pour se renforcer. Nous devenons par conséquent plus positif sur les actions.

Le regain d’optimisme entourant les négociations commerciales sino-américaines semble avoir été le principal facteur d’amélioration du sentiment général sur le risque. Dans le cycle actuel des pourparlers, davantage qu’au cours des phases précédentes, nous constatons une dynamique vers un accord commercial au moins limité et un mini-deal dissiperait certainement une partie du sentiment négatif qui plane sur l’économie réelle et sur les marchés. Mais les signes précurseurs d’un redressement des statistiques macro-économiques sont probablement désormais l’élément le plus important pour le sentiment sur le risque. Les indices PMI mondiaux, tout comme ceux des Etats-Unis, ont évolué à la hausse dans leurs dernières publications et les données macro émanant de certaines économies asiatiques indicatrices de tendance se sont améliorées également. 

Nous estimons que la probabilité d’une récession aux Etats-Unis au cours des 12 prochains mois – l’inquiétude sous-jacente majeure du marché – n’est désormais que modérément élevée, à un niveau d’environ 20%-30%, contre environ 50% il y a quelques semaines seulement.

Nous pensons qu’il est trop tôt pour donner le feu vert aux actifs risqués. Les pourparlers commerciaux pourraient encore s’enliser, comme cela a été le cas après les phases antérieures d’optimisme, de même que le retournement constaté dans les statistiques macro-économiques pourrait s’avérer fugace. Tout compte fait cependant, cette combinaison de facteurs suggère que le récent retour de l’appétit pour le risque n’est pas près de s’inverser. Sur le plan technique, nous décelons également un motif d’optimisme. Plusieurs importants indices actions sont en bonne voie de franchir à la hausse leur récent couloir de fluctuation et la profondeur du marché progresse par rapport à ses niveaux modestes, suggérant un nouveau risque haussier. De plus, le positionnement des investisseurs et l’afflux de capitaux sur les actions sont orientés à la hausse.

Perspectives des fondamentaux des actions

A moyen terme, la pression qui s’exerce sur les bénéfices des entreprises constitue le principal handicap pour les marchés actions. Après des révisions en baisse répétées tout au long de cette année, les anticipations du consensus des analystes prévoient désormais une croissance des bénéfices 2019 à peine positive dans la plupart des zones géographiques (ainsi qu’une légère contraction de ceux-ci au Japon), suivie en 2020 d’un fort redressement des taux de croissance des bénéfices qui pourraient atteindre environ 10% au niveau mondial (6% au Japon, 10% aux Etats-Unis ainsi qu’en Europe, et 14% sur les marchés émergents).

Ces prévisions semblent trop agressives, particulièrement dans la mesure où plus de la moitié de la croissance des BPA au niveau mondial en 2020 devrait provenir de l’amélioration des marges bénéficiaires, ce qui semble peu probable au vu de l’évolution récente des tendances. Nous prévoyons pour 2020 une croissance faible des bénéfices ne dépassant pas le milieu d’une fourchette à un chiffre dans la plupart des régions.

Dans le même temps, nous décelons plusieurs facteurs contribuant à un scénario légèrement plus positif pour les marchés actions sous l’angle des bénéfices. En premier lieu, une saison des bénéfices du T3 meilleure qu’attendue suggère que le troisième trimestre s’avèrera être le point bas du cycle baissier de la croissance des bénéfices qui a débuté au début de cette année. Ceci renforce notre confiance dans nos prévisions de bénéfices pour 2020. En second lieu, si les anticipations de croissance du consensus pour 2020 restent nettement supérieures aux nôtres, leur récent recul les a ramenées dans une fourchette historique normale d’optimisme. En d’autres termes, les investisseurs devraient être capables de faire l’impasse sur de nouvelles révisions en baisse à court terme, particulièrement dans un contexte dans lequel le momentum économique se redresse au lieu de ralentir. Les précédents historiques le démontrent : au cours de 10 des 15 dernières années, les prévisions de bénéfices ont été révisées en baisse en cours d’année, selon une diminution médiane de 7 points de pourcentage (ppts). Seules trois de ces dix années ont subi une performance négative du marché des actions, l’une d’elles étant 2008, l’année de la crise financière mondiale (graphique 1).

Graphique 1: les marchés actions peuvent souvent monter malgré une baisse des prévisions de bénéfices

Le graphique ci-dessus montre la différence entre les anticipations de bénéfices du consensus au début de chaque année et les résultats réellement réalisés, parallèlement à la performance de l’indice global MSCI ACWI pour chaque année. Au cours de la plupart des années étudiées, la croissance des bénéfices réalisés a déçu les anticipations initiales; même dans ce cas, les performances des actions ont été positives au cours de la plupart des années considérées.
 

La modestie de nos prévisions des bénéfices implique qu’une progression des actions internationales au-delà du milieu d’une fourchette à un chiffre exigerait au moins une certaine expansion des valorisations. Nous avions été réticents à compter sur ce facteur de performance au cours de la récente période de ralentissement de la croissance. Mais si le rythme de la croissance s’oriente désormais à la hausse alors que la politique monétaire reste accommodante, un certain degré d’expansion des valorisations semble possible (bien que le récent parcours des actions aura déjà intégré dans les cours un certain niveau de reprise). Pourtant, les ratios P/E anticipés en dehors des Etats-Unis restent bien inférieurs aux moyennes de long terme (graphique 2). 

Aux Etats-Unis, le scénario des valorisations est un peu plus sombre: le P/E anticipé actuel de l’indice S&P 500 de 17,5 est supérieur d’environ 15% à sa moyenne de long terme, tout en restant néanmoins bien inférieur à ses récents sommets. Par rapport aux rendements obligataires, les actions restent valorisées très attractivement même aux Etats-Unis. Notre analyse suggère une prime de risque sur les actions aux Etats-Unis de plus de 6 % contre une moyenne de long terme de 4,6%. 

En conclusion, nous estimons qu’une performance des actions se situant dans le milieu d’une fourchette à un chiffre constituerait l’issue la plus probable pour l’année prochaine, avec une possibilité de progression vers le haut de cette fourchette si les valorisations s’apprécient. Si une récession prend forme, elle présenterait un risque de baisse important (les actions reculent d’environ 30% entre leur point haut et leur point bas dans un marché baissier typique) mais, comme nous l’avons relevé, la probabilité de récession au cours des 12 prochains mois a, selon nous, reculé.

IMPLICATIONS POUR LES CLASSES D’ACTIFS

Nous avons relevé nos perspectives sur les actions comme classe d’actifs et, tout en maintenant une approche globalement prudente, avons rapproché notre positionnement sur les actions de la neutralité dans nos portefeuilles multi-asset. Dans une perspective régionale, nous sommes devenus plus positifs sur les marchés d’actions cycliques. Les actions émergentes sont désormais notre région favorite avec celles des grandes capitalisations US, qui peuvent se comporter relativement bien dans un large éventail de scénarios. Nos marchés les moins prisés sont l’Australie et les actions des petites capitalisations US.

Graphique 2: les multiples des P/E sont tendus aux Etats-Unis et inférieurs a la moyenne ailleurs

Ce graphique montre les ratios P/E anticipés à 12 mois des Etats-Unis, des marchés développés hors Etats-Unis et des marchés émergents. Ils restent inférieurs à leurs moyennes de long terme hors des Etats-Unis et ne devraient pas être un handicap pour les performances. Aux Etats-Unis, les P/E sont tendus mais sans excès flagrant, restant même bien inférieurs même aux récents sommets.

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